"Par quelle aberration la médecine a-t-elle méconnu que porter la main sur le corps d'un autre, geste que l'acte médical implique toujours, suscite chez cet autre des réactions qui ne se limitent pas à la matérialité physique de l'Homme ?" Voila la question posée par Lucien Israël dans son introduction que je reprends à mon tour pour débuter ce mémoire. En effet, l'apparition de groupes d'étude de la relation entre un malade et son médecin ne s'est faite que très tardivement, dans les années 1970, alors que la médecine est connue et enseignée depuis des millénaires. Comment se fait-ce que personne ne se soit intéressé à cet aspect psychologique de la rencontre entre un médecin et un malade ? Comment aucun médecin n'a-t-il pensé que ses actes, ses paroles, ou ses gestes pouvaient avoir des répercutions, certes inconscientes, sur la façon dont son patient va se comporter et exprimer sa plainte ? Pourquoi la dimension humaine et psychologique n'a-t-elle pas fait partie pendant tout ce temps des énormes progrès médicaux, qui sont, en très large majorité, techniques ? Alors depuis une quarantaine d'années, des médecins, des psychologues et des psychanalystes, se sont penchés sur le sujet et ont créé des groupes de discussion, comme ceux de Michaël Balint, où chacun racontait des cas avec lesquels il avait éprouvé une difficulté morale et qui s'étaient souvent soldé par une dispute (...)
[...] Le malade doit être reconnu dans son authenticité. Et c'est cela qu'intuitivement nous avons tous à l'esprit, et c'est cela qui nous a choqué au moment où les deux étudiants racontaient leur histoire. Bien que dans ce cas exposé lors de cette séance le malade soit mourant, inconscient, incapable d'émettre le moindre souhait, ce patient reste une personne, vivante jusqu'à ce que le décès soit prononcé, et à qui il faut montrer du respect. Car toute personne est respectable et Sujet comme le dit G. [...]
[...] C'est une autre phrase de G. Canguilhem qui résume très bien le fond de ma pensée au sujet de ce cas-là. Au fur et à mesure de la discussion à propos de cette histoire, une approche plus fine a eu lieu et on a pu se rendre compte que la réaction de ces infirmières n'était pas si affreuse et inconcevable que cela. En effet, cette réaction pouvait être mise sur le compte de processus de défense, nécessaire à la protection psychologique des soignants. [...]
[...] Nous allons plutôt parler de l'attitude d'une partie de ce personnel de soin face à la situation dans laquelle se trouve le malade. Voici donc ce cas qui m'a interpellé : Un patient est arrivé dans un état très grave, de ce qu'ils nous ont raconté il était mourant et tout le personnel médical disponible aidait à lui sauver la vie. Ils se relayaient pour faire le massage cardiaque, pour le ballonner et surveiller les constantes dans l'espoir de les voir s'améliorer. [...]
[...] C'est dans ce but que nous avons rejoué la scène, avec d'autres personnes et avec les conseils mis en évidence pendant la discussion précédant cette deuxième interprétation. Et on se rend compte que cette participation active de la grand-mère dépend en tout et pour tout du médecin, qui relève son avis, lui pose des questions, engage la belle-fille à parler à sa belle- mère et moins au médecin, etc. Alors je ne critique absolument pas le premier acteur qui jouait le médecin, loin de là, mais c'est sur le médecin que repose la tournure que va prendre la discussion : soit il infantilise ses patients et le malade va être dans une situation compliquée, dans laquelle il ne pourra pas exprimer ce qu'il ressent, il ne pourra pas se repérer dans un monde qui n'est plus à la mesure de l'homme (L. [...]
[...] Il y a donc une forte asymétrie sur ce point-là dans la relation malade médecin, ce qui crée ce climat d'infantilisation. Le malade demande à être soulagé de sa souffrance, le médecin demande au malade de lui faire confiance : c'est une sorte de pacte entre les deux intervenants dans cette relation. Le médecin tend à se comporter comme un père, et le patient comme un enfant se plaint à son père et attend du réconfort, de l'aide et dans le cas de la relation médecin malade, des soins. [...]
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