La mémoire : approche par l'Imagerie Fonctionnelle

Résumé du document

L'évolution des concepts neuropsychologie clinique et de la psychologie expérimentale, devenues toutes deux cognitives de nos jours, conduit à proposer des subdivisions de la mémoire humaine. L'une d'entre elles distingue deux composantes : la Mémoire de Travail (MdT) et la Mémoire à Long Terme (MLT). La première permet de manipuler l'information "en ligne" (qu'il s'agisse d'information visuelle, verbale, olfactive, etc.) pendant la résolution d'une tâche cognitive et la rémanence des informations en MdT est de l'ordre de quelques secondes. La deuxième correspond à la rétention d'information pendant une durée allant de quelques heures à une vie entière. Au sein de la MLT, on peut opérer une nouvelle distinction: elle se subdivise en mémoire épisodique (mémoire des "faits vécus") et mémoire sémantique (mémoire "encyclopédique"). Par ailleurs, on peut opérer une distinction fondée sur le caractère conscient de la mémorisation des faits. Ainsi, un sujet peut faire appel à sa mémoire explicitement (sur instruction) ou implicitement (expériences d'amorçage ou d'apprentissage procédural implicite). Les études en psychologie cognitive et l'étude de patients cérébro-lésés ont permis de valider de telles subdivisions et de caractériser ces mémoires les unes par rapport aux autres.
Il y a une vingtaine d'années tout au plus, l'imagerie cérébrale fait son entrée en scène avec des techniques comme la cartographie de potentiels évoqués (PE), la Tomographie par Emission de Positons (TEP), puis plus récemment l'Imagerie par Résonance Magnétique fonctionnelle (IRMf). Ces techniques permettent d'observer le cerveau en activité et vont très vite être affectées à l'exploration de fonctions cognitives telles que la mémoire. Partant d'une recherche tous azimuts pour savoir "où cela se passe" dans un contexte encore marqué pas un localisationnisme rigide, les chercheurs vont progressivement se poser des questions de plus en plus pertinentes et tenter de tester les modèles cognitifs actuels de la mémoire, tels que celui de Baddeley (1). Du point de vue de leurs corrélats, La MdT et la MLT sont-elles un continuum l'une de l'autre ou deux systèmes indépendants ? La mémoire épisodique et la mémoire sémantique ont-elles la même distribution anatomique ? L'accès à ces deux mémoires est-il dépendant de la modalité sensorielle d'entrée ? La dichotomie des grandes voies de traitement de l'information visuelle (quoi versus où) affecte-t-elle aussi les circuits de la mémoire ?
Offrir un panorama exhaustif des découvertes récentes dans le domaine de la mémoire impliquant l'imagerie fonctionnelle est déjà aujourd'hui une tâche démesurée. Nous nous concentrerons donc sur un certain nombre de thématiques centrales à ce domaine de recherche et décrirons les développements les plus récents (...)

Extraits

[...] Ann Neurol 1984 Dec;16(6):649- Haxby JV, Duara Grady CL, Cutler NR, Rapoport SI Relations between neuropsychological and cerebral metabolic asymmetries in early Alzheimer's disease. J Cereb Blood Flow Metab 1985 Jun;5(2):193- Cardebat Demonet JF, Puel Agniel Viallard Celsis P Brain correlates of memory processes in patients with dementia of Alzheimer's type: a SPECT Activation Study. J Cereb Blood Flow Metab 1998 Apr;18(4):457- Small SA, Perera GM, DeLaPaz Mayeux Stern Y Differential regional dysfunction of the hippocampal formation among elderly with memory decline and Alzheimer's disease. [...]

[...] Reprenant les conceptions de Goldman-Rakic (1996), Ungerleider et al. (1998) suggèrent quant à eux que la distinction voie ventrale / voie dorsale observée pour les processus de traitement de l'information visuel (traitement du "quoi" versus traitement du se prolonge jusque dans les lobes frontaux en charge des processus mnésiques associés. Ils proposent que le cortex préfrontal supérieur intervienne dans la mémorisation visuo-spatiale alors que les régions plus inférieures seraient impliquées dans la gestion mnésique de l'information non spatiale (reconnaissance et souvenir de la nature des objets observés). [...]

[...] Ils ont décrit un large réseau extra-sylvien impliquant le cortex inféro-temporal gauche, le gyrus fusiforme (BA la jonction pariéto-occipitale gauche, le cortex frontal dorso-latéral et le gyrus cingulaire postérieur. Concentrant la recherche sur des catégories faisant l'objet de doubles dissociations chez les patients cérébro-lésés gauches (voir par exemple, Damasio93), Damasio et al (1996) ont décrit une parcellisation du lobe temporal de l'arrière vers l'avant en trois sous-domaines impliqués respectivement dans la mémoire des outils, des animaux et des personnes célèbres. Il semble nécessaire de modérer les conclusions fortement localisationnistes (au sens moderne du terme) de ces résultats puisque peu de temps auparavant, Martin et al. [...]

[...] Le rôle des cortex frontaux dans la mémoire épisodique Les études en TEP et IRMf portant sur la mémoire épisodique ont montré une implication du cortex préfrontal (Shallice94, Tulving94PNASHERA). En particulier, Tulving et al. (1994) ont proposé un modèle asymétrique pour l'encodage et la récupération (ou rappel) d'informations stockées en mémoire à long terme. Ce modèle, surnommé HERA pour "Hemispheric Encoding Retrieval Asymmetry", suppose que le cortex préfrontal gauche est impliqué plus que le droit à la fois dans les mécanismes d'encodage en mémoire épisodique (et de récupération en mémoire sémantique) alors que le cortex préfrontal droit est essentiellement impliqué dans la récupération en mémoire épisodique (Cabeza97). [...]

[...] En ce sens, elle englobe la MCT. Bien qu'elle fasse l'objet de différentes conceptions, la plus communément admise actuellement (et donc critiquée) est celle proposée par Baddeley Un système attentionnel baptisé administrateur central "déciderait" de l'attribution de ressources attentionnelles limitées et superviserait deux sous-systèmes de stockage esclaves: la boucle phonologique et le calepin visuo-spatial. Le premier de ces sous-systèmes serait dédié à la rétention et la manipulation d'information verbale alors que le second traiterait les informations visuelles Smith et al. [...]