Au sommaire de n'importe quel magazine féminin, le lecteur peut trouver au moins un article traitant de l'importance de la communication dans le couple : il faut communiquer, parler pour mieux se comprendre, pour que tout puisse bien fonctionner. Théorie de magazine, mais aussi théorie générale : c'est une vérité communément admise qu'il faut parler pour pouvoir se comporter, que le langage est outil favorisant de meilleures relations humaines.
Pourtant, Michel Leiris s'élève violemment contre cette doxa, affirmant sans ambages « Une monstrueuse aberration fait croire aux hommes que le langage est né pour favoriser leurs relations mutuelles. » Tous les hommes seraient donc dans l'erreur en prenant le langage pour un outil positif.
Le langage est-il donc un élément positif, permettant de faciliter les relations humaines, ou au contraire un malus, un danger ? Michel Leiris parle en général, sans préciser de quel type de langage il s'agit : pour éclaircir cette question, nous verrons d'abord comment effectivement certains types de langage semblent compliquer et obscurcir les relations humaines, mais comment d'autres peuvent au contraire faciliter et éclaircir les rapports entre les hommes. Enfin, nous verrons qu'il faut distinguer la communication langagière entre les personnages dans l'œuvre et le langage de l'œuvre au lecteur.
[...] D'ailleurs, la dernière scène de la pièce met bien en valeur l'opposition entre le langage clarifiant et le langage obscurcissant. Si Araminte et Dorante gardent le langage de la sincérité, du cœur (ainsi que le comte), Madame Armante elle garde le langage de la passion colérique qui ne sait ce qu'elle dit. Le Phèdre et la confiance en la vraie rhétorique Dans la seconde partie du Phèdre, après avoir condamné les dérives de certains discours, écrits et oraux, Socrate explique quels sont selon lui les critères pour qu'un discours soit bénéfique, pour que le langage ait une valeur positive. [...]
[...] III/ De quel langage parle-t-on ? Il faut distinguer le langage à l'intérieur de l'œuvre et le langage de l'œuvre Verlaine et l'émotion poétique : comprendre l'obscur Romances sans paroles est, comme nous l'avons dit, un recueil où le langage est sans cesse disqualifié, montré comme inutile, dégradé, source d'erreurs, d'angoisse, qu'il s'agisse du langage interne du je (monologue) ou du langage du je avec d'autres personnages. Mais qu'en est-il du langage poétique ? Le langage poétique, par l'émotion qu'il véhicule permet de comprendre émotionnellement, instinctivement ce qui paraît obscur. [...]
[...] En effet, par le phénomène de la double énonciation, le spectateur est mis au courant dès le début de la pièce (scène de la ruse de Dubois et du principe de la double confidence. Au moment où l'intrigue est la plus embrouillée, où les personnages ne comprennent rien, lui comprend toujours. Cela vaut pour chaque malentendu, prenons l'exemple du quiproquo de l'acte II, scène 3 : Dorante, qui ne veut pas épouser Marton, lui dit qu'elle n'a pas d'obligation à le devoir. Marton ne comprend pas la distance de Dorante, et croit au contraire que c'est encore une marque d'amour Dorante : -Oh ! [...]
[...] Et il ne faut pas oublier non plus le langage spécifique à la littérature et à la philosophique, qui parle aux lecteurs de plusieurs manières différentes. C'est là la magie de l'art en général : au moment où l'artiste se plaint de ne pouvoir communiquer, il touche le lecteur, il fait de l'angoisse de la page blanche un poème, du quiproquo un moment d'illumination et d'un conflit un éveil philosophique. [...]
[...] Ainsi, lorsqu'il confie l'amour de Dorante à Araminte, Araminte elle-même commence à ne plus maîtriser son langage, à être emportée par la passion. Le pouvoir maléfique du langage se répand. Au-delà de la manipulation, les Fausses Confidences nous présentent de multiples exemples d'incompréhensions liées au langage. Prenons la scène où Araminte charge Arlequin de se mettre au service de Dorante : les deux protagonistes ne parlent pas le même langage. Lorsqu'Araminte lui dit qu'elle le donne à monsieur Arlequin ne comprend pas le langage figuré et répond Comment, Madame, vous me donnez à lui ! [...]
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