Pour arriver à décoder le système complexe et abstrait de la langue écrite, les enfants doivent effectuer un travail de nature cognitive, constitué de multiples étapes. En effet, la maîtrise de l'écriture implique de comprendre que la langue écrite représente la langue orale, et, par là même, est en relation directe avec les objets réels du monde environnant ; le langage parlé trouve son image sur le papier avec un code alphabétique, syllabique, phonétique, segmenté, qu'il est bien difficile à concevoir lorsque l'on n'a pas encore de conscience linguistique. Un enfant, par exemple, pourra employer correctement un mot complexe à l'oral, mais sera incapable de l'expliquer lorsqu'on lui demandera de le considérer de manière isolée.
Comment fait-il pour concevoir la langue technique écrite par rapport à sa connaissance pratique de la langue orale ? Quelles sont les étapes de cette compréhension ? Voici des questions qu'il est nécessaire de se poser si l'on veut perfectionner, faciliter ou créer de nouvelles méthodes scolaires d'apprentissage de la lecture et de l'écriture.
En regroupant les résultats de recherche et en comprenant mieux la représentation enfantine de l'écriture, certains chercheurs peuvent alors se positionner sur une théorie d'apprentissage de la lecture et de l'écriture. C'est en considérant les différentes méthodes, et notamment la méthode globale (accent mis sur le sens des mots) et syllabique (accent mis sur le code), que naît la théorie de la clarté cognitive, réunissant deux aspects égaux dans la compréhension de la lecture : la compréhension de ses buts (signification), et la compréhension de ses caractéristiques techniques (codification).
[...] (Thomas ne semble donc pas encore avoir acquis de réelle conscience linguistique, puisqu'il ne conçoit pas que des actions puissent être décrites dans des segments figés.) Mais de toute évidence, il semble centré uniquement sur le sens. Lucas, lui, ose se lancer dans un vrai travail cognitif : pour le premier mot, il marque un long temps de latence, puis invente des symboles. Il les inverse lorsque je lui dicte autre chose. Pourtant, arrivé au crocodile, il abandonne ses recherches et change de stratégie en dessinant un crocodile ; idem pour la dernière phrase. [...]
[...] En ce qui concerne le CP, on remarque que les enfants sont passés à un type nettement différent de travail cognitif : ils ont maintenant appris les règles de l'écriture et tentent de les appliquer. Ils ne sont donc plus dans le stade pur d'écriture inventée Ainsi, les deux élèves de CP ne marquent plus de temps de latence, consacrés au comment vais-je m'y prendre mais font régulièrement des pauses pendant l'écriture afin de raccrocher ce que je leur dicte aux règles que la maîtresse leur a apprises. [...]
[...] Il en est de même pour Hugo, qui fait ses s à l'envers et entoure le ou de souris avec deux barres, sûrement parce que la maîtresse avait séparé le couple de lettres du reste d'un mot pour expliquer la démarche. Procédés de résolution des problèmes Dès la moyenne section, les approches de résolution des problèmes sont totalement différentes chez les enfants. Pour écrire le mot chat, Thomas marque un grand temps de latence. Il réfléchit et finit par dire : Je sais pas moi Puis il voit le tampon de l'école sur la table et réalise : Des fois, il peut y avoir des choses écrites là. [...]
[...] En l'espace d'une demi-heure, Lucie semble avoir effectué un gros travail cognitif et en être presque au stade de la phonétisation syllabique de l'écriture. Pour Thomas, le temps de la passation est trop long, il se déconcentre et est incapable de produire quoi que ce soit. IV- Conclusion et discussion Grâce à ces différents entretiens, j'ai donc essayé d'observer comment l'enfant concevait le système complexe de la langue. Quels choix les enfants interrogés ont-ils faits concernant le nombre de signes, leur provenance, et comment les ont-ils justifiés ? [...]
[...] Pour Laura, elle est un peu moins bien acquise : certaines lettres ne correspondent pas toujours au son du mot qu'elle veut écrire. Le mécanisme ne semble pas totalement acquis. Il lui arrive encore de noter une lettre pour une syllabe entendue : gar-d pour jardin, et de-l pour dans le. Elle confond encore quelques lettres, ou groupes de lettres (cf pour mais elle a fait des progrès dans la graphie. Pour Lucie, de la grande section, qui est en phase de recherche et d'invention, les lettres ne correspondent pas encore à grand-chose. [...]
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