De plus en plus de personnes, aujourd'hui, veulent appartenir à la vie dite consacrée et cherchent à justifier leur droit à une consécration. Mais de quoi parle-t-on au juste ? La lecture des documents sur la vie consacrée émanant du Magistère ou de la Congrégation pour les Instituts de Vie consacrée et les Sociétés de Vie apostolique, permet de comprendre en partie le flou qui entoure ce secteur de la vie ecclésiale : l'histoire y est laissée totalement de côté et les concepts semblent remodelés à loisir au gré des nécessités pastorales. Que veulent donc dire les termes « consécration » et « vie consacrée » si facilement employés ? La théologie historique pourra nous permettre de répondre à la question.
Le Pseudo-Denys peut être considéré comme le chef de file, lorsqu'on se demande quand a commencé à apparaître une réflexion théologique sur la consécration entendue comme consécration particulière. Il réfléchit, dans la Hiérarchie ecclésiastique, sur la consécration monastique. À ses yeux, elle établit la vie monastique au-dessus de la vie baptismale, mais cependant au-dessous de la consécration sacerdotale.
[...] C'est en effet dans ce courant spirituel que la consécration est explicitement apparue avec le caractère d'un don total et radical de soi rattaché à la consécration baptismale8. C'est pourquoi, dans le rituel de la profession dominicaine, pour rester fidèle à sa tradition, le rédacteur a placé la bénédiction solennelle ou consécration en appendice : en effet, la profession solennelle a par elle-même une dimension consécratoire, rappelée par une oraison qui suit la profession : Fratres carissimi, per hanc professionem sollemnem vosmetipsos tradidistis Deo ejusque voluntati : Deus igitur per ministerium Ecclesiae sibi ipse vos consecravit.10 À cause de ce caractère consécratoire de la profession, celle-ci continue donc à être appelée solennelle et pas seulement perpétuelle, comme le fait le rituel romain. [...]
[...] Mais elle permet de rendre évident ce qu'on veut démontrer. Ce procédé a d'ailleurs des antécédents dans l'Église : pour amener les chanoines à mener la vie commune, on n'a pas hésité, au moyen âge, à fabriquer de fausses décrétales ; cela a permis de les engager à entrer dans la réforme mise en place, au nom de la fidélité à leurs origines ! Et, plus près de nous, LG 43 n'hésite pas à dire que les conseils évangéliques ont été encouragés par les Pères de l'Église : or ceux-ci ne les connaissaient pas ! [...]
[...] Une formation à la réalité de la vie consacrée a été demandée dans les séminaires, mais avant qu'elle produise du fruit, il faudra peut-être plusieurs générations. La confusion existe d'ailleurs aussi chez les consacrés »21. Une confusion générale s'est établie, sans dialogue possible, tout au moins pour l'instant : chacun est maître chez lui. S'il est possible d'émettre un souhait pour les années qui viennent, ce serait de voir se réaliser un travail commun entre évêques, prêtres, consacrés au sens canonique du terme et membres des associations de fidèles qui réclament une appartenance à la vie consacrée, pour clarifier les choses. [...]
[...] Mais la distance est grande entre le rôle d'un abbé bénédictin et celui d'un prieur dominicain, par exemple Les bénédictins ne sont pas des religieux au sens strict : ils ne font pas profession des trois conseils évangéliques cette expression. Mais rien n'est dit sur le contenu de la consécration qui les affecte. D'où la tentation de généraliser pour tous la théologie de la consécration de saint Thomas, sans se rendre compte qu'elle comporte des exigences très précises propres aux vœux solennels. L'expression vie consacrée laissait la porte ouverte pour d'éventuelles formes nouvelles de vie consacrée, que l'autorité hiérarchique devait discerner. Mais il n'y a pas eu de discernement, faute d'une connaissance du droit et de la tradition. [...]
[...] Une vie consacrée au regard de l'histoire LA VIE CONSACRÉE AU REGARD DE L'HISTOIRE Sœur Marie-Ancilla, o.p. De1 plus en plus de personnes, aujourd'hui, veulent appartenir à la vie dite consacrée et cherchent à justifier leur droit à une consécration. Mais de quoi parle-t-on au juste ? La lecture des documents sur la vie consacrée émanant du Magistère ou de la Congrégation pour les Instituts de Vie consacrée et les Sociétés de Vie apostolique, permet de comprendre en partie le flou qui entoure ce secteur de la vie ecclésiale : l'histoire y est laissée totalement de côté et les concepts semblent remodelés à loisir au gré des nécessités pastorales. [...]
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