Il existe des pouvoirs violents, c'est un fait. Dans un régime dictatorial, le pouvoir du souverain est nécessairement violent dans la mesure ou les gouvernés subissent l'autorité sans pouvoir la contrôler, ni l'infléchir, ni la refuser. De même, celui qui est l'esclave d'un autre ne peut que subir la violence que son maître exerce sur lui en vertu de son pouvoir. La violence du pouvoir n'est-elle qu'accidentelle, due à la personnalité de ceux qui ont le pouvoir à tel moment ?
Est-ce l'exercice du pouvoir qui s'accompagne nécessairement de violence ou est-ce le fondement même de tout pouvoir qui inclut nécessairement une certaine violence ? La question qui se pose dès lors inévitablement est celle de la consubstantialité du pouvoir et de la violence : la violence participe-t-elle à la définition même du pouvoir ?
S'il n'est pas possible d'envisager un pouvoir sans violence, alors le projet démocratique est compromis dans la mesure ou il est vain d'envisager que les actes du pouvoir soient l'expression d'une volonté générale. La violence s'oppose en effet à la volonté, et la question est de savoir si l'on peut imaginer un pouvoir qui ne contraigne pas, un pouvoir qui n'aille contre aucune volonté.
[...] Pour ce faire, il faut bien que le pouvoir ait la possibilité d'exercer une certaine violence. Mais ce qui change avec le Contrat social, c'est la destination de cette violence. Elle ne vise plus l'étouffement des libertés considérées comme dangereuses mais, au contraire, elle cherche à renforcer la liberté. En incitant les citoyens à ne se comporter qu'en fonction de l'intérêt général, Rousseau fait du pouvoir l'expression de la volonté générale et de sa force à contraindre, une manière de forcer les citoyens à être libres La séparation des pouvoirs Si le pouvoir est à même d'exercer une violence, c'est très souvent parce qu'il ne connaît pas d'opposition digne de ce nom. [...]
[...] Le pouvoir se présente ainsi comme rationalisation de la violence. La prise du pouvoir: l'acte révolutionnaire Enfin, outre les violences que constituent la privation de liberté d'une part et la nécessité de la répression d'autre part, il faut encore ajouter une forme de violence inhérente au pouvoir. Tout pouvoir a une histoire, toute mise en place d'un pouvoir est en même temps la destitution d'une autre forme de pouvoir. C'est en cela que consiste une révolution. Outre la violence des faits et des événements qui ont eu cours après 1789 en France (et on pourrait ici se référer à la Terreur comme moyen d'asseoir un pouvoir), il apparaît que la prise de pouvoir constitue en elle-même une forme de violence dans la mesure ou elle consiste en la destruction d'un pouvoir antérieur, en la négation de la légitimité du pouvoir précédent. [...]
[...] Pour réfléchir à l'absence de tout pouvoir, il faut avoir recours à la fiction de l'état de nature. Il s'agit en effet d'une fiction dans la mesure ou les hommes ne se sont certainement jamais retrouvés dans une telle situation au cours de leur histoire; cependant, imaginer un tel état permet d'envisager l'absence du pouvoir pour mieux en comprendre l'établissement et la teneur. L'état de nature désigne la Coprésence d'individus sans règles de droit organisant les comportements réciproques. Que se passe-t-il dans l'état de nature? [...]
[...] En suivant par analogie les propos de Kant sur la loi morale dans Critique de la raison pratique, on pourrait dire que la démocratie correspond ainsi à la volonté de faire que la possibilité de la contrainte que possède le pouvoir se mue en obligation. Comme on l'a vu, la thématique du contrat social, la séparation de pouvoirs et l'invention démocratique sont en quelque sorte des tentatives de réduction de la violence du pouvoir. Tout cela ne semble que des moyens de réduire la violence du pouvoir sur l'individu. [...]
[...] Considérant que le pouvoir désigne avant tout l'aptitude de l'homme à agir de façon concertée elle explique que, sauf à la confondre avec la puissance, le pouvoir ne peut en aucun cas être une propriété individuelle S'il faut prendre acte de cette définition, alors il faut dire que ce que nous avons pris pour des tentatives de réduction de la violence du pouvoir n'est autre qu'un essai de transformation de la puissance en pouvoir. Le pouvoir désignerait ainsi avant tout une capacité, une possibilité d'agir. [...]
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