Dire, faire dire l'extermination. Trauma et témoignages, Claude Lanzmann, parole orale, survivants, Holocauste, génocide, Juifs d'Europe
Il s'agit ici de porter attention, à partir du documentaire de Claude Lanzmann, à la construction de la parole orale par les survivants pour dire l'événement.
Shoah est en tournage depuis un peu plus de 5 ans lorsque la série de Marvin Chomsky Holocauste est diffusée sur les écrans de la télévision française.
Lanzmann s'élève contre la banalisation, l'expulsion de l'Histoire de la série américaine Holocauste. Selon l'auteur, le feuilleton contribue à « transgresser parce qu'il banalise et abolit le caractère unique de l'Holocauste ».
Le film monument d'exception de Claude Lanzmann est achevé en 1985. D'une durée totale de 9h30, ce film documentaire s'inscrit, par sa conception, sa réalisation et sa durée à contre-courant du feuilleton américain.
Shoah est un documentaire sur le génocide des Juifs d'Europe où une place matricielle du témoignage de survivants de la Shoah est présente. De très nombreux écrits lui ont été consacrés.
[...] Tu dois sortir d'ici, tu dois témoigner de notre souffrance, et de l'injustice qui nous a été faite'. La même séquence est rapportée à l'écrit, mais elle apparaît beaucoup plus longue. À l'oral, le témoin a ‘supprimé' quelques scènes : notamment celle de l'enfant qui vient le voir, sa mort et son ‘après mort'. Il écrit dans son livre-témoignage : ‘Soudain, on entendit s'élever de l'affreux vacarme un chant qui se transforma bientôt en un véritable cœur. Des hommes venaient d'entonner l'hymne national tchécoslovaque Kde domov muj, Nad Tatrou sa blyska, auquel fit peu après écho le chant juif Hatikva ultime protestation conte l'inéluctable destin qui leur était imposé. [...]
[...] Il y avait des miroirs ? Comment faisiez-vous ? = revient sur la question à laquelle il a échappé ? qu'avez-vous éprouvé ? Bomba répond : Vous étiez mort au sentiment, mort à tout. Et d'ajouter, je vais vous raconter quelque chose C'est le témoin qui propose au réalisateur de dire quelque chose ce à quoi Lanzmann l'a incité jusqu'ici sans succès. Abraham Bomba commence par décrire la séquence : Des femmes sont arrivées de sa ville, il en connaissait un grand nombre. [...]
[...] Dans un premier temps, le témoin s'attache à décrire le transport dans les wagons, la chaleur, la soif, les paysans polonais/La sélection et la nudité avant d'être retiré du groupe, le gazage, les cris qui vous restaient dans la tête vous ne pouviez plus dormir Puis il insiste sur le silence, la mort matérialisée par les tas de vêtements, de chaussures pour signifier la mort de masse. Il ne restait plus une trace. Rien. Ni personne. Jamais Le silence après chaque gazage et son incrédulité. =le témoin pose le cadre de son récit qui se situe d'abord dans le descriptif avant d'évoquer son travail à Treblinka. [...]
[...] Kurschuss me reconnut le premier et me frappa aussitôt avec sa matraque. Je tombai par terre et, lorsque je me relevai, une véritable volée de coups de poing s'abattit de nouveau. Étrangement, que je repris mes esprits, la volonté de vivre m'était revenue. Kurschuss hurlait : ‘Espèce de cul, satané scélérat, apprends que c'est nous et non toi, qui décidons si tu dois vivre ou mourir ' ( p.243/ libération, n'étais plus qu'une épave vivante, l'ombre de moi-même. Je n'étais même plus capable de ressentir une émotion. [...]
[...] Fais-lui part des adieux de sa Jana'. J'étais abasourdi par tant de courage et de sang froid en de telles circonstances. Avant même d'avoir pu réfléchir à ma réponse, les jeunes filles surmontèrent mon opposition. Elles m'empoignèrent par les bras et les jambes et me traînèrent littéralement jusqu'à la porte de la chambre à gaz, malgré ma résistance. Puis elles me relâchèrent et me poussèrent dehors de toute leur force. J'échouai au milieu des SS qui se tenaient en faction. [...]
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