L'entretien clinique est un terme qui en évoque d'autres. En effet, la position du clinicien est celle de l'écoute du discours du patient, par une attention flottante qui lui permet de rester sensible aux variations, aux associations, aux particularités du discours du sujet. L'entretien clinique provoque des mouvements internes chez le clinicien comme chez le patient. Ainsi des mouvements transférentiels apparaissent. La neutralité bienveillante pratiquée par le psychologue ne dispense pas des représentations subjectives de chacun.
Dans une première partie, nous allons parler de la rencontre avec le sujet et de ce qu'elle implique, puis nous analyserons dans un second temps l'entretien en essayant de dégager la problématique, l'organisation psychique de cette personne. Enfin, après avoir fait une critique de nos interventions, nous parlerons des mouvements transférentiels et contre-transférentiels engendrés par cet échange (...)
[...] J'ai à faire dans mon quotidien à des situations où la dépression est manifeste. En effet, ma mère est dépressive. Je dois faire tous les jours avec ce caractère difficile qui me pèse énormément. Cette lourdeur d'une partie du caractère dépressif de Thibaut, j'ai du l'entendre pendant l'entretien. Elle a résonnée en moi comme la lourdeur des propos de ma mère. C'est là dans l'entretien la réactualisation de mouvements et mécanismes déjà vécus personnellement et déjà développés en moi. Pourtant le pôle dépressif chez Thibaut est moins développé que le pôle maniaque. [...]
[...] L'entretien débute par un rappel de ce qui va se passer. Lui ayant déjà expliqué les modalités de l'entretien par téléphone, cette introduction est courte, mais pour le moins mal formulée. Ce sont là mes propres angoisses et appréhensions qui semblent s'exprimer par une récapitulation de ce qui est alors présenté comme des consignes. Je termine ma phrase par voilà ce qui à priori ne donne pas de place à une interaction ou à des échanges. Je lui propose pourtant ensuite s'il souhaite me parler de quelque chose d'un truc J'utilise là encore une fois un vocabulaire maladroit, inapproprié au cadre que j'ai essayé de définir pour le bon déroulement de l'entretien. [...]
[...] Le matériel audio permet la prise de conscience de points non perçus pendant l'entretien et nous confronte à nos propres problématiques. Nous voyons là tout l'intérêt d'un travail sur soi-même en profondeur. Il aurait été intéressant de suivre Thibaut pour être sûr qu'il restera adapté à la société dans laquelle il évolue, que son organisation psychique restera dans un bon équilibre entre les deux pôles de sa problématique et que ses mécanismes de défense, en majorité de type névrotiques, pourront maintenir cet équilibre qui semble être fragile. [...]
[...] Il aurait pu être intéressant de rentrer dans le conflit entre lui et sa belle-mère, conflit qu'il me semble avoir évité. Il s'agirait d'un mouvement défensif de ma part visant l'évitement de ce conflit. Cette dispute est en relation avec ses principes qu'il m'a défini précédemment comme étant l'équivalent d'une religion des guides Je lui demande alors si ses principes lui tiennent à cœur pour le relancer par rapport à ses propos qui m'ont interpellée, qui m'ont paru très forts. [...]
[...] La fin de l'entretien a alors été un soulagement que je souligne par un vocabulaire optimiste. Je fuis toutes ses expressions d'affect dans ma manière même de lui parler. Nous avons vu dans la critique des interventions, l'évitement ou la minimisation des situations. Je devais m'attendre là à l'expression d'affects négatifs que j'ai l'habitude d'entendre et que sans doute je ne veux plus entendre. L'entretien a dû là se dérouler d'une façon complètement différente de ce qui aurait pu se jouer avec un autre étudiant. [...]
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