L'ouvrage soumis à notre étude est le second Traité du gouvernement civil, publié par John Locke en 1690. Après un premier traité destiné à dénoncer la position de Robert Filmer, défenseur de la monarchie absolue de droit divin, le second traité correspond au développement de la propre conception politique de Locke, selon une théorie du contrat social : il s'agit de remplacer le droit divin par le pacte social et d'enraciner l'autorité de l'Etat dans un nouveau principe, celui d'une libre association des hommes, pour une constitution civile qui s'inscrive dans le prolongement de l'état de nature. La philosophie politique de Locke s'attache à répondre à la question suivante : comment les hommes peuvent-ils vivre ensemble en paix ? Comment les concepts de nature et de politique peuvent-ils être liés ? Le mot « nature » vient du verbe latin « nascor », « naître ». Dès lors, la nature désigne tout ce qui est inné, spontané et biologique, tout ce qui correspond à l'état dans lequel naissent les hommes, par opposition à ce qui est acquis. Mais ce mot est polysémique : il désigne également tout ce qui est en-dehors du monde humanisé, politisé, cette réalité extérieure à la culture. D'où la difficulté à lier le terme « nature » à celui de « politique ». En effet, le concept de politique englobe l'art de gouverner l'Etat ou la cité, ainsi que la légitimité qui découle de cette autorité. C'est à l'analyse de ce fondement légitime que s'attache le droit politique. Locke s'établit comme le penseur d'une politique dont la finalité se situe dans le bonheur public. Cependant, cette conception d'une compatibilité possible entre nature et politique est-elle vraiment pensable ? De prime abord, les concepts de nature et de politique semblent fondamentalement antithétiques puisqu'ils désignent deux états opposés de la vie humaine. Dès lors, quelles sont les relations existant entre l'état de nature et l'état de société civile ? La société est-elle l'affirmation et la continuation d'un ordre naturel, ou bien constitue-t-elle la rupture avec l'état de nature ? L'ordre social est-il naturel ou institué ? Pourquoi les hommes ressentent-ils le besoin d'un Etat, de lois et de magistrats ? En d'autres termes, le problème que pose l'auteur du Traité du gouvernement civil est de savoir comment il est possible d'envisager le passage d'un état de nature égalitaire et libre, à un état de société politique où l'acceptation d'une autorité supérieure aurait été choisie sciemment et librement.
[...] Cependant, cette conception d'une compatibilité possible entre nature et politique est-elle vraiment pensable ? De prime abord, les concepts de nature et de politique semblent fondamentalement antithétiques puisqu'ils désignent deux états opposés de la vie humaine. Dès lors, quelles sont les relations existant entre l'état de nature et l'état de société civile ? La société est-elle l'affirmation et la continuation d'un ordre naturel, ou bien constitue-t-elle la rupture avec l'état de nature ? L'ordre social est-il naturel ou institué ? [...]
[...] [ ] C'est pourquoi il faut reconnaître que ces deux pouvoirs, le politique et le paternel, sont véritablement distincts et séparés, sont fondés sur différentes bases, et ont des fins différentes (Chapitre VI-71). La question qui demeure, toutefois, est celle de savoir comment, par quels moyens, le pouvoir du souverain est limité, si ce n'est par le contrat qu'il a établi avec le peuple et sa responsabilité morale envers Dieu qu'il a de mener à bien son gouvernement. Locke est partisan de la théorie de la séparation des pouvoirs. [...]
[...] Dès lors, quelle forme de gouvernement serait la meilleure ? Quel est le fonctionnement des sociétés civiles ? Locke ne préconise pas d'avoir recours à un gouvernement en particulier plutôt qu'à un autre. Pour Locke, l'essentiel consiste en une séparation de l'autorité souveraine. La question qui nous anime est ici de savoir comment envisager un gouvernement politique qui soit toujours en accord avec l'état de nature et le droit naturel. En effet, dès l'origine de la formation des sociétés civiles, comment penser que les hommes aient pu volontairement se mettre sous le joug d'une autorité supérieure s'ils pensaient que cette soumission compromettrait les droits qui leur étaient accordés par la nature ? [...]
[...] En effet, chaque homme est directement et individuellement responsable devant Dieu de ce qu'il fait et de ce qu'il croit. Ainsi, l'état de nature originel est le règne de la liberté individuelle : les hommes sont les maîtres absolus d'eux-mêmes, ne sont les sujets de personne. Pour Locke, c'est un état de parfaite liberté [ Cet état est aussi un état d'égalité ; en sorte que tout pouvoir et toute juridiction est réciproque, un homme n'en ayant pas plus qu'un autre (Chapitre I-4). [...]
[...] Mais Locke n'assimile cependant pas le modèle du pouvoir des parents au fonctionnement concret des sociétés civiles. Toute la théorie de Locke quant aux relations qui existent entre l'autorité paternelle et l'autorité politique est développée au long des Chapitres VI et VII de l'ouvrage. La vision de l'auteur se différencie fortement de celle que nous expose Robert Filmer dans son De Patriarcha. En effet, pour ce dernier, le modèle des sociétés naturelles dans lesquelles le pouvoir des pères est une nécessité et un pouvoir illimité, est à l'origine du pouvoir des Princes dans les sociétés civiles. [...]
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