Face à la diversité religieuse du Liban, quel rapport individuel et collectif se tisse avec l'État ?

Thèmes abordés

Liban, religion, identité nationale, diversité religieuse, crise identitaire, Beyrouth

Résumé du document

Le Liban, pays niché au coeur du Moyen-Orient entre la Syrie et Israël, se distingue par sa richesse culturelle et religieuse. En effet, caractérisé par un pluralisme confessionnel, lié tant à son histoire qu'à sa situation géographique, le Liban est une mosaïque confessionnelle au sein de laquelle l'État reconnaît officiellement 18 communautés religieuses.
Au croisement de l'Histoire millénaire et des dynamiques contemporaines, le Liban incarne dès lors « un laboratoire unique, un modèle unique en son genre » selon Michel Younès, maître de conférences en théologie à l'Institut catholique de Lyon, où la diversité religieuse et l'identité nationale se rencontrent, s'entremêlent, mais parfois aussi se heurtent.

Extraits

[...] Pour l'historien Edmond Rabbath « il s'agit de l'engagement pris par le musulman et le chrétien de construire un Liban libre et indépendant, patrie commune de tous ses habitants ». C'est en septembre et octobre 1943, lors des discours d'investiture de Béchara el-Khoury, puis de Riad el-Solh qu'ils annoncent les divers éléments du Pacte qui seront approuvés par les députés. Ainsi, tous les Libanais, quelle que soit leur communauté ou leur religion, sont égaux devant la Constitution et la loi. Ils sont égaux entre eux. Le Liban reposant sur une multitude de confessions, ne doit en exclure aucune. [...]

[...] Pour lui, la recherche géographique ne fait que produire de simples inventaires d'identités sans aller au-delà de la religion et omet d'observer les pratiques courantes et communes des Libanais qui ne se définissent pas selon leur religion mais comme appartenant à la nation libanaise. Il y a également cette idée d'unicité de la capitale qui passe par la toponymie des noms de rues, symbole de la diversité des religions. Jacques Keilo (enseignant chercheur français) à travers une étude des cartes de la ville de Beyrouth va rechercher des toponymes (des noms de lieux) renvoyant à l'histoire des religions qui se sont installées dans l'espace urbain de la ville. [...]

[...] L'exclusion du sunnite est endémique au Liban et cette situation favorise un certain embrasement du pays. De même que des villes extrêmement pauvres comme Tripoli regroupant en majorité des musulmans sunnites peuvent être embrigadés par la propagande jihadiste du Hezbollah. Cette situation est donc propice à l'exacerbation des conflits confessionnels en utilisant ce peuple opprimé comme une bombe à retardement. Aujourd'hui le temps des particularismes confessionnels semble se rompre, visant à ce que les chrétiens ne cèdent pas à la pression du Hezbollah, que les sunnites adoptent un discours commun en affirmant leur appartenance à un Liban unit afin de rassurer les autres communautés confessionnelles « quant à leur statut de citoyens libanais et non de citoyens d'une religion ». [...]

[...] ) de leur devoir de reconnaître l'indépendance du Liban. » De ces deux acteurs va naître le pacte national, à savoir un accord non public signé en 1943. Il est décrit comme la charte constitutive du Liban, et il est signé par Bechara-el-Khouri un chrétien maronite, qui devient Président de la République et Riad-el-Solh musulman sunnite, qui devient Premier ministre. Cet accord permet en 1943 au Liban d'obtenir son indépendance après des années de domination étrangère, et va faire émerger la nation libanaise, unie dans cette diversité religieuse. [...]

[...] On observe que le lieu et l'espace ne sont jamais neutres au centre culturel et cristallisent tous les 2 des id et des mythes fondateurs créant des identités variées et mettant à mal une identité nationale commune. Mosaïque de religions : pilier ou obstacle à l'identité nationale ? Mais, bien qu'enrichissante car générant un multiculturalisme, cette diversité religieuse fragmente également et empêche une réelle identité nationale de naître. Car avant d'être des citoyens libanais, les habitants du Liban sont d'abord chrétiens - chiites - sunnite. Dès lors, la difficulté pour ses diverses composantes, communautés religieuses et groupes confessionnels et de se mettre d'accord sur une définition de son identité. [...]