Cet extrait n'est nullement dépourvu d'ambiguïtés ou d'équivoques, lesquelles peuvent conduire à des interprétations extrêmement différentes. La conceptualisation et la clarification doivent tenir compte de la langue du XVIIIe siècle.
L'état de nature, c'est l'état de l'homme quand on lui enlève, par hypothèse imaginaire, ce que la société lui a apporté, en particulier les liens sociaux. L'état civil : c'est l'état de société, la vie en commun. Mais ce peut être aussi l'état de droit résultant du contrat. La moralité, c'est la connaissance des notions du bien et du mal et de leurs conséquences dans le comportement. L'appétit désigne ici le simple désir sans limites.
L'idée générale du texte se dégage facilement malgré les ambiguïtés : dans l'état civil, l'homme acquiert la moralité et y gagne une transformation spirituelle totale. Il faut remarquer le balancement entre deux formes d'existence, l'une immédiate et naturelle, l'autre acquise, fruit de la société. Ce balancement rhétorique permet de bien dégager l'idée directrice.
Qu'en est-il de la structure du texte ? Dans une toute première partie, Rousseau s'attache aux notions morales et au devoir, alors que, dans la seconde, il étudie une transformation plus globale et plus générale.
Ainsi arrivons-nous à deux parties. Ce passage....ses penchants » : justice, moralité, droit et devoir commencent avec la vie sociale. « Quoiqu'il se prive....un homme » : de même, s'effectue une transformation spirituelle totale.
Quel est le problème posé par le texte ? Celui de savoir quels avantages procure le contrat social légitime, l'état de droit résultant du contrat.
[...] Mais comment s'opère exactement ce passage à l'ordre éthique ? Le balancement rhétorique se poursuit dans cette seconde sous-partie. La voix du devoir, la saisie des valeurs du bien et du mal, les évaluations morales - on songe ici à la céleste voix de la conscience morale dont il est question dans la Profession de foi du Vicaire savoyard-, succède à la simple impulsion physique, à la poussée et à l'élan issus du corps, et le droit, ce qui est légitime et doit être, se substitue à l'appétit, conçu comme simple désir sans limites. [...]
[...] La seconde prolonge et étend les analyses de la première partie. Elle va de Quoiqu'il se prive jusqu'à un homme Elle donne à voir la transformation spirituelle globale, fruit du passage de l'état de nature à l'état civil. Commentaire La première partie est, elle-même, très progressive. Il est pratiquement possible de la diviser en deux sous parties. La première est descriptive et se borne à montrer la réalité elle-même du passage, dans l'ordre de la moralité Ce passage . auparavant). La seconde C'est alors . [...]
[...] Que de contresens ont déformé la pensée de Jean-Jacques. Ainsi, en 1755, Voltaire écrivit à Rousseau (il s'agissait de la réception du Second Discours) : J'ai reçu, Monsieur, votre nouveau livre contre le genre humain . Il prend envie de marcher à quatre pattes quand on lit votre ouvrage. Cependant, comme il y a plus de soixante ans que j'en ai perdu l'habitude, je sens malheureusement qu'il m'est impossible de la reprendre . Les critiques de ce genre ont fleuri. [...]
[...] Le pacte de sociabilité permet de perdre les défauts de la liberté, les propriétés négatives de cette liberté, pour acquérir les propriétés positives et les qualités de la vraie liberté, qui est autonomie. Ainsi, une manière d'être limitée et précaire est échangée contre des institutions créant la liberté positive. Le problème posé était celui de savoir quels avantages apporte l'état civil. Il substitue le règne du Droit et de l'Autonomie à celui du caprice aveugle et arbitraire. Chez Rousseau, comme chez bien d'autres penseurs, la liberté vraie est une compréhension réfléchie et rationnelle, une acquisition. On ne naît pas libre, mais on le devient. [...]
[...] Il représente une transition vers une vie en commun, certes, une vie sociale, mais une vie sociale d'une espèce toute particulière. Il faut savoir que, dans les chapitres précédents, Jean- Jacques a décrit le vrai contrat et le pacte social légitime, où l'union entre les individus est aussi parfaite que possible. Ce passage, dont parle ici Rousseau, est donc tout à fait particulier. L'auteur a défini auparavant la nature du pacte social légitime et c'est ce passage de l'état naturel à un état de droit qu'il faut ici bien saisir. [...]
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