Le langage utilisé par les sujets borderline est produit au cours d'états émotionnels pathologiques particuliers. Le vécu d'un TPB est marqué par un état douloureux à la fois somatique, psychique et relationnel. Dans son vécu intérieur le borderline perçoit un sentiment intense de vide et d'ennui. Des questions identitaires, une vision négative de soi-même s'imposent à lui.
Kernberg (1970) décrit de façon saisissante l'univers mental des patients limite : "Leur monde est peuplé de représentations caricaturales des aspects bons et horribles des êtres qui ont comptés pour eux… De la même manière, leur perception d'eux-mêmes est un mélange chaotique d'images honteuses, menaçantes ou exaltées".
Ces quelques lignes illustrent l'état émotionnel particulier du TPB, état caractérisé par une labilité, un changement des perceptions, des représentations et des contenus de pensée. Nous allons tenter, dans ce travail, d'évaluer comment ces modifications de représentations de pensée se reflètent au niveau du discours. Afin d'opérer cette confrontation clinico-discursive nous ferons appel à un paradigme qui postule l'existence d'un lien entre les processus de régulation de la pensée et les processus de régulation du discours (Chomsky 1970, Jakobson 1976, Ghiglione 1986).
[...] Le trouble de personnalité borderline 1.1 Présentation sémiologique La notion même de personnalité n'entraîne pas de consensus. Nous retenons la définition proposée par Cottraux et Blackburn (2001) pour lesquels la personnalité est "l'intégration stable et individualisée d'un ensemble de comportements, d'émotions et de cognitions. Elle correspond aux modes de réactions émotives, cognitives et comportementales à l'environnement qui caractérisent chaque individu" Le DSM-IV précise que ce n'est que "lorsqu'ils sont rigides et inadaptés et qu'ils sont la cause d'une altération fonctionnelle ou d'une détresse subjective importante que des traits constituent un trouble de la personnalité" Parmi les critères d'ensemble permettant de distinguer les personnalités normales des personnalités pathologiques, on retiendra notamment que les troubles de personnalité ne doivent pas résulter d'un état de dépendance, que le pattern est stable et peut être retracé depuis l'adolescence ou le début de l'âge adulte, ou bien encore qu'ils ne doivent pas résulter d'un autre trouble psychiatrique. [...]
[...] C'est sur la base de cette demande que se sont construites les séances. Nous avons ainsi appliqué les techniques habituellement mises en œuvre dans les groupes d'affirmation de soi "standards" aux problème concrets rencontrés par les patients dans leur quotidien. Les diverses techniques ont été présenté auparavant, cependant nous pensons qu'il est nécessaire de pointer quelques une d'entre elles paraissant plus impliquées dans l'évolution des compétences sociales, de l'estime de soi et de la dépression. En effet, nous pouvons supposer que l'optimisation des ces variables peut être mise en lien avec les techniques acquises et mises en pratique lors des séances groupales d'affirmation de soi. [...]
[...] Le trouble se manifestera alors à l'âge adulte à travers des conduites jugées négatives pour sa socialisation. Les activités communicationnelles sont un support social sur lequel l'individu s'appuie pour réguler ses tensions affectives, pour réaliser un partage empathique. C'est dans sa relation à l'autre que l'individu fait l'expérience de la singularité de son identité. Chez les borderlines où la problématique identitaire est majeure, les sujets recherchent perpétuellement le support de l'autre pour faire l'expérience de leur identité. Le mode de communication devient pathologique chez eux, car l'absence de l'autre et l'incompréhension ressentie lors des interactions les placent dans une position d'échec intolérable. [...]
[...] Le langage serait à la fois le produit d'une activité socio-cognitive et la construction d'une réalité interlocutoire. Ces différents éléments nous montrent combien le langage ne peut être compris qu'en tenant compte de ses conditions de production. La nature même de l'entretien va induire, selon le contrat tacitement passé, des attitudes, des positions différentes qui influencent les interprétations de chaque participant et l'interprétation également du chercheur et/ou du thérapeute qui sera amené à analyser ces entretiens. Ainsi, il est essentiel, dans la présentation de caractéristiques langagières repérées chez des individus, de les rapporter à leur contexte d'énonciation. [...]
[...] Ainsi, on peut imaginer, chez ce patient, l'impact de relations interpersonnelles insuffisantes et insatisfaisantes sur son estime de soi. Notre observation clinique lors des jeux de rôles nous semble confirmer cette déduction. En effet, Mr. P. a rapporté un discours de souffrance en lien avec une communication inadéquate avec son entourage familial qui engendre chez lui un sentiment d'abandon, de rejet et de solitude, accentuant encore ses difficultés relationnelles. Nous avons par ailleurs observé qu'il expliquait cet échec relationnel par la valeur négative qu'il s'attribuait. [...]
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