Les aspects sociopolitiques de l'immortalité humaine dans la science-fiction

Thèmes abordés

Michel Houellebecq, Greg Egan, Dmitry Glukhovsky, immortalité, utopie, science-fiction, métaphysique, Cité des permutants, Possibilité d'une île, Futu.re

Résumé du document

À partir du corpus :
- Greg Egan, La cité des permutants, 1999, Le Livre de Poche, Paris, 435 pages.
- Michel Houellebecq, La possibilité d'une île, 2013, J'ai Lu, Paris, 448 pages.
- Dmitry Glukhovsky, Futu.re, 2019, Le Livre de Poche, Paris, 960 pages.

En science-fiction, les écrivains ont souvent fait de l'immortalité humaine un bienfait ou une malédiction. Elle représente une aspiration ancienne et universelle de l'humanité.
Mon choix s'est porté sur les ouvrages mentionnés ci-dessus, car les auteurs y élaborent avec clairvoyance une société du futur en toute subjectivité avec une part d'imaginaire et une autre part de possible en quête d'un modèle d'organisation politique et social.

"Et si nous portons notre attention sur le mode de fonctionnement de ces sociétés, nous constatons que La Cité des permutants correspond à un univers immortel sur mesure. Des fortunes, de l'intelligence artificielle, des moyens techniques et scientifiques hors norme, le big Data, des génies, Greg Egan entraîne le lecteur dans un monde fou pour tenter de lui faire découvrir si derrière tout cela se dissimule l'immortalité humaine. Combien cela coûtera-t-il pour que l'impossible devienne une possibilité? Il est contrôlé par les calculs d'un méta ordinateur. Il s'agit de la société du personnage Paul Durham, un spécialiste de la numérisation de la conscience."

Extraits

[...] « Mais la démocratie précisément est menacée sur sa base, le peuple, par les technologies de l'information et l'évolution des m?urs sur le réseau, et cela sur quatre points notamment, l'intolérance, la culture de l'incrédulité, l'incivilité, la mise en cause des libertés individuelles et en particulier du droit à la confidentialité de la vie privée. Sur tous ces points, la pratique s'inscrit en faux contre le rêve de la démocratie électronique? » (Egan, 1999) Quant à la démocratie électronique proposée par Greg Egan, elle n'est pas meilleure que la démocratie que nous connaissons. - La problématique de l'équité. [...]

[...] Citons par exemple les Copies qui rejettent la vie virtuelle et qui souhaitent en sécurité dans un territoire indépendant de la Terre, vers un monde artificiel sensiblement similaire au monde réel en ce qui concerne la vie sociale et sur le plan biologique. Quant à Futu.re, la société fictive est la réplique de notre monde actuel en certains points. En effet, les migrants qui s'accumulent aux frontières de l'Europe, en quête d'un monde meilleur, d'une vie éternelle, se trouvent refoulés comme dans notre société actuelle. C'est le miroir de notre actualité. [...]

[...] Dans son récit, il organise le pouvoir politique de l'immortalité humaine simultanément autour de la transformation de l'être humain, de l'écosystème et également des rapports sociaux. On assiste à une nouvelle organisation de l'être qui remet en cause la fonction et l'action des humains dans le domaine sociopolitique entre autres. Michel Houellebecq a pour but de suggérer au lecteur de sortir de l'anthropocentrisme et de mieux prendre en considération la complexité relationnelle entre les différents éléments constitutifs de notre environnement comme les animaux, les facteurs météorologiques Dans La cité des permutants de Greg Egan, « Si la technologie progresse suffisamment, l'impact sur l'environnement de la plus riche des Copies pourrait en fin de compte se révéler inférieur à celui de l'humain le plus ascétique. » (Egan, 1999) Dans cet ouvrage, à l'image des deux autres du corpus, l'auteur montre aussi comment relater la vie artificielle comme une véritable discordance extra-humaine indépendante des traditions métaphysiques occidentales. [...]

[...] De s'imaginer que quelque chose de beau nous attend dans le ciel. Enfin on s'entraîne à la mort, un petit peu. Quand on n'est pas trop con, ni trop riche. » (Houellebecq, 2013) Dans la secte des élohimites, les membres se détruisent eux-mêmes pour revivre dans leur clone car ils refusent de vieillir. « Si j'appelais en moi-même les élohimites les Très Sains, c'est qu'ils étaient, en effet, extrêmement sains. Ils ne souhaitaient pas vieillir ; dans ce but ils s'interdisaient de fumer, ils prenaient des anti-radicaux libres et d'autres choses, qu'on trouve en général dans les boutiques de parapharmacie. [...]

[...] La Panamérique présente aussi l'immortalité uniquement à ceux qui peuvent se l'offrir. Les riches occupent la meilleure place. Les Européens sont tous immortels, alors que sur les autres continents le remède est accessible seulement aux classes les plus privilégiées. Mais, le prix à payer pour les européens est de se faire injecter un virus ne laissant plus que 10 ans de vie si on a un enfant. Avant d'établir le lien entre l'immortalité et la polarisation sociale définitive des ?uvres analysées, il importe de reconnaître que la science-fiction doit être autant regardée sous un angle socio-politique que technologique. [...]