La démocratie prône la liberté et, a contrario, condamne la violence individuelle et aveugle. Pourtant, la démocratie n'utilise-t-elle pas la violence comme moyen politique d'assurer une fin, qui serait l'ordre public ? Où ce système fondé sur la 'monopolisation de la violence légitime' trouve-t-il, justement, sa source de légitimation ? Il semble que les démocraties aient à gérer un paradoxe puissant qui consisterait à rechercher à expulser la violence à l'extérieur du régime, tout en intériorisant un autre type de violence. Ainsi, la violence est, en démocratie, une réalité indéniable, qu'elle soit illégitime ou légitime, auquel cas elle constitue un moyen d'assurer l'ordre (I), mais paradoxalement, ce moyen s'oppose à la finalité de la démocratie qui est d'éradiquer, voire de sublimer toute violence (II)
[...] Les arbitrages faits ne sont pas neutres . Ils recèlent leur part de violence. La presse manipule les statistiques sur la violence pour illustrer ses titres. La presse à scandale, tel que Paris-Match par exemple, multiplie les images violentes, parfois même truquées ( 89 en Roumanie avec Caucescu Ce ne sont pas, en effet, les violences effectives ni le décompte objectif des dégâts et des pertes qui importent, mais ce qu'on en apprend, ce qu'on imagine, ce qu'on en voit ou veut en voir. [...]
[...] En outre, sont mis en place des organes de contrôle afin que cette séparation théorique ne soit pas bafouée dans les faits. L'indépendance des juges, le respect des procédures contradictoires, l'attachement à la loi, gardienne des libertés publiques, et à l'expression libre des suffrages, tels sont les piliers de la démocratie, destinés à détourner la violence. La transparence des actions et des procédures étatiques est aussi un moyen de combattre la violence née du secret, car détenir une information est un pouvoir sur les autres, qu'il convient de limiter. [...]
[...] Néanmoins, elle est consubstantielle à la société des hommes. C'est pourquoi les démocraties sont fragiles car elles doivent trouver en permanence les moyens de limiter la montée de la violence, car ce sont les principes mêmes de liberté et d'humanité qui pourraient être remis en cause. Pourtant, les institutions crées pour détourner la violence et l'utiliser dans des buts de survie, de progrès matériel et moral ou de création peuvent se révéler à leur tour potentiellement violentes. Mais, la démocratie s'attache à distinguer violence privée dont le destin est d'être condamnée et d'autre part violence collective qui serait jugée devant un autre tribunal, celui de l'histoire. [...]
[...] Athènes expérimente donc la démocratie et rejette la violence en dehors de la Ville. Néanmoins, sont exclus de cette démocratie les esclaves et les femmes qui n'ont pas droit de participer au fonctionnement de la Cité. Encore une fois on retrouve ce paradoxe où on expulse la violence de la Cité avant de créer un autre type de violence. D'ailleurs ce caractère varié de la violence est confirmé par l'arrivée des sophistes qui par leurs seules présences rétablissent l'inégalité. Par la rhétorique, l'art du discours, qu'ils enseignent les sophistes visent à séduire, à convaincre, peu importe le contenu seul compte les formes. [...]
[...] La conception libérale fait donc un pari sur la liberté. Pourtant, si l'on s'en remet à une conception strictement libérale, on constate que l'Etat préserve par son droit une situation de fait, qui est un état de violence. Défendu sur un point, le faible est opprimé sur les autres. A quoi lui sert d'être libre politiquement s'il est aliéné socialement, économiquement ? Quand il se révolte, on lui reproche son action violente comme si la violence d'action était pire que la violence d'Etat. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture