Le sujet de ce mémoire porte sur la schizophrénie et plus particulièrement sur la dissociation de la pensée. Ce trouble, pathognomonique et déficitaire, souvent rencontré lors des stages de la formation d'ergothérapie, a suscité chez moi plusieurs questions, notamment sur l'apport de l'ergothérapie. Etant donné l'impact sur l'élaboration d'une pensée cohérente et organisée, indispensable à l'autonomie psychique, et le risque d'une déficience irréversible, une recherche relative à ce trouble me semblait essentielle pour améliorer et enrichir ma pratique de l'ergothérapie. Une première approche sur la schizophrénie a confirmé que la principale conséquence du syndrome dissociatif était la perte des liens dans les différents domaines touchés. Ces réflexions m'ont amené à poser ma problématique qui est la suivante : l'ergothérapie peut-elle favoriser le rétablissement de liens dans les processus de pensée du sujet dissocié ?
L'étude psychanalytique de la schizophrénie a mis en évidence que celle-ci était due à une régression à un stade non résolu du développement psychique, durant lequel seuls les mécanismes de défense de type archaïque, tel que le clivage, sont accessibles. Cette période relative aux tous premiers mois de la vie est très angoissante pour l'enfant ; jusqu'alors en fusion avec sa mère, il doit subitement se détacher d'elle et faire face aux obstacles de la réalité extérieure. Provoquant chez lui des angoisses d'anéantissement, son Moi tentera de les surmonter par l'utilisation du clivage. Cette attaque contre la réalité extérieure entraîne une attaque des processus de pensée qui s'établissent au contact de celle-ci. L'étude sur le développement de la pensée montre que cette période est dépassée avec l'aide de la mère qui, grâce à son attitude suscitant la contenance et la sécurité, contribue à la création d'un « environnement suffisamment bon » limitant le clivage. Elle aide ainsi son enfant à entrer en relation avec la réalité extérieure et à développer des processus de pensée. Dans ce sens, j'émets l'hypothèse que le cadre, de part le dispositif et l'attitude thérapeutiques, crée un environnement suffisamment bon, qui permet la diminution du clivage et le rétablissement de liens dans les processus de pensée.
L'étude sur l'ergothérapie, basée sur les concepts de Winnicott, psychanalyste anglais, montre que le contact avec la réalité extérieure ne peut s'établir qu'au travers d'un objet transitionnel ; symbolisant la mère – figurante du monde extérieure – et appartenant à l'enfant, il permet une continuité entre sa réalité interne et la réalité externe. La médiation, intermédiaire entre le thérapeute et le patient, pourrait-elle alors jouer le rôle d'objet transitionnel ? Par ailleurs, faisant elle-même partie du monde extérieur, elle confronte le patient au principe de réalité qui est à l'origine du développement des processus de pensée. J'en déduis alors que la médiation permet à l'ergothérapeute d'aider le patient à rétablir des liens dans ses processus de pensée.
Grâce à l'apport de la mère, établi de manière consciente et donc perceptif à l'enfant, la relation avec la réalité externe est facilitée. Dès lors, je suppose que la mise en lien à un niveau conscient permet d'amener le patient à accepter la réalité extérieure, et ainsi diminuer l'utilisation du clivage.
[...] La théorie psychanalytique émet l'hypothèse que les pathologies psychiatriques trouvent leur origine au cours du développement psychique. Dans le cas de la schizophrénie, des points de fixation entre la position schizo-paranoïde et dépressive, pourraient engendrer, au cours de la vie, une régression à cette période, provoquant, ainsi, la décompensation vers cette pathologie. Le passage entre ces deux positions se caractérise par l'accès à l'ambivalence, et par là, à la distinction entre le dedans et le dehors, les réalités interne et externe et entre soi et la mère. [...]
[...] Dictionnaire international de la psychanalyse., Défense (mécanisme de) p427. Ibid. La mise en place des processus de pensée sera expliquée dans la seconde partie du cadre théorique concernant la pensée. SEGAL H., Introduction à l'œuvre de Mélanie Klein, p18. Une première définition va être apportée concernant le clivage qui sera complétée par la suite dans une partie traitant uniquement ce sujet. Selon le dictionnaire international de la psychanalyse : action menée par le Moi d'expulser hors de lui des expériences intolérables en se clivant lui-même et en projetant ces parties clivées dans les objets extérieurs. [...]
[...] Kaes définit le cadre comme à la fois matériel et maternel, il a un contenu passif : le dispositif thérapeutique, et un contenu actif : l'attitude de l'ergothérapeute. Le cadre est pour Bleger l'organisation la plus primitive et la moins différenciée de la personnalité. Il permet au Moi, tout comme la mère suffisamment bonne, de se développer et de se constituer. Par sa caractéristique d'invariant, il a un effet méta- comportement Il est le dépositaire des parties psychotiques et symbiotiques. [...]
[...] Il a cependant aussi des relations intimes avec le Ca. Tous deux peuvent parfois se liguer contre le Moi. Par conséquent, le Moi est le médiateur entre les revendications du Ca, les impératifs du Surmoi et les exigences de la réalité. Il essaie de maintenir un fonctionnement idéal de l'appareil psychique. En cas de conflit intrapsychique, il met en jeu, de manière inconsciente, des mécanismes de défense Les mécanismes de défense Processus psychiques gérés par le Moi, ils ont pour fonction de maintenir des conditions psychiques optimales et d'aider le Moi à affronter et éviter les angoisses. [...]
[...] Ceci va lui permettre d'accéder à l'ambivalence, l'objet peut être à la fois bon et mauvais. Les processus d'introjection vont augmenter, car l'enfant prendra conscience de sa dépendance envers sa mère, autonome et susceptible de s'en aller. Par conséquent, il aura besoin de la conserver au-dedans. L'enfant va vouloir protéger sa mère de ses propres pulsions destructrices. Cette position dépressive commence dans la phase orale du développement, période pendant laquelle l'amour et le besoin conduisent à la dévoration[28] L'enfant sera persuadé d'avoir détruit sa mère au travers de cet acte de dévoration. [...]
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