C'est à la fin du XVIe siècle, en 1576, que Jean Bodin, juriste et philosophe français, rédige "Les six livres de la République". Cet ouvrage fut longtemps considéré comme le "germe de L'Esprit des Lois", dans le sens où Bodin est un des premiers penseurs modernes de la souveraineté.
Sa théorie de la souveraineté a eu un impact très important, au XVIIe siècle notamment.
La spécificité de l'auteur vient du fait qu'il se pose en défenseur du pouvoir royal, à une époque où celui-ci est contesté à l'intérieur du royaume de France. Cette tendance à défendre l'absolutisme royal est très visible dans les chapitres I et VIII du Livre 1, extrait qui fera l'objet de l'analyse. L'objectif du texte est de "former la définition de la souveraineté", qui n'existe pas alors, bien qu'elle soit "le point principal, et le plus nécessaire d'être entendu au traité de la République."
[...] Pour montrer comment l'auteur défend l'absolutisme royal, revenons dans un premier temps sur l'origine unique de la puissance souveraine : pour Bodin, la souveraineté n'est réellement souveraine que si elle est unique. Les pouvoirs du souverain peuvent être délégués à des subalternes Lieutenant du Prince mais ceux-ci n'en sont que dépositaires ne l'exercent que sous forme de prêt ou de précaire Comme on l'a déjà souligné, la souveraineté n'est pas sécable, le souverain ne peut partager son pouvoir. En revanche, s'il délègue autorité à un subalterne, c'est toujours à travers lui que s'exprime cette autorité, et non à travers le subalterne. [...]
[...] B L'omniprésence de l'héritage antique Le système de Bodin est enfin bâti sur la tradition antique et sur la religion. On repère ces traits marquants dans les extraits dont on dispose, mais aussi et plus aisément dans la suite du chapitre 1 par exemple, lorsque l'auteur décrit que l'aboutissement suprême des individus ne peut se faire pleinement que lorsque, dans la République, ils peuvent se consacrer à la contemplation On voit ici l'influence très nette de penseurs comme Platon. Dans les extraits dont on dispose, s'il est précisé que la souveraineté est l'essence et la fin de la République, on ne sait pas en revanche d'où elle vient ni par qui le souverain l'a reçue : elle ne se justifie que par elle- même, se suffit à elle-même, et l'auteur fait en somme descendre ici-bas la volonté divine en installant dans la république cette souveraineté divine. [...]
[...] La souveraineté absolue de la République s'inspirerait donc en partie de celle de dieu : la théorie de Jean Bodin va donc dans le sens d'une souveraineté absolue et divine. - Perpétuelle La puissance souveraine n'est pas limitée dans son caractère absolu, ni dans sa temporalité, raison pour laquelle l'auteur nous parle de souveraineté perpétuelle Ainsi, on a ici la conception d'une souveraineté détachée d'une personne physique, du corps du souverain, mais rattachée à l'Etat lui-même, à la République. On peut aisément rapprocher cette vision d'une souveraineté perpétuelle à la théorie moderne dite des deux corps du roi développée en 1957 par Ernst Kantorowicz. [...]
[...] Conclusion Jean Bodin, dans les chapitres 1 et 8 du livre 1 des Six livres de la République, est un des premiers penseurs de son temps à s'intéresser à la question de la souveraineté au sein de la République, donnant ainsi plusieurs notions de l'Etat moderne : souveraineté, hiérarchisation, loi émanant du souverain et placée comme référence fondamentale dans la République Cependant, cette pensée est finalement fondée sur des schémas anciens, l'auteur faisant une apologie difficilement maquillée de l'absolutisme royal. Finalement, on a du mal à décrire Bodin comme un penseur essentiellement Moderne ou Ancien. Peut-être faut-il le qualifier de penseur de transition entre les périodes ancienne et moderne. Le contexte historique a sans aucun doute eu un rôle fondamental sur la pensée de Bodin, le texte révélant la rupture fondamentale qui s'opère au 16e siècle entre la modernité humaniste en plein essor, et la vision des Anciens ainsi que le système féodal qui s'effritent. [...]
[...] Enfin, en suivant la théorie de Bodin, on arrive à un Etat monopolisant le pouvoir politique, ce pouvoir politique étant a priori impersonnel, détaché d'une personne physique, et la souveraineté étant continue, perpétuelle Transition : La théorie de la souveraineté selon Jean Bodin a donc des aspects modernes. De plus, elle s'oppose apparemment aux Anciens sur certains points. B Une opposition apparente aux systèmes et théories existant jusqu'à présent - Retour sur le système féodal. L'auteur évoque une souveraineté absolue, n'émanant que d'un corps (même si le souverain n'est pas une personne unique). [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture