Philippe Jeammet, Actualité de l'agir

Résumé du document

... Se conjuguent les effets de la problématique personnelle des parents et ceux des modifications dans les relations familiales engendrées par les changements sociaux (valorisation des performances individuelles, repli sur la famille face à un monde considéré comme hostile). Ces effets, que l'on retrouve essentiellement dans les milieux en voie de progression dans l'échelle sociale, s'exercent dès les premières années et s'opèrent plus ou moins au détriment de la satisfaction des besoins affectifs et de l'expression des manifestations auto-érotiques de l'enfant. Ce dernier cesse alors de différencier ses propres désirs de ceux de son entourage. Il confond son désir avec l'objet de ce désir qui en devient le porteur ...

Extraits

[...] Elles empruntent, dans des proportions variables, des traits issus des organisations névrotiques et psychotiques, de l'aménagement pervers. Mais aucune de ces modalités ne peut rendre compte de ce qui est le plus caractéristique, à savoir le recours à l'agir. Ce recours à l'agir constitue le deuxième point commun à ces pathologies. Il revêt des formes très différentes, s'associe à une activité représentative et des défenses mentalisées, ce qui fait de lui un élément extrêmement variable et complexe. Il sera en effet différent dans la toxicomanie, l'anorexie, le passage à l'acte suicidaire, le non-agir du retrait par désinvestissement. [...]

[...] Il est parfois stupéfiant, nous signale l'auteur, de voir le contraste entre le maintien de cette position attentiste et l'état quelquefois dramatique de l'adolescent. C'est à lui d'accepter ce qui lui est proposé pour que les parents l'acceptent à leur tour, alors que la mort peut être l'aboutissement de cette incapacité à décider. Bien souvent, même face à une violence montante, à une agressivité de plus en plus présente, les parents de tels adolescents ont du mal à prendre une décision et n'arrivent en aucun cas à se convaincre de poser eux-mêmes des limites, alors que ce simple fait suffirait sans doute à faire évoluer la situation d'une façon favorable. [...]

[...] Le refoulement est éprouvée avec la disparition de l'immaturité physique, le rapprochement parental. Si les figures parentales se confondent, la prégnance de la figure maternelle constitue alors une menace, aggravée par les désirs incestueux chez le garçon et les besoins identificatoires chez la fille. Certaines mesures thérapeutiques permettent de restaurer les limites perdues entre l'adolescent et ses parents. La conséquence est un fonctionnement psychique autonome retrouvé. Ces données marque bien le fait que le poids d'un fantasme tel que le fantasme d'englobement se trouve renforcé par les attitudes parentales. [...]

[...] L'acte, qu'il provienne de l'adolescent ou du thérapeute, peut s'inscrire dans une tentative de restitution de la médiation paternelle. L'approche psychothérapique, dans une population adolescente, n'est pas aisée. L'ambiguïté de la notion de demande témoigne de cette difficulté. Ceux qui demandent ne sont pas les plus en détresse. Quant aux autres, ils ne peuvent reconnaître cette demande, sous peine d'admettre une dépendance à l'égard de l'objet. De plus, attendre qu'ils le fassent, c'est répéter le retrait paternel. Imposer n'est pas la solution. Cependant, adopter une position attentiste correspond à un non-agir qui à valeur de passage à l'acte. [...]

[...] Mais la seule règle en vigueur dans ces familles, c'est celle qui traduit leur désir d'être des parents idéaux. L'enfant, dans un mouvement de renversement de l'ordre des générations, prend alors la place d'une figure grand-parentale. Cette sorte de refus du conflit, ce détachement des ‘obligations parentales' font qu'ils laissent à l'enfant tout le travail de séparation et tout le poids de l'agressivité. A partir de ces considérations, l'auteur pose la question de savoir si une structure spécifique ou des nécessités communes de l'économie psychique des adolescents caractérisent ces pathologies. [...]