Aujourd'hui, de nombreux artistes stigmatisent les caractéristiques des groupes qualifiés de « sectaires » afin de dénoncer leur emprise sur la société moderne. On peut penser aux Simpson avec la secte des Mouvementariens promettant à ses adhérents de les emmener à bord de leur soucoupe volante vers un paradis cosmique, aux Inconnus avec leur gourou Skippy, un moine tibétain à l'accent marseillais, ou à Caméra Café mettant en scène Dargamel, fondateur de l'association du Temple de l'Etoile de Téranis, qui collecte des fonds pour les enfants victimes de famine après l'invasion de sauterelles stellaires qui auraient ravagé les récoltes de maïs transgénique de la planète.
De même, dans un registre tout autre, à partir des années 1970, des tragédies marquent l'opinion publique internationale et relancent les débats autour du phénomène. On peut penser aux 900 membres de la secte du Temple du Peuple qui se suicident collectivement en Guyane britannique en 1978. Les 16 corps d'adeptes de l'Ordre du Temple Solaire retrouvés calcinés en Isère en 1995 éveillent également l'inquiétude des Français face à la dangerosité du phénomène. La rencontre, en août 2004, entre Tom Cruise, acteur représentant la Scientologie, et Nicolas Sarkozy, alors ministre des Finances, ou la déclaration ambiguë d'Emmanuelle Mignon, directrice de cabinet de Sarkozy, qualifiant en février les sectes de « non-problème » en France, déclenchent d'ailleurs les polémiques.
Cependant, comme l'affirme Odon Vallet, docteur en science des religions, il n'existe « aucune définition, ni juridique, ni théologique des sectes », ce qui est au cœur du problème politique actuel. On pourrait tenter de définir ce terme de façon objective comme une « communauté spirituelle dont les membres obéissent à un maître à penser et vivent en communauté, en observant des rites et des règles de vie particuliers et contraignants ». Cependant, Kant définissant un « phénomène » comme un « objet tel qu'il nous apparaît », avec ainsi l'idée de définition subjective, et l'adjectif « sectaire » détenant une connotation péjorative, le « phénomène sectaire » renvoie aux dérives auxquelles il semble associé. Cela nous rappelle alors la définition proposée par le rapport parlementaire français de 1996 qui déclare que les sectes sont des « groupes visant par des manœuvres de déstabilisation psychologique, à obtenir de leurs adeptes, une allégeance inconditionnelle, une diminution de l'esprit critique, une rupture avec les références communément admises, et entraînant des dangers pour les libertés individuelles, la santé, l'éducation, les institutions démocratiques ».
Toutefois, le terme « phénomène » peut également être perçu comme un « fait extraordinaire, exceptionnel, surprenant ». Cela renvoie alors à l'essor de cette nouvelle religiosité qui apparaît avec la modernité et qu'on avait associée la semaine dernière au concept de sécularisation. Ainsi, en quoi ce phénomène a-t-il été profondément réactualisé dans la seconde moitié du XXe siècle attisant l'inquiétude des populations et des Etats à son égard ? Les polémiques qui l'accompagnent autorisent-elles alors les autorités publiques à l'encadrer ? Tout d'abord, on verra que ce phénomène ambigu interagit de manière complexe avec la modernité. Puis, on tentera de comprendre les dangers que ces sectes et leurs dérives représentent pour les individus et les sociétés modernes ainsi que les difficultés qu'ont les Etats à savoir comment réagir.
[...] De plus, l'Etat protecteur moderne se doit de garantir le droit à la propriété. Or, certaines pratiques des sectes apparaissent bien souvent comme des pratiques d'escrocs susceptibles d'être punies. En effet, la secte du Rétablissement des dix commandements de Dieu a poussé ses membres à l'immolation en mars 2000 mais le gourou avait d'abord suggéré à ses adeptes d'abandonner leurs biens, inutiles dans l'au- delà apocalyptique, biens qu'il a emportés dans sa fuite, évidemment. On a donc une confrontation entre l'autorité charismatique du leader et celle de l'Etat qui ne peut rester neutre face à ce phénomène. [...]
[...] in Raison présente, - CHAMPION (Françoise), COHEN (Martine), Sectes et démocratie, Paris, Le Seuil - LUCA (Nathalie), Les sectes, Paris, PUF - Sectes and the City in Libération avril 2008 DALET (Pierre), La polysémie du terme secte et son usage dans l'histoire de la philosophie aux XVIIe et XVIIIe siècles JAFFRELOT (Christophe), Les nationalismes hindous LEVI-STRAUSS (Claude), Anthropologie structurale deux CATONNE (Philippe), Les sectes ; suffit-il de les connaître ? [...]
[...] Cela nous rappelle alors la définition proposée par le rapport parlementaire français de 1996 qui déclare que les sectes sont des groupes visant par des manœuvres de déstabilisation psychologique, à obtenir de leurs adeptes, une allégeance inconditionnelle, une diminution de l'esprit critique, une rupture avec les références communément admises, et entraînant des dangers pour les libertés individuelles, la santé, l'éducation, les institutions démocratiques Toutefois, le terme phénomène peut également être perçu comme un fait extraordinaire, exceptionnel, surprenant Cela renvoie alors à l'essor de cette nouvelle religiosité qui apparaît avec la modernité et qu'on avait associée la semaine dernière au concept de sécularisation. Ainsi, en quoi ce phénomène a-t-il été profondément réactualisé dans la seconde moitié du XXe siècle attisant l'inquiétude des populations et des Etats à son égard ? Les polémiques qui l'accompagnent autorisent-elles alors les autorités publiques à l'encadrer ? Tout d'abord, on verra que ce phénomène ambigu interagit de manière complexe avec la modernité. [...]
[...] Les sectes vont alors protester pour obtenir cette reconnaissance par l'Etat. Cela renvoie au combat de l'Eglise de la Scientologie mené aux Etats-Unis puis dans le reste du monde où elle est de plus en plus reconnue comme religion comme en Russie depuis octobre 2007 ou en Espagne depuis janvier 2008. Ce débat renvoie également à la définition d'Ernest Renan affirmant que l'Eglise est une secte qui a réussi Les liens qui peuvent être faits entre l'Eglise et ses dérives et les sectes en ce qui concerne l'ésotérisme ou encore le refus du monde par exemple plaideraient également en faveur de cette reconnaissance des sectes. [...]
[...] Cependant, les polémiques que suscite actuellement le phénomène sectaire s'avèrent désormais liées à la manipulation des adeptes, à leur instrumentalisation au service des fins de l'organisation. Cela amène ainsi Louis Hourmant à affirmer que l'on est passé d'une problématique d'excès de religiosité à celle du défaut de substance religieuse. Anne Fournier et Michel Monroy définissent alors la dérive sectaire comme la construction d'une allégeance inconditionnelle au sein d'un isolat culturel autoréférent, à caractère expansif dans les différents domaines de la vie individuelle et sociale L' isolat culturel doit être compris comme une structure autocratique et autoritaire conduite par un gourou, l' autoréférence comme l'exigence d'une référence exclusive à la vision du monde du gourou et le caractère expansif comme l'obligation faite aux adeptes de rompre avec tous qui est identifié au monde extérieur diabolisé par opposition au monde clos et purifié de la secte. [...]
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