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Le témoignage écrit des médecins du champ de bataille de la Première Guerre mondiale apparaît comme une forme marginale du discours médical. En effet, on ne compte qu'une vingtaine d'écrits de ce type sur plus de 15.000 médecins engagés dans le Service de santé entre 1914 et 1918.
La règle générale est donc ici le mutisme. Pourtant ce sont eux, ceux de l'avant, qui partageaient l'intimité acquise par le monde combattant de la brutalité nouvelle de la guerre. Ce sont eux également qui se trouvaient confrontés à la violence nouvelle faite aux corps des combattants et aux corps des morts sur le champ de bataille.
Les témoignages révèlent l'impact du choc psychologique de la déshumanisation des corps par la guerre moderne, et aussi l'impréparation des médecins à de telles confrontations.
[...] Il est plus probable que par le témoignage, le médecin s'emploie à lutter et à modifier son rapport au trauma, par une mise à distance. En même temps, l'acte traumatographique que constitue le “témoignage” médical nécessite un travail de mémoire pour tenter de rendre compte de l'indicible : la déshumanisation, la décomposition, l'animalisation des corps par la brutalisation du combat dans la Première Guerre mondiale. Marguerite Duras, Ecrire, Paris, Gallimard p., p.28. Arnaud Tellier, Expériences traumatiques et écriture, Paris, Anthropos p., p.45-89. [...]
[...] Le témoignage des médecins du front : Une écriture du trauma ? Le témoignage écrit des médecins du champ de bataille de la Première Guerre mondiale apparaît comme une forme marginale du discours médical. En effet, on ne compte qu'une vingtaine d'écrits de ce type sur plus de 15.000 médecins engagés dans le Service de santé entre 1914 et 1918. La règle générale est donc ici le mutisme. Pourtant ce sont eux, ceux de l'avant, qui partageaient l'intimité acquise par le monde combattant de la brutalité nouvelle de la guerre. [...]
[...] Je vois des morts qui n'ont plus de visage. J'en vois qui me regardent et je les reconnais admet Pasteur Vallery Radot. Cette quiétude inscrite sur les visages offre un contraste saisissant avec les restes des corps éparpillés au hasard : Sur beaucoup on ne voyait nulle trace apparente de blessure. Quelques-uns présentaient des plaies profondes, anfranctueuses, déchiquetées, sanglantes, hideuses, le cerveau découvert, les intestins jaillis hors du ventre, étalés, souillés de terre et d'herbe, les membres broyés note Barras. [...]
[...] C'est hurler sans bruit que le trauma semble échapper ici à ce qui peut être dit, raconté, mis en récit. Le trait majeur de la traumatographie réside finalement dans la transposition du vécu à l'écrit. La souffrance doit s'écrire puisqu'elle ne peut se dire afin de permettre une distanciation. L'écrit éloignerait en quelque sorte le médecin-témoin du point de douleur traumatique. I Voir Le premier élément constitutif du trauma dans le témoignage médical est déterminé par la vision même des corps. C'est en effet à partir de l'expérience visuelle que s'articule la description, c'est l'acte premier du témoignage. [...]
[...] Il s'agit surtout dans ce cas de dont les corps et les odeurs se trouvent mêlés à celui des hommes. Plusieurs témoins insistent sur ce versant olfactif dont Tulasne écrit notamment dans une séquence : “Nous traversons le champ de bataille de Féré. Champenoise, la route est semée de cadavres de chevaux raidis et gonflés ; dans le fossé, au milieu des champs, des soldats sont couchés immobiles dans la mort. ( . ) Ajoutez à cela une odeur pestilentielle et vous aurez l'horrible vision du champ de bataille”. [...]
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