« Rien de plus connu que le despotisme éclairé » dit François Bluche dans Le despotisme éclairé. En effet, mais sait-on exactement de quoi il s'agit ? On pourrait le définir comme un régime nouveau, une tentative politique d'application des idées des Lumières qui traversa l'Europe pendant un demi-siècle de 1750 à 1790 environ. Le plus intéressant semble pourtant de l'étudier à travers le prisme d'une comparaison avec l'autre grande forme de pouvoir du XVIIIe siècle : l'absolutisme. On peut s'interroger sur leurs interactions. Très vite, un constat s'impose. Le despotisme éclairé et la monarchie absolue semblent avoir autant de points de rapprochement que de différences.
Comment expliquer le paradoxe qui lie ces deux régimes intimement semblables et pourtant intrinsèquement différents ? Quelles conséquences sur les rapports de force politiques dans l'Europe du XVIIIe cela a-t-il pu avoir ?
[...] Cette raison doit être au centre de tout, au cœur des projets que l'on forme pour l'Etat. Seule la raison donc permet le bien public. - Le souverain doit rester absolu pour pouvoir porter, au nom de la raison, tout ce qui peut faire le bien commun. Sa légitimité est cependant d'une autre nature : le despote éclairé est au service d'un idéal plus grand que lui : l'Etat. Face à l'Etat, c'est moi qu'on attribue à Louis XIV ; on peut mettre le Il n'est pas important que je vive, seul importe que je fasse mon devoir de Frédéric II. [...]
[...] Le despotisme éclairé, une expérience transitoire ? - Preuve peut-être de la très intime relation que despotisme éclairé et monarchie absolue entretiennent entre eux : leur chute est commune. Plus exactement, quand la monarchie absolue administrative française est renversée en 1789, le despotisme éclairé s'arrête aussi. Jean Meyer le dit ainsi : désormais, le sort des despotismes éclairés est réglé : la Révolution française déclare la guerre à tous les princes. L'avenir est désormais à la force. Face à une France prônant la disparition des rois [ ] les despotes, éclairés ou non, n'ont plus que la seule ressource de combattre. [...]
[...] La suprématie territoriale du despotisme éclairé en Europe. - Les Lumières diffusent tout au long du XVIIIe siècle et cela se traduit par une importance de plus en plus grande des despotismes éclairés en Europe. Bien plus que sous celui des grandes monarchies classiques, les puissances orientales et méditerranéennes sont de plus en plus sous le joug du despotisme éclairé dit Cottret. A son apogée territoriale, on compte jusqu'à 12 Etats ou régions (Prusse, Autriche, Russie, Espagne) en Europe qui sont ou s'apparentent à des despotismes éclairés. [...]
[...] Dans la très grande diversité des despotismes éclairés -qui imitent à plus ou moins grande échelle l'absolutisme-, la raison d'Etat est un dénominateur commun. Par exemple, la laïcisation du pouvoir du souverain est inégale entre la Prusse où Frédéric II a abandonné le droit divin et l'Espagne où Charles III le conserve. Pourtant, ils se rejoignent sur leur vision commune de l'Etat. - Cette raison d'Etat laisse libre cours à des pratiques qui vont parfois loin et à l'encontre de la philosophie des Lumières, en se rapprochant des méthodes plus autoritaires des monarchies traditionnelles et des absolutismes. [...]
[...] - Pourtant, dans la compétition (Meyer) que se sont livrés Absolutisme et Despotisme éclairé, l'absolutisme semble finalement gagner. En effet, en 1790, la tendance générale en Europe est celle d'un abandon des idées et des réformes éclairées qui avaient fait l'identité du despotisme éclairé. Prenons cet exemple de Fanny Cosandey : Léopold II a effectivement sauvé une situation [ ] insolvable. Mais c'est en abandonnant presque totalement, du moins en Belgique et en Hongrie, toutes les réformes éclairées. Si les idées éclairées sont abandonnées, le despotisme demeure pourtant. [...]
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