Dans son Traité des autorités politiques et théologiques, Spinoza s'intéresse à la question de la foi religieuse. Par une série d'implications successives, il met en lumière les mécanismes profonds de cette croyance particulière et semble répondre à la question « qu'est-ce que la foi ? » en écartant les spécificités de telle ou telle autre religion, c'est-à-dire en dégageant ce qui est essentiel et nécessaire dans la foi religieuse. Epurée, celle-ci conduit alors à une conception plus saine de la religion comprise comme le premier pas vers la paix civile. Comment l'opposition entre foi et raison est-elle justifiée par Spinoza ? En quoi réside l'intérêt éthique et politique de la religion, si celle-ci exclut de son champ l'adhésion raisonnée au dogme ?
[...] C'est donc cet enthousiasme passionné qui caractérise la foi. Au-delà d'une simple croyance (croire que), la foi est l'adhésion sans bornes à une assertion dont dépend la vie entière du croyant (croire en) : celui-ci lui demeure fidèle. Etre un fidèle n'est-il pas synonyme d'être croyant ? Mais pourquoi cet élan quasi-extatique a-t-il plus de poids que l'amour de vérité, pourtant idéal en soi, lorsqu'il s'agit de religion ? De nouveau, Spinoza répond à cette question en s'intéressant au but originel de la religion (encore une fois indifférenciée puisque aucun culte en particulier n'est évoqué ici). [...]
[...] Il est en ce sens légitime de questionner la validité intemporelle de ce modèle. Les sociétés modernes dont la rupture avec la religion est consommée se sont orientées vers un schéma éthique tout autre, étranger ou presque au religieux. La morale des sociétés modernes s'est peu à peu autonomisée de la théologie sous la forme d'une théorie de la pratique humaine fondée sur des référents séculiers et non divins. Non plus déterminée par le respect d'un ordre transcendant, celle-ci met l'individu au centre en érigeant l'égalité en passion générale et dominante selon l'expression de Tocqueville. [...]
[...] Les débats théologiques sont donc stériles ce qui réduit considérablement le champ d'influence des fanatismes, premier pas vers la disparition des guerres religieuses. Ensuite, la foi est porteuse de morale au niveau individuel, donc garante de Justice au sein de la société. La mise en application de cette morale religieuse au droit régissant une cité ou un Etat couvrirait aussi bien les exigences du droit civil (résolution de litiges entre particuliers sur le principe d'équité) que du droit pénal (l'on pense par exemple aux fatwas musulmanes ou aux mesures de l'Inquisition chrétienne qui n'auraient plus lieu d'être et qui seraient durement sanctionnées). [...]
[...] Autrement dit, peu importe que les dogmes reposent sur une réalité tangible et vérifiable, pourvu qu'ils soient en accord avec l'imaginaire du croyant, de sorte qu'il puisse obéir à Dieu et donc accéder au salut en entretenant une parfaite cohérence entre son esprit et ses actes. L'expression sentiment de certitude prend alors tout son sens pour définir la foi. Elle ne peut être appréhendée qu'en dehors des limites du raisonnable. L'on retrouve une approche similaire de la foi chez Pascal qui en résume très bien l'enjeu : Voilà ce que c'est que la foi : Dieu sensible au cœur, non à la raison.» Néanmoins, la foi universelle de Spinoza n'est pas une croyance aveugle pour autant. [...]
[...] Traité théologico politique, Spinoza Dans son Traité des autorités politiques et théologiques, Spinoza s'intéresse à la question de la foi religieuse. Par une série d'implications successives, il met en lumière les mécanismes profonds de cette croyance particulière et semble répondre à la question qu'est-ce que la foi ? en écartant les spécificités de telle ou telle autre religion, c'est-à-dire en dégageant ce qui est essentiel et nécessaire dans la foi religieuse. Epurée, celle-ci conduit alors à une conception plus saine de la religion comprise comme le premier pas vers la paix civile. [...]
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