Au fur et à mesure que la jeune IIIe République se républicanise, l'école devient le symbole par excellence de l'action des Républicains: un lieu laïc, gratuit et égalitaire (réserve sur ces deux derniers points cependant, le système dualiste hérité du XIXe siècle distinguant nettement les écoles primaires pour les enfants du peuple et les établissements secondaires où sont formés les fils de notables).
Les enseignants, et surtout les maîtres d'école à la campagne, sont chargés d'une mission: celle de l'éducation intellectuelle, morale et civique de la population; éducation dont l'absence aurait été la raison de la défaite récente face à l'Allemagne. La profession d'instituteur en elle-même, vécue comme une véritable vocation, contient tout l'idéal républicain: issus de milieux très modestes, les futurs instituteurs gravissent les échelons de l'échelle sociale grâce à leur mérite et à leurs efforts, et leur statut est une récompense. Ces enseignants sont des porte-parole du gouvernement et se contentent de suivre ses indications.
En ce sens, la Grande Guerre constitue une rupture dans la profession qui voit ses idéaux bafoués par le gouvernement, et ses croyances en la raison, le progrès et la science retournées par les atrocités de la guerre. La formation professionnelle change peu, que ce soit pour les instituteurs ou les professeurs, mais le métier est vécu différemment, et l'engagement des enseignants dans des luttes extrascolaires est plus important.
Il s'agira donc d'étudier les évolutions du métier d'instituteur et de celui de professeur des années 1870 à aujourd'hui, de la formation professionnelle, de leurs places et rôles dans la société; et ceci, à la lumière des transformations de la société française (politiques, sociales, économiques, culturelles).
[...] En juin 1981, pierre Mauroy, fils d'instituteur et ancien prof d'histoire, est nommé au poste de Premier ministre. La fin des années 1980 est marquée par la déception des enseignants à l'égard du PS et par un recul de leurs suffrages, à l'instar de l'électorat socialiste. Mais malgré les interrogations et les incertitudes, le socialisme demeure l'idéologie majoritaire des enseignants. Historiquement, la question scolaire, l'un des clivages fondamentaux entre gauche et droite, a fait pencher à gauche l'ensemble des enseignants fidèles à l'école républicaine. [...]
[...] Instituteurs et professeurs en France depuis les années 1870 Nos jeunes maîtres étaient beaux comme des hussards noirs. Sérieux et peu tremblants de leur précoce, de leur soudaine omnipotence (Péguy, L'Argent, 1913). Au fur et à mesure que la jeune IIIe République se républicanise, l'école devient le symbole par excellence de l'action des Républicains: un lieu laïc, gratuit et égalitaire (réserve sur ces deux derniers points cependant, le système dualiste hérité du XIXe siècle distinguant nettement les écoles primaires pour les enfants du peuple et les établissements secondaires où sont formés les fils de notables). [...]
[...] Pire, le progrès des armements a conduit à des combats d'un genre nouveau, à une boucherie, à une barbarie humaine. Les certitudes des hussards noirs de la République vacillent. Dès lors, les instituteurs vont mettre toute leur passion à refuser la guerre et vont s'ancrer dans le pacifisme. Ils continuent de croire en la raison et en la justice, mais ils n'accordent plus de sagesse aux gouvernements. Ils sont encouragés dans cette voie par certains intellectuels (Anatole France). Dans l'entre-deux-guerres, des élèves maîtres commencent à s'insurger contre la transmission d'une culture lacunaire, encyclopédique et superficielle. [...]
[...] Aux yeux des parents de la petite bourgeoisie, le professeur de lycée représente un personnage respectable et respecté. Au-delà de ces motifs matériels, les élèves se laissent guider vers le métier par plaisir intellectuel. Les études qui mènent au professorat permettent de se vouer à une culture que les futurs professeurs jugent brillante, distinguée, et que l'ensemble des Français envie. Pour accéder aux études supérieures qui conduisent au professorat, les élèves doivent réussir le baccalauréat, qui se prépare dans les lycées d'Etat ou dans les collèges communaux. [...]
[...] Les professeurs s'engagent dans les actions pacifistes et combattent avec acharnement la progression du fascisme. Les défauts et les pesanteurs de l'université s'accusent dans l'entre- deux-guerres. Peu à peu privé de la sève de la recherche, l'enseignement supérieur va tendre à s'atrophier et à s'assimiler à l'enseignement secondaire. A côté des universitaires qui gagnent la notoriété dans leur discipline d'élection, nombre de professeurs brillent par leurs travaux littéraires. (Stéphane Mallarmé, Julien Gracq). Quelques années plus tard, le prestige de ces professeurs phares embellira et magnifiera la représentation que les Français se font des professeurs de la IIIe République. [...]
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