Green propose d'envisager la mère morte, non en tant que fait réel, une mère décédée, mais en tant que la mère morte peut être une imago construite chez l'enfant à la suite d'une dépression de sa mère, « transformant brutalement l'objet vivant, source de vitalité de l'enfant, en figure lointaine, atone, quasi inanimée », imago pesant sur l'avenir libidinal de l'enfant.
Les analysants qui amènent cette problématique ne présentent pas d'emblée des traits dépressifs, mais en revanche la nature des conflits évoqués (avec des conséquences importantes sur la vie professionnelle et amoureuse) est narcissique.
Green s'appuie sur Freud, K. Abraham, M. Klein, Winnicott, Kohut, Abraham et Torok, Rosolato. Il note que deux idées sont communément admises par la communauté psychanalytique : la perte de l'objet comme structuration du psychisme humain et la position dépressive comme événement du développement qui permet au patient de déprimer périodiquement sans développer des traits dépressifs persistants. Green s'atèle à étudier les rapports entre perte d'objet, position dépressive et configuration dépressive (centre autour duquel se développent des processus).
[...] En fait, le partage du désir est impossible, il faut donc miser sur l'autonomie : la solitude devient positive, ainsi la mère n'a pas de concurrent et laisse son enfant tranquille. Ces individus peuvent aborder L'Œdipe, ils peuvent dépasser pour un temps l'amour gelé de la mère morte, mais ce noyau gelé les rattrape : leur vie professionnelle, amoureuse, devient décevante et entraîne par exemple un défaut de communication affective. En revanche, la fonction parentale reste très investie, généralement sur un mode narcissique. [...]
[...] Le père est là dès l'origine. Green suppose donc un lien entre la perte métaphorique du sein, la mutation symbolique des rapports entre plaisir et réalité ( la prohibition de l'inceste et la double figuration des images de la mère et du père, potentiellement réunis, dans le fantasme d'une scène primitive hypothétique et conçue en dehors du sujet, et où le sujet s'absente et se constitue dans l'absence de la représentation affective qui donne naissance au fantasme, production de la folie du sujet Si l'on considère l'angoisse de la perte du sein chez Freud, on en trouve deux versions : l'une théorique dans la Négation (1925), et l'une plus descriptive dans l'Abrégé (1938). [...]
[...] La mère a donc un changement brusque d'attitude envers son enfant, sans que l'enfant puisse comprendre les raisons de ce changement. Il en découle un changement de l'imago de la mère. L'enfant s'est senti aimé mais il a perdu cet amour de la mère, et qui vit ce changement comme une catastrophe un traumatisme narcissique une désillusion anticipée une perte de sens dont il résulte la constitution d'une sorte de noyau froid, certes dépassé ensuite, mais qui laisse son empreinte dans les relations amoureuses du patient. [...]
[...] Ainsi, il y a une réactualisation de la perte de l'omnipotence narcissique, et une infirmité libidinale. Ceci peut avoir plusieurs conséquences : 1 / Persécution par le fantasme + haine secondaire, au détriment du sujet / Interprétation classique de la scène comme sadique où le père est violent et la mère en souffrance / Autre interprétation : mère jouit mais devient cruelle, hypocrite, monstrueuse 4 / Identification alternative du sujet : à la mère morte (sado maso) ou au père (agresseur ou réparateur) / Délibidinalisation de la scène au profit intellectualisation ou création artistique / Négation du fantasme pour équivaloir au vide de la mère morte. [...]
[...] Green parle d'une actualisation projective pour pallier la blessure narcissique. Le sujet projette le complexe de la mère morte sur la scène primitive, le met en scène. Mais, de cette façon, il y a une reviviscence du complexe de la mère morte, une répétition traumatique. Qu'en est-il de ce fantasme ? Il s'en dégage l'impression d'une distance infranchissable entre la mère et le sujet, ainsi qu'une impuissance à réveiller la mère morte. Le rival n'est plus l'objet du deuil, mais le tiers qui redonne la vie à la mère. [...]
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