L'éducation – dont l'étymologie latine est à la fois educere, conduire et edere, manger - apparaît donc aussi bien comme une nutrition que comme une conduite, une direction à donner. Déjà au XVIe siècle, pour Rabelais et Montaigne, l'éducation est un fin dosage de nourriture et d'exercice destiné à aider chacun à s'accomplir selon sa nature. Le mot nourriture désigne ici aussi bien les nourritures spirituelles que les aliments, et le mot exercice est synonyme d'effort de volonté. Pour Platon l'éducation était le dosage de gymnastique, de musique, de mathématiques et de dialectique le plus susceptible de rendre l'âme harmonieuse compte tenu de sa nature.
L'éducation est donc distincte de l'instruction, qui n'enseigne qu'un savoir théorique, quand l'éducation s'étend au domaine de la vie quotidienne. Quelles différences établir dès lors entre éducation, instruction et pédagogie ?
Aujourd'hui, l'école est souvent remise en cause dans son rôle d'éducation ; elle apparaît au fond soit insuffisante, soit inadaptée, et suscite nombre de polémiques. Les programmes scolaires, sans cesse modifiés, ne témoignent-ils pas alors d'une certaine crise de l'école dans sa fonction éducative ? La question principale est encore aujourd'hui celle de l'égalité des chances : dès lors, l'éducation transmise par l'école permet-elle un nivellement des savoirs, ou ne fait-elle que creuser les écarts culturels ? L'école est-elle finalement encore ce lieu de démocratisation dont rêvaient Condorcet et Jules Ferry ?
[...] Ce projet trouve son aboutissement en 1833 : la loi Guizot oblige les communes à ouvrir des écoles primaires publiques pour les garçons. En 1850, la loi Falloux établit l'ouverture d'écoles communales pour les filles. Mais ce sont les lois de Jules Ferry de 1881 et 1882 qui mettent en place un enseignement primaire obligatoire, laïque et gratuit pour les filles et les garçons entre 6 et 13 ans. Cette législation a été développée et progressivement élargie au collège, puis au lycée. Ce droit s'accompagne également d'un devoir essentiel : l'obligation scolaire. [...]
[...] Plus précisément, en quoi la sociologie de la modernité peut-elle influencer non seulement l'analyse du système éducatif, mais aussi les pédagogies qui s'y pratiquent. En fait, la société moderne étant fondée sur une industrialisation et une division croissantes des tâches, il s'ensuit une différenciation accrue des rôles sociaux, la spécialisation des fonctions sociales et, à terme, un risque d'éclatement de la «solidarité sociale», une montée de l'individualisme. Ce risque doit être contrebalancé, dit Durkheim, par le développement - que l'on observe - des valeurs ultimes relatives à la légitimation des droits, à la responsabilité et à la vocation des acteurs sociaux. [...]
[...] Rousseau fait entrer l'éducation de plain-pied dans la modernité. Rousseau, initiateur d'une «révolution copernicienne», aurait mis l'enfant au centre du processus éducatif. L'Émile y certes, fortement contribué, mais il est vrai qu'après une longue période d'indifférence, l'intérêt porté à l'enfant était dans l'air du temps et qu'il tendait même à devenir une mode: moralistes, autorités administratives, médecins redoublaient d'arguments pour inciter les mères à s'occuper de leur enfant, en commençant par l'allaitement. Rousseau, en fait, participa au développement de ce sentiment pour l'enfant. [...]
[...] Tout l'art du pédagogue sera de mener son action d'une façon telle que sa volonté ne se substitue jamais à celle de l'enfant. Dès les premières années de la Révolution, les plans d'éducation se multiplièrent. En 1792, la politique est devenue la préoccupation presque exclusive des éducateurs de la jeunesse. Tout le reste, religion, finesse du jugement, noblesse du cœur est relégué au second plan. L'homme n'est plus qu'un animal politique, venu au monde pour connaître, aimer et servir la constitution. [...]
[...] C'est en même temps un mouvement qui peut être source de changements radicaux, à condition pourtant que l'éducation sache, sans l'imposer, faire profiter la jeunesse de l'expérience humaine accumulée. Ce problème d'une éducation qui ne soit pas au service de l'ordre établi se pose beaucoup plus sérieusement que celui, souvent soulevé, d'une opposition entre éducation pour le bonheur individuel et éducation pour la société. Cette antinomie n'est qu'apparente, puisqu'il n'y a pas d'individu sans insertion sociale. En revanche, le dilemme conservation ou novation, non pas dans les formes, mais dans les orientations fondamentales, reste une source de tension majeure dans l'éducation contemporaine. [...]
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