Freud lui-même était convaincu que ses théories ne seraient pas facilement acceptées, dans la mesure où elles heurtent la conception traditionnelle de l'homme, et surtout de la maîtrise qu'il doit affirmer sur lui-même, tant dans sa vie ordinaire que dans ses comportements plus spécifiquement moraux. En affirmant l'existence, dans l'appareil psychique, d'un inconscient déterminant la majeure partie des conduites, les théories freudiennes ne se contentent pas d'amoindrir la portée classique de la conscience, comme faculté de connaissance de soi et d'autocontrôle ; elle semble mettre en cause également la possibilité de la morale : si mon inconscient me dirige, à quoi bon pratiquer mon « examen de conscience » ? Pour refuser de telles difficultés, le plus simple ne serait-il pas d'affirmer que la notion d'inconscient psychique est elle-même contradictoire ? Il en résulterait qu'elle ne mérite pas d'être sérieusement considérée, et l'on pourrait alors réaffirmer sereinement l'empire de la conscience seule.
[...] D'où l'accusation possible selon laquelle sa notion serait contradictoire. Ce que propose Freud, c'est une conception de l'homme dans laquelle le corps et le psychique communiquent sans cesse et peuvent s'influencer réciproquement. Il ne s'agit plus de considérer, selon une tradition d'origine platonicienne, que corps et esprit participent à deux essences opposées, ni, selon la version cartésienne, qu'ils se distinguent comme l'étendue et la pensée et ne sont unis que par une petite glande située dans le cerveau. Freud constate que des malaises organiques peuvent avoir une origine mentale : une malade se rend aveugle, sans aucune lésion somatique réelle, pour ne plus voir ce qui lui semblait insupportable, et dans certaines hystéries dites de conversion la personne vomit dès qu'elle veut parler (sans non plus souffrir d'ulcère à l'estomac). [...]
[...] Mais biologique désigne avant tout l'origine des pulsions inconscientes, et notamment de la principale : la libido, dont les manifestations principales concernent la sexualité. Que cette dernière renvoie au corps paraît aller de soi, même pour un esprit classique, et cela ne ferait que confirmer son caractère hétérogène, relativement au psychisme (d'où, par ex, la réaction symptomatique d'Alain : la psychanalyse n'est qu'une psychologie de singe, puisqu'elle soumet notre conduite à ce qu'il y a de plus inférieur dans notre corps : le sexuel). [...]
[...] Ms le contraire est également possible. Même si l'on doit admettre, selon Popper, que la psychanalyse n'est pas une science au sens strict, il reste possible de justifier l'hypothèse d'un inconscient psychique : Freud affirmait avoir des preuves de son existence. La première tient au fait que les données de la conscience elles-mêmes sont lacunaires : il y a dans la conscience des phénomènes qui semblent incompréhensibles ou incohérents, si l'on admet pas qu'ils ne s'expliquent que par la présence d'autres phénomènes échappant à la conscience. [...]
[...] La formule là où est le ça, le je (ou le moi) doit advenir signifie clairement que les pulsions ne doivent pas être acceptées comme impossibles à domestiquer, et qu'il s'agit au contraire de les repérer pour les maîtriser. Quelque choquante qu'elle puisse sembler pour un esprit habitué à considérer que la conscience est la totalité de notre esprit, et que ce dernier est bien d'une autre nature que notre corps, la notion d'inconscient psychique apparaît non contradictoire dès lors que l'on admet que l'être humain est constitué par des interactions entre le corporel et le mental, et que l'empire de la conscience est en réalité très étroit. [...]
[...] La notion d'inconscient psychique est-elle contradictoire ? Freud lui-même était convaincu que ses théories ne seraient pas facilement acceptées, dans la mesure où elles heurtent la conception traditionnelle de l'homme, et surtout de la maîtrise qu'il doit affirmer sur lui-même, tt dans sa vie ordinaire que dans ses comportements plus spécifiquement moraux. En affirmant l'existence, dans l'appareil psychique, d'un inconscient déterminant en majeure partie des conduites, les théories freudiennes ne se contentent pas d'amoindrir la portée classique de la conscience, comme faculté de connaissance de soi et d'autocontrôle ; elle semble mettre en cause également la possibilité de la morale : si mon inconscient me dirige, à quoi bon pratiquer mon examen de conscience ? [...]
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