La démocratie est présentée par tous ses défenseurs comme le régime même de la liberté, de l'égalité et de la solidarité ; il suffit par exemple de se rappeler de la devise française mise en place au moment de la Révolution. Tocqueville, qui paradoxalement en est partisan, va dans son ouvrage De la démocratie en Amérique, montrer les dangers de ce mouvement d'égalisation, que notre démocratie est plus un état social poussant à l'individualisme que le bel état politique cru ; il montre également la diversité des sociétés en devenir.
Alexis Charles Clérel de Tocqueville, né à Paris en 1805, est issu d'une famille normande de très vieille noblesse, comptant dans ses rangs Malesherbes (avocat de Louis XVI), ce qui vaudra au père d'Alexis d'échapper de peu à la guillotine -ce qui donne à son fils une conscience précoce du danger des foules. Il restera donc attaché à des valeurs de l'ancien ordre social et sera toujours pour une démocratie censitaire et non au suffrage universel. En 1831-1832, il part aux Etats-Unis et à son retour, publie en 1835 De la démocratie en Amérique. Le retentissement énorme lui vaut d'être élu en 1838 à l'Académie des Sciences morales et politiques et à l'Académie Française en 1841. Parallèlement, il entame une carrière politique puisqu'il est élu député de la Manche en 1839 (poste qu'il gardera jusqu'en 1848), vice-président de l'Assemblée Nationale en 1849, puis ministre des Affaires Etrangères. En 1851, opposé au coup d'état de Louis Napoléon Bonaparte, il se retire de la vie politique. En 1856, il rédige L'Ancien Régime et la Révolution, resté sans suite car il meurt à Cannes en 1859.
Le propos de Tocqueville se veut plus une analyse sociologique sur l'articulation de l'état social vis-à-vis du régime politique et sur les effets de l'égalité des conditions dans nos sociétés modernes. Ainsi bien qu'il y ait une critique du socialisme, en vogue à cette période, il ne faudrait pas croire qu'il s'arrête à ça : utilisant la démarche d'idéal-type que WEBER théorisera plus tard, il veut démontrer un phénomène dans la perspective d'une théorie sous-jacente. Ainsi, le cas américain est parfaitement valable pour nos démocraties européennes. Il analyse donc comment une démocratie tolérée sans passion par des citoyens politiquement passifs peut conduire à une étatisme absolu et donc à un régime de type totalitaire (Hannah ARENDT). Nous verrons d'abord l'individualisme qu'entraînent les démocraties modernes, puis que la passion égalitaire tue l'aspiration à la liberté et enfin l'omniprésence de l'Etat.
[...] La seule manière d'éviter ce pouvoir immense et tutélaire sera, comme le sociologue l'analyse dans la suite de la Démocratie en Amérique, la création de contre-pouvoirs, de pouvoirs intermédiaires comme les associations pour éviter cette centralisation destructrice de liberté et l'investissement du citoyen dans la vie politique, en imaginant qu'il ait assez de force pour braver le vecteur d'individualisme. Ce texte est également intéressant dans le sens où il s'agit d'un des premiers textes de sociologie et qu'il nous montre l'intérêt d'une démarche de type idéalisante afin de comprendre un phénomène. Bibliographie Tocqueville, Jacques COHEN-HUTHER, Que sais-je ? [...]
[...] Ainsi bien qu'il y ait une critique du socialisme, en vogue à cette période, il ne faudrait pas croire qu'il s'arrête à ça : utilisant la démarche d'idéal- type que WEBER théorisera plus tard, il veut démontrer un phénomène dans la perspective d'une théorie sous-jacente. Ainsi, le cas américain est parfaitement valable pour nos démocraties européennes. Il analyse donc les comment une démocratie tolérée sans passion par des citoyens politiquement passifs peut conduire à un étatisme absolu et donc à un régime de type totalitaire (Hannah ARENDT). [...]
[...] En effet, égalisation et centralisation se renforcent mutuellement. Or, si nos démocraties modernes se caractérisent par ce vœu continu d'égalité, la centralisation de plus en plus absolue du pouvoir ne peut également qu'augmenter. Tous les pouvoirs intermédiaires ou contre-pouvoirs perdent de plus en plus en importance, jusqu'à disparaître complètement. Et cette centralisation acceptée conduit à un étatisme qui, laissé tel quel en devenir, peut aussi bien être une magistrature ou une dictature. Etatisme En effet, ce pouvoir veut être l'unique agent et le seul arbitre du bonheur de ces citoyens. [...]
[...] C'est ce paradoxe, présent dans nos sociétés démocratiques, que nous allons démontrer à présent. Uniformisation des masses Bien sûr, il y a toujours des inégalités entre les individus, mais la masse en elle-même s'homogénéise pour certaines conditions sociales ou idéologiques. De plus, l'inégalité réelle des conditions est dominée par une égalité de principe, un sentiment étendu d'égalité plus grand que l'égalité réelle, mais qui tend celle-ci à augmenter. Les masses, comme nous l'avons déjà évoqué, ne sont plus déterminées par leur naissance à être pauvre ou riche. [...]
[...] De plus, la structure économique de la société, le poids de l'administration due à la centralisation de l'état et donc l'augmentation des fonctionnaires. Les masses moyennes, qui ont donc augmenté, n'ont donc pas assez de biens pour en exciter l'envie mais suffisamment pour désirer l'ordre ; ils forment le plus grand nombre des citoyens et concourent activement à cette uniformisation. Démobilisation politique du citoyen En effet, le citoyen moyen, pris entre ces envies d'ordre et de jouissance immédiate sans douleur, se dépolitise car il est contre toutes les révolutions diverses qui ont tendance à remettre le droit de propriété en question. [...]
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