La pensée chrétienne contribue largement au renouveau des idées politiques à la fin de l'Antiquité et au Moyen-âge. Elle rompt sur beaucoup de points avec la pensée antique. Le Christianisme marque d'abord l'avènement d'un individualisme radical. L'homme est créé à l'image de Dieu et a donc une vocation qui dépasse l'horizon de la Cité. En outre, la pensée chrétienne affirme l'égalité naturelle des hommes due à leur unique et même origine. Dès lors, cette égalité fonde l'idée d'une communauté universelle. Par ailleurs, dans la continuité du judaïsme, les premiers penseurs chrétiens reconnaissent que toute autorité vient de Dieu et qu'elle fonde l'existence du pouvoir politique. Cette apparente contradiction entre un individualisme radical et une conception ministérielle du pouvoir va conduire les Pères de l'Eglise à distinguer pouvoir spirituel et pouvoir temporel. Cette vision est totalement novatrice en ce qu'elle rompt avec la conception totalisante du pouvoir politique. St Augustin va largement contribuer à l'idée de la séparation des deux pouvoirs. Pour autant, l'usage qui va être fait de sa pensée au Moyen-âge va au contraire servir de justification pour affirmer l'emprise du pouvoir spirituel sur le pouvoir théologique, ce que l'on a appelé l'augustinisme politique.
Dans quelle mesure l'augustinisme politique est-il l'héritage de la pensée augustinienne ?
[...] En ce sens, le règne de Néron est plus enviable que l'absence de pouvoir politique. L'ordre politique permet de ne pas sombrer dans la violence extrême. Il fonde ainsi la légitimité du pouvoir politique, même tyrannique. Le second élément essentiel de la pensée de St Augustin est la dichotomie qu'il établit entre la Cité des hommes et la Cité de Dieu. Il faut voir ici l'influence du contexte historique. Le sac de Rome par Alaric en 410 marque la fin d'une civilisation. [...]
[...] Tout pouvoir venant de Dieu, il faut se soumettre aux princes, même les plus tyranniques. Mais dans la sphère de la foi et de notre vocation au Royaume de Dieu, il faut nous garder d'obéir à tout homme qui chercherait à détruire en nous la grâce que Dieu a daigné nous accorder pour obtenir la vie éternelle Il faut donc rechercher un juste équilibre entre les deux pouvoirs, celui prescrit par Jésus dans le Nouveau Testament : Rendre à César ce qui appartient à César, et à Dieu ce qui est à Dieu (Matth., XXII, 21).Ainsi, tant que nous sommes dans cette vie, nous devons respecter, par une attitude exempte de toute dissimulation l'ordre établi par Dieu pour les choses humaines ; et en cela nous obéissons moins aux hommes qu'à Dieu La pensée de St Augustin n'est pas exempte d'une certaine ambiguïté. [...]
[...] À la fin du VIe siècle, l'Empire romain d'occident a disparu et l'Église ne connaît plus la menace d'un centre politique. Il s'adresse ainsi au Basileus : "Le pouvoir a été donné d'en haut à mes seigneurs sur tous les hommes, pour aider ceux qui veulent faire le bien, pour ouvrir plus largement la voie qui mène au ciel, pour que le royaume terrestre soit au service du royaume des cieux. " L'Etat doit donc se subordonner aux fins de la cité céleste, et par conséquent à celles de l'Église. [...]
[...] Il affirme la primauté du pape qui détient les deux glaives parce qu'il est au dessus des royaumes et des nations Le pape a donc le droit d'intervenir dans les affaires temporelles, notamment en déposant les princes qui se sont rendus indignes de leur mission. Le pape possède à la fois les droits de l'empire terrestre et ceux de l'empire céleste Cette théorie s'imposera en particulier avec les papes Innocent III, Grégoire IX, Innocent IV, Boniface VIII. Considérer St Augustin comme le père de l'augustinisme politique est donc hautement contestable. Si sa pensée n'est pas dénuée de certaines ambiguïtés, il reste que le corps de sa doctrine est l'affirmation d'une séparation entre le théologique et le politique qui sont tous deux légitimés. [...]
[...] St Augustin montre d'abord la nécessité du pouvoir politique comme régulateur social. Ce principe va d'ailleurs marquer toute la pensée politique du Moyen-âge. Les hommes étant créés par Dieu à son image, ils sont naturellement égaux. A l'origine, avant le péché originel, les hommes n'avaient d'autorité que sur les animaux, et étaient placés sous l'autorité paternelle de Dieu. C'est précisément le péché originel qui a conduit à la nécessité d'une domination politique. L'homme, partagé entre les tentations de la chair et la bonne volonté de son âme est voué à la volonté de puissance, la libido dominandi, ce désir de dominer évoqué par saint Augustin, qui le pousse à la guerre, à la violence. [...]
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