Il est commode, étant donné le contexte épistémologique qui l'exige, d'agiter sans s'approfondir le débat portant sur le statut de la faculté du langage au sein de l'architecture cognitive. La première position, qui a contribué énormément à l'essor de plusieurs disciplines telle que la psychologie cognitive, renvoie à une dissociation entre langage et processus cognitifs. C'est à dire, la faculté de langage conserve une certaine autonomie (fonctionnelle et structurelle) à l'égard des capacités cognitives de haut niveau et vice versa. Cette conception de systèmes séparés est connue sous le nom de "modularité" du système cognitif1 (Fodor, 1983) et a dominé les esprits surtout en neuropsychologie où chaque dissociation valide (tâche 1 systématiquement mieux accomplie que tâche 2) offre l'exemple idéal de processeurs modulaires. Néanmoins, s'inspirant des données de la neuropsychologie elle-même, science de spécificité domaniale par excellence, la constatation de dissociations (par ex : morphologique langagier/visuelle) ne conduit pas immanquablement à l'hypothèse de modularité (Farah, 1990)2. Ce fut le cas pour les réflexions qui prétendent à l'interaction mutuelle entre langage et cognition. L'une d'elles est l'idée du "relativisme linguistique". Hypothèse proposée par Sapir et Whorf, elle avance que la structure de la langue détermine en grande partie les propriétés et la forme de la pensée (Hakuta, 1986). Ainsi, en tant que possible précurseur de la pensée humaine, le langage pourrait jouer le rôle d'un opérateur de perception, d'apprentissage et plus généralement de cognition.
Nous ne sommes pas à la quête d'une réponse tranchante à ce sujet, mais il nous est intéressant d'introduire le principe de la tâche de la présente étude sous la lumière de cette jonction fonctionnelle pensée-langage, particulièrement l'interface langage-perception. Partant du principe que la condition linguistique n'est pas assez souvent fiable pour induire à une parfaite compréhension de la formule linguistique (garden-path effect), le contexte visuel peut se révéler d'une utilité majeure si on l'associe au traitement linguistique. Ceci fut le fondement conceptuel mais aussi méthodologique du paradigme de "Visual World".
[...] Analyse des liens entre langage et mouvements oculaires à travers la lecture d'un travail d'Altmann (2000) intitulé Langage-mediated eye movements in the absence of a visual world : the 'blank screen paradigm' Il est commode, étant donné le contexte épistémologique qui l'exige, d'agiter sans s'approfondir le débat portant sur le statut de la faculté du langage au sein de l'architecture cognitive. La première position, qui a contribué énormément à l'essor de plusieurs disciplines telle que la psychologie cognitive, renvoie à une dissociation entre langage et processus cognitifs. [...]
[...] Ce type de modularité est qualifié d'externe (Fodor, 1983). La modularité interne renvoie à la décomposition de la faculté de langage en modules censés effectuer un ensemble de fonctions : modules phonologique, morphologique, syntaxique, sémantique ou encore grammaticaux admis dans le cadre de la théorie chomskyenne du gouvernement et du liage (Chomsky, 1991) Par exemple dans le cas d'une agnosie visuelle, il n'existe pas de processus spécialisés dans le traitement des objets autres que les lettres. Le déficit touche un réseau continu mais ayant des effets discontinus. [...]
[...] Pour répondre à cette question, l'auteur a fait référence à l'hypothèse de Richardson et Spivey (2000) selon laquelle la scène visuelle sert à une sorte de mémoire externe, telle que l'a décrite O'Regan (1992), que le système visuel utilise pour extraire les informations intéressantes ou ce qu'appellent ces auteurs les indices (pointers). Ainsi, l'expression linguistique serait le médiateur des mouvements oculaires qui agissent sur les indices spatiaux et par conséquent sur les cibles visuelles. Ces indices seraient les composantes d'une trace épisodique qui persiste après la disparition de la scène permettant entre autres de guider le système visuel à travers l'ensemble de la configuration spatiale. [...]
[...] Farah, M. J. (1990). Visual agnosia. Cambridge MA: M.I.T. Press. Fodor, J. A. (1983). The modularity of mind. Cambridge, MA : M.I.T. Press. [...]
[...] Force est de constater par conséquent que, le temps requis pour la transduction des unités linguistiques en mouvements visuels est largement équivalent à la condition de co-existence linguistique- visuelle, bien que le moteur même de l'action soit une interprétation mnésique de la scène. Ce qui témoigne, à un niveau plus global, d'une impressionnante adaptation face aux contraintes perceptives ou linguistiques. L'intérêt que suscite cette démonstration réside essentiellement en ce qu'elle apporte d'arguments en faveur d'une possible synchronisation entre l'input linguistique et l'output oculomoteur tout en ayant comme objet d'action un analogue mnésique du schéma visuel en face. [...]
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