Alain Supiot est professeur agrégé des facultés de droit à l'Université de Nantes. Il est d'abord connu pour ses nombreuses publications en droit du travail et de la sécurité sociale. Mais cette spécialisation en droit social n'est pas sans liens avec ses travaux actuels, qui portent sur l'analyse des fondements juridiques du lien social et la dogmatique juridique, puisqu'il en tire de nombreux exemples et leçons des transformations à l'œuvre dans notre société contemporaine.
Depuis octobre 2001, il est membre de l'Institut Universitaire de France (chaire « Dogmatique juridique et lien social »). Il participe, en lien avec Pierre Legendre, au défrichage de la dimension anthropologique du droit et publie en 2005 « Homo juridicus, essai sur la fonction anthropologique du droit ».
[...] La nécessité d'une hétéronomie Sans remettre en cause l'apport du mouvement des Lumières. Supiot insiste sur Ta nécessité d'une hétéronomie. Cette hétéronomie, qui revêt plusieurs formes, est rendue nécessaire par la spécificité de l'homme : c'est un animal métaphysique La langue maternelle, première source du sens, est aussi la première des ressources dogmatiques indispensable à la constitution du sujet. La liberté qu'elle donne à chacun de penser et de s'exprimer comme il veut suppose que tous se soumettent aux limites qui donnent sens aux mots qu'elle contient. [...]
[...] Cependant, pour Coase, le droit est neutre, il doit se borner à instituer des règles de procédure qui permettront aux agents économiques rationnels d'arriver à une solution optimale par la transaction. Ce raisonnement s'inscrit dans la tendance actuelle d'un élargissement du domaine contractuel, et de la diminution de la fonction d'Interdit, tendance contre laquelle s'élève Supiot. Ainsi, le contrat, souvent signe d'autonomie, est fondé sur une hétéronomie, au moins quant à la forme, et, pour Supiot, impérativement quant au fond. [...]
[...] Quels procédés mettre en œuvre, quelles règles poser pour atteindre ce but ? Au nom de quoi va-t-il permettre ou interdire ? Pour Supiot, le droit est une technique d'humanisation de la technique. Il doit instituer la raison, éviter l'inhumanité, protéger l'humanité. C'est donc en termes de conséquences sur l'humanité que l'auteur de la règle de droit doit réfléchir. Et si cette question est si importante, c'est qu'un certain état du droit peut conduire les hommes à devenir fous ou violents, instaurer une société mortifère. [...]
[...] C'est cette même idée qu'il convient d'avancer contre la généralisation de la doctrine du Law and Economies En effet selon cette théorie la réponse à la question de savoir si une chose est permise ou interdit résulte d'un calcul coûts-avantages qui présuppose que toutes les choses puissent être évaluées en argent. La méthode d'analyse du Law and Économies ne peut donc, selon Supiot, devenir un principe de lecture de la vie humaine, sans risque pour l'humanité. Supiot refuse donc également que cette méthode permettre de dégager les lois générales du fonctionnement des pratiques sociales. [...]
[...] En outre, il ne s'agit parfois plus ici d'une simple liberté que l'homme exercerait sur lui-même, d'un rapport de soi à soi exclusif de toute intervention d'un tiers (Edelman) mais d'un rapport de droit qui fait entrer en jeu d'autres droits et libertés. Les débats sur l'euthanasie ou encore sur le sadomasochisme illustrent cette problématique. L'intérêt de cette problématique a été renouvelé par le développement des sciences et techniques qui .tant en droit du travail qu'en droit des personnes, a rendu possible ce qui ne l'était pas jusqu'alors. [...]
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