La Passion, du latin patior signifiant souffrir, éprouver, renvoie à un ensemble d'états dans lequel l'individu est passif, états étrangers à l'âme et qui viennent la troubler. Au sens classique, la passion est connotée négativement, considérée comme perversion de la raison, de la volonté (stoïciens) ou comme une maladie de l'âme (Kant). Ainsi, le faible, l'insensé, est, pendant la période classique, celui qui succombe à ses passions et qui ne parvient pas à les maîtriser. Platon dans le Gorgias illustre parfaitement la pensée de son époque, en mettant en scène un Socrate perplexe face à l'attitude du personnage de Calliclès, pour qui une vie heureuse est une succession de plaisirs aussi inutiles et matériels soient-ils. Cependant, une maîtrise de ces passions serait possible grâce à la raison. Le sujet présuppose une opposition clairement établie entre les passions et leur maîtrise, l'homme serait heureux et se réaliserait pleinement soit dans l'un, soit dans l'autre. Bien avant la psychanalyse, les philosophes de la conscience avaient reconnu l'existence de certaines « forces obscures », inconscientes, qu'ils appelèrent « passions », et ils ne doutaient pas que l'homme soit capable des les maîtriser par sa conscience. les stoïciens, ou Descartes qui ont pensé la morale comme domination des passions par la conscience). De ce fait, Freud contredit ces thèses lorsqu'il soutient que le moi n'est pas le maître dans sa propre maison, que l'inconscient est une force obscure qui arrache et empêche l'homme de coïncider avec lui même. Pourtant, là où Freud reconnaît une certaine rationalité de ces forces obscures qui agissent en nous sans qu'on en soit conscients, les philosophes ont le plus souvent soutenu l'irrationalité des passions. C'est ce présupposé qu'il s'agira d'analyser en premier lieu : Doit-on se débarrasser des passions afin de vivre mieux et en conformité avec nous-mêmes ?
[...] Il faut simplement parvenir à les modérer, et essayer de ne pas tomber dans l'excès. On voit que cette idée de modération des passions sous-entend que, laissées à elles-mêmes, les passions gêneraient la tranquillité de l'âme. Peut-on aller plus loin et dire que l'emportement passionnel est lui même non seulement nécessaire mais encore louable ? Le courant romantique du XVIIIe siècle avance l'idée qu'on peut connaître l'absolu, mais contrairement à Kant, non pas avec l'entendement, mais avec notre sensibilité. L'homme ne se définit donc pas par l'universalité de sa raison. [...]
[...] Dans La Raison dans l'histoire, il explique que la Raison gouverne le monde, et qu'il y a un plan caché derrière l'histoire des hommes, elle va vers une fin : la réalisation de la raison, l'avènement de la liberté, qui se confondent avec l'avènement d'un état universel, dans lequel le droit serait au service de l'individu et les hommes seraient ainsi satisfaits de leur condition. Cette fin est, pour lui, le véritable moteur de l'histoire, les hommes empruntent ce chemin inconsciemment. Ce qui permettra de réaliser cette fin sont justement les passions, sans qui en effet, les hommes ne pourraient jamais réaliser le bien. [...]
[...] Il faudrait donc s'en débarrasser afin de vivre comme on l'entend. Pour Kant, la passion (ou émotion) s'oppose à la raison. Ainsi, l'inclination (désir habituel) que la raison du sujet ne peut pas maitriser ou n'y parvient qu'avec peine est la passion. L'émotion est un sentiment d'un plaisir/déplaisir actuel qui ne laisse pas le sujet parvenir à la réflexion (Anthropologie d'un point de vue pragmatique). L'emportement, qui relève du domaine de l'affectif, de la sensibilité, les passions comme les émotions, empêche toute réflexion donc tout exercice de la raison. [...]
[...] Bref, une passion doit s'accompagner de quelque faux jugement pour être déraisonnable, même alors ce n'est pas, à proprement parler, la passion qui est déraisonnable, c'est le jugement Hume montre que le domaine des passions n'a rien à voir avec celui du rationnel. Il ne s'agit pas de porter des jugements sur un monde extérieur, donc du vrai ou du faux, mais de ce qui nous fait plaisir ou pas. Pour Hume, il y a certes un sens moral, mais qui n'a pas pour origine la raison . [...]
[...] Pour Kant, aucune société n'est possible si nous nous laissons tous aller à nos passions, le monde serait un véritable chaos sans aucune entente, aucune entraide mutuelle. Kant se réfère aux stoïciens, il prône l'idéal du sage grec qui s'est détaché de toute emprise de la passion. On comprend donc que la passion ait été comprise comme une maladie, elle relève de l'obsession et d'une certaine perte du réel. Elle est aveuglement sur soi, sur les autres et le monde qui nous entoure. L'homme de bien, l'homme moral et l'homme équilibré, heureux, est celui qui n'a pas de passions, ou qui a su les faire taire. [...]
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