Les nouvelles politiques éducatives, mises en place ces trois dernières décennies, conduisent à des redéfinitions des rôles des acteurs. Historiquement, les enseignants ont joué un rôle déterminant dans la constitution de l'école obligatoire à la fin du XIXème siècle. Depuis cette époque, les évolutions sont nombreuses.
Nous mobiliserons une approche en termes de sociologie du travail et des professions qui nous permettra de comprendre le fonctionnement de l'activité des enseignants et leur organisation professionnelle pour ensuite nous intéresser aux reconfigurations contemporaines induites par les réformes.
Notre analyse portera principalement sur la France et le Royaume-Uni. Ces deux pays ont en commun la création d'un système de scolarisation obligatoire dans la seconde moitié du XIXème siècle. Pourtant, d'autres caractéristiques les distinguent fortement : les traditions et les pratiques enseignantes sont différenciées, l'application des principes des nouvelles politiques éducatives a été réalisée à des degrés divers.
I- France/Royaume-Uni : deux configurations spécifiques
A- Deux configurations spécifiques
Les mondes scolaires français et britannique ont des caractères fondamentalement différents.
Au Royaume-Uni, l'école a été bâtie contre l'absolutisme de l'Etat, dans un but d'affirmation des droits de l'individu et des libertés locales. Les enseignants sont traditionnellement recrutés sous contrat par les établissements ou les autorités locales d'éducation. La conception britannique de l'éducation est fondée sur l'individualisme humaniste ; elle est marquée par le pragmatisme et une forte dimension morale.
En France, l'école est constitutive et garante de l'unité républicaine. Les enseignants sont fonctionnaires (recrutés sur concours par le Ministère de l'Education Nationale). Les valeurs scolaires sont liées au projet républicain d'intégration, de cohésion nationale et d'arrachement aux particularismes.
B- Le personnel enseignant : deux modèles professionnels
Le Royaume-Uni est un pays de tradition communautaire. Traditionnellement, les enseignants ne sont responsables qu'envers leur employeur. L'imaginaire éducatif et professionnel est constitué autour des idées de communauté et de professionnalisme. L'ancrage disciplinaire est fort. L'activité enseignante est ici définie et perçue comme une profession.
En France, l'enseignement est conçu plutôt comme un métier, sur le modèle de la vocation et de l'artisanat. Le modèle est beaucoup plus académique, déterminé par la relation aux élèves. Le travail solitaire constitue la norme professionnelle.
Cependant, dans le contexte des réformes de l'école, ces deux modèles connaissent des transformations, notamment au Royaume-Uni où les gouvernants reprennent le contrôle sur l'école (...)
[...] Les mentors accompagnent les enseignants/stagiaires sur la base de standards de compétences. L'entretien est la forme privilégiée d'intervention. Mais le mentor est aussi un évaluateur, ce qui peut limiter la relation de confiance. III- Réformes et transformations du travail des enseignants Tout un ensemble de travaux s'intéressent à la manière dont les enseignants concilient les nouvelles attentes induites par les réformes et leurs pratiques de travail. Il s'agit de saisir les effets des politiques éducatives sur les pratiques et les représentations enseignantes. [...]
[...] En Angleterre, l'engagement dans la profession est moins lourd. L'expérience étudiante parait moins coupée des expériences et du devenir professionnel. L'univers académique est moins coupé du monde professionnel. Dans les deux cas, la connexion pratique et éthique, la véritable entrée dans la pratique enseignante se fait à travers le contact avec les élèves. L'apprentissage du travail de classe et accompagnement Les pratiques d'accompagnement en formation se sont développées dans les deux pays comme des dynamiques d'autorisation. En France, la conception de l'enseignement devient plus globale qu'auparavant, tenant compte du développement de l'individu ; l'attention n'est plus seulement portée sur les disciplines, mais aussi sur l'interaction enseignant/élève. [...]
[...] La différenciation pédagogique est la norme en Angleterre. Etudes PACE et STEP : Ces deux études ont été réalisées au début des années 1990, soit peu de temps après d'importantes réformes dans le domaine de l'éducation. En Angleterre, la loi de réforme de l'éducation de 1988 instaure des programmes nationaux, des évaluations nationales à et 14 ans ainsi que la définition d'objectifs explicites de compétences à satisfaire par les élèves. En France, la loi d'Orientation sur l'Education de 1989 prévoit le développement du travail en commun et l'introduction de différenciation dans la pédagogie. [...]
[...] La construction identitaire En France, le souci de ménager une sphère intime existe dans les deux pays mais plus marqué en France. L'arrivée dans le monde enseignant est déstabilisante du fait de coupure avec le monde académique. Un concours d'enseignement sanctionne surtout des compétences disciplinaires. L'activité des enseignants est centrée sur la transmission des connaissances. La première phase d'enseignement est qualifiée de survie : les néo-enseignants éprouvent le besoin d'un soutien technique et moral. Leurs pratiques se transforment à travers des épreuves professionnelles qui ne sont pas énoncées dans son statut. [...]
[...] En Angleterre, l'injonction est totale et cadrée, elle recouvre l'ensemble de l'activité des enseignants. Comment ces injonctions sont-elles appropriées dans chaque modèle professionnel ? En France, le collectif bouleverse la norme professionnelle (le métier d'enseignant est traditionnellement un métier scolaire). Le collectif est valorisé, mais sur des bases informelles et électives, tout particulièrement dans la salle des professeurs. Du fait de la division des tâches pédagogiques et administratives, l'activité enseignante est avant tout marquée par l'autonomie pédagogique et la centration sur le travail en classe. [...]
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