La colonisation et la décolonisation, l'industrialisation et le développement des technologies de communication complexifient les échanges économiques et participent au décloisonnement des mondes de moins en moins distants.
Parallèlement, des vagues d'immigration ou d'émigration, selon que le pays d'origine profitait ou subissait ces mouvements d'échange, ont transformé en moins d'un siècle la composition des populations nationales obligeant chacun à cohabiter avec l'autre venu d'ailleurs.
Religions et cultures différentes, approche de l'histoire commune propre à chacun, rites, symboles et traditions méconnus, flux économiques...ce télescopage d'influences multiplie les occasions de tensions et de frictions.
[...] Islam un bloc global et figé? L'islam s'est construit sur une histoire de quatorze siècles. Elle est la religion majoritaire d'une soixantaine de pays et compte un milliard deux cent millions d'individus à travers le monde. Les musulmans y vivent de manières différentes dans des cultures différentes. Les regrouper dans un même ensemble est un non-sens. Un musulman du Brésil et un autre d'Indonésie se sentent d'abord attachés à leur identité nationale et ensuite à leur identité religieuse. La guerre des civilisations est une conception dangereuse qui ne reflète pas la réalité mais qui la fait correspondre aux schémas de pensées de certains extrémistes: à la fois celle de Ben Laden qui veut faire une croisade contre les infidèles et celles des néoconservateurs étasuniens qui affirment que le danger et l'ennemi c'est l'Islam. [...]
[...] Al Qaida est une menace mais elle relève plus du domaine policier que du géopolitique. Il n'y a pas de comparaison justifiée entre les intégristes musulmans et le communisme russe, le pouvoir financier et militaire est sans commune mesure et ne touche pas la même masse de population. Alors d'où vient cette peur ? Problème de langage: Musulman, islamiste, islam ont eu le même sens jusqu'au XIXe s., puis l'islamisme est devenu progressivement le nom correspondant à des mouvances plus politiques créant un amalgame avec le mot islam. [...]
[...] Le catholicisme était alors anti-républicain, anti-laïque et royaliste et l'on craignait un risque de guerre civile. Pour cela, le gouvernement avait mis en place des dispositions transitoires visant à assurer que la gestion des lieux de culte catholique soit laissée provisoirement aux prêtres qui en avaient la charge. C'est seulement en 1924 que le pape Pie XI, dans l'encyclique Maximam gravissimamque, autorisera la formation d'associations cultuelles. Et il faudra encore plus de vingt ans pour que l'Église se rallie à la laïcité. [...]
[...] A l'époque de ces derniers, les grandes usines, la sidérurgie, les syndicats plus puissants et plus représentatifs, participaient à l'unification d'une classe ouvrière. L'intégration passait par le travail, on était ouvrier, sidérurgiste, mineur avant d'être marocain, algérien ou musulman, le groupe d'appartenance était plus englobant, plus intégrant, et donc moins fragmenté. Et puis la crise est arrivée et de nombreux facteurs se sont conjugués: le chômage a augmenté, la classe politique s'est déresponsabilisée et les grandes entreprises sont parvenues à s'assurer plus de pouvoirs de négociation en complexifiant et en individualisant leur politique managériale. [...]
[...] Dans le discours de Marine Le Pen, le musulman a aussi remplacé l'immigré. Deux raisons expliquent ce choix de communication: d'une part, il s'agit, en mettant en avant la défense de la laïcité, de ne plus donner prise aux accusations de racisme. D'autre part, la dénonciation de "l'islamisation" des sociétés européennes est une sorte de martingale pour les extrêmes droites et droites populistes depuis le 11 Septembre. La Ligue du Nord, le Vlaams Belang, le parti de Geert Wilders, l'UDC en Suisse, ont tous enfourché ce cheval de bataille, qui s'avère relativement payant électoralement. [...]
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