Le langage, composé de signifiants, est ce qui caractérise, connote, assigne à leur place, les objets. Il le fait de façon relative et, en définissant les signifiants par rapport aux autres signifiants, il assigne aux objets signifiés une existence par rapport aux autres objets signifiés.
La conscience qu'a un sujet de son existence est due, d'une part, au langage qui lui assigne sa place et le caractérise et, d'autre part, aux objets par rapport auxquels il peut s'identifier, c'est-à-dire à la notion d'altérité. L'entrée dans l'existence du bébé se fait donc, d'une part, par le langage qui le précède et, d'autre part, par l'apprentissage progressif de l'existence d'un environnement extérieur à lui.
Une fois cette existence établie, la notion d'altérité devra être soigneusement conservée pour pallier l'identification - particulièrement dans la relation analytique - ou le déni de l'existence d'autrui. L'existence par le signifiant se renforcera : la place sociale de l'adulte et ce qui le caractérise seront établies par le langage. La psychanalyse aura alors pour rôle de détacher le sujet des signifiants trop encombrants, de dégager une aire de jeu entre le sujet et la place que le langage lui assigne.
[...] Le bébé naîtra donc avec une identification signifiante, et existera dans le langage avant d'être présent physiquement. A la naissance, l'inscription du nom de l'enfant sur les registres d'état civil, scellera son existence physique et sociale. Le nom de famille correspond à l'héritage qui place le nouveau né dans une lignée, une histoire, comme étant le produit de ses géniteurs. Le prénom lui attribue son identité propre, ce qu'il ne cessera d'être. Ainsi, le signifiant premier crée le bébé en tant qu'individu. [...]
[...] Evolutions possibles de la détermination par le langage et de la notion d'altérité Au cours de son développement, le sujet prendra conscience de sa détermination par les signifiants. Au collège, il sera catégorisé et de nombreux surnoms viendront soit le valoriser (puisque par sa nomination, c'est lui) soit l'étouffer, s'ils sont méchants ou simplement trop fréquents, lourds. Un peu plus tard, en quête d'identité, il est fort probable qu'il essaie d'imposer un surnom qui lui convienne, afin de ne pas être seulement le produit de ses parents (qui ont choisit son prénom et lui ont légué leur nom) et de se détacher de toute détermination immuable. [...]
[...] Dans le cas contraire, le bébé est largué dans un monde où il est à la merci de tout, ne pouvant se raccrocher à la certitude du sein, il entre dans un univers d'angoisse. Afin de sécuriser cette séparation, le bébé, puis l'enfant, utiliseront un objet ou phénomène transitionnels, pour se rappeler d'une part l'existence de la mère (contact presque constant, mouvement de succion) et d'autre part l'indépendance de celle-ci (le bébé reconnaît le doudou, le gazouillis ou autres comme extérieur à lui)[3]. A ce stade le bébé n'est pourtant toujours pas entré activement ni dans la communication[4] ni dans le langage. [...]
[...] Winicott[5] est le lieu d'un premier contact avec le monde extérieur. L'objet sera d'abord utilisé, c'est-à-dire détruit, dénié, puis accepté comme ayant survécu à la destruction : L'enfant jette les objets pour se prouver qu'ils peuvent exister sans lui, qu'ils peuvent lui survivre. L'objet, le non moi, existant, l'enfant pourra jouer avec lui dans cet espace potentiel. Le jeu, en tant qu'occupation captant toute l'attention de l'enfant, lui permettra de constater qu'il peut oublier complètement l'existence d'un objet, puis revenir à lui sans qu'il n'y ait de séquelles. [...]
[...] L'analyste doit parfois renoncer à comprendre le sujet, s'il veut y parvenir. La relation d'identification fusionnelle, en analyse, peut en effet nuire à l'interprétation : en voulant comprendre, l'analyste déforme le message puisqu'il l'associe à ses propres références. Il doit savoir se contenter d'être l'objet du sujet (le destinataire de la parole), sans tenter de pénétrer dans son aire de jeu, dans son inconscient. C'est pourquoi les psychanalystes verbalisent si peu leurs interprétations : ils ne peuvent réellement être (comprendre) le sujet, qui est le seul à pouvoir s'interpréter justement. [...]
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