Les questions de l'enfermement et de l'emprisonnement ont toujours suscité de vifs débats, dont on se contentera de rappeler pour s'en convaincre celui relatif à l'abolition de la peine de mort en France et les polémiques inhérentes qui agitèrent la France des années 80 (loi du 9 octobre 1981).
Tant de passions autour de ce sujet indiquent assez nettement combien la prison et ses prisonniers sont objets de craintes, de suspicion, de haine parfois pour les gens du "dehors". Sans doute ces réactions sont-elles des plus humaines et naturelles, face à des personnes qui ont violé la loi et les règlements de la société, allant pour les plus modérés du simple vol jusqu'aux homicides, viols et autres actes criminels pour les plus durs.
Cette peur quasi primitive des prisonniers n'est pas sans rappeler celle, quasi identique, qu'on retrouve à l'égard des fous et malades mentaux, et l'on peut affirmer aisément que ce lien n'est pas sans logique, puisque de nombreux incarcérés sont également suivis pour troubles psychiatriques plus ou moins sévères.
La société a donc peur de ses délinquants et criminels, de ses marginaux, qu'elle préfère parquer loin de ses yeux, oubliant parfois que ces prisonniers, aussi horribles fussent leurs actes, sont avant tout des êtres humains. Se désintéressant et ignorant délibérément ces reclus, la société les laisse dans des conditions de vie au sein des prisons absolument inacceptables et indignes pour n'importe quel homme.
Pourtant, si cette situation scandaleuse est certaine, et empire encore du fait de la surpopulation croissante dans les établissements carcéraux français, peu d'entre nous osent dénoncer cette atteinte à l'humanité.
[...] Par ce document des plus officiels et sérieux, on saisit que les associations, peut être soupçonnées par certains d'être partisanes, n'exagèrent pas les conditions indécentes et inhumaines qu'elles dénoncent en France. Pire encore, ce rapport souligne aussi que la violence (contre soi et contre les autres, agressions sexuelles certes inhérente à l'incarcération, découle aussi pour une bonne part "directement de la surpopulation carcérale", puisque la promiscuité engendre clairement une progression des agressions (contre les surveillants et entre détenus). Le désespoir se manifeste également sous forme d'automutilations et suicides, manifestations de la détresse morale des détenus et moyen d'appeler au secours. [...]
[...] Il faut donc vous faire peur avec la prison ou vous calmer avec la morale". Finalement la prison serait devenue l'outil central de gestion de l'insécurité sociale, à l'image de la politique carcérale des Etats-Unis et son "aspirateur social" qu'est la prison, chargée de "nettoyer les scories de la dérégulation économique et de la régression de la protection sociale sur fond de division raciale" La société préfère hypocritement feindre d'ignorer les conditions de détention déplorables et contraires à la dignité humaine, estimant cela comme une juste peine pour ces "inadaptés sociaux" nuisibles et dangereux. [...]
[...] Cabanel Les prisons : une humiliation pour la République), ces situations sont d'autant plus insupportables qu'elles sont en outre antinomiques avec les dispositions du Code de Procédure Pénale qui prévoit entre autre, afin de garantir le respect de l'intimité, l'isolement individuel de jour comme de nuit dans les prisons Citons quelques articles de ce code en exemple : - Art. D.349 : L'incarcération doit être subie dans des conditions satisfaisantes d'hygiène et e sécurité, tant en ce qui concerne l'aménagement et l'entretien des bâtiments. - Art. D.350 : Les locaux de détention et, en particulier, ceux qui sont destinés au logement, doivent répondre aux exigences de l'hygiène, compte tenu du climat, notamment en ce qui concerne le cubage d'air, l'éclairage, le chauffage et " l'aération - Art. D : Les installations sanitaires doivent être propres et décentes. [...]
[...] )une chiotte à la turque( ) une plaque de mousse par terre pour dormir le jour, un drap pour la nuit". Véronique Vasseur n'hésite pas à affirmer que "quelques jours dans cet enfer, et on transforme le plus gentil des garçons en bête féroce" (p.50). Le quartier d'isolement, ou "torture blanche" est encore pire, engendrant souvent des troubles du comportement avec tout contact impossible. Les autres blocs sont du même acabit : "une odeur effroyable, une saleté épouvantable, des déchets de nourriture par terre ( . ) les murs des cellules suintent, ruissellent d'eau"(p. [...]
[...] Pourquoi n'est-ce pas toujours le cas pour des prisonniers plus "banals" ? Pourquoi le traitement douteux dont font l'objet des prisonniers de Guantanamo aux Etats-Unis soulève-t-il tant de critiques, alors que tout près de nous, en France, d'autres incarcérés anonymes souffrent de conditions tout aussi insupportables ? Un témoignage réaliste et cru sur la condition des détenus Avant de discuter ces questions pour le moins délicates, il convient dans un premier temps de revenir sur le carnet de bord de Véronique Vasseur afin de prendre en considération de façon plus précise et illustrée la façon dont sont traités les détenus de la Prison de la Santé (et sans doute d'autres prisons françaises). [...]
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