De La Liberté des Anciens comparée à la liberté des Modernes, Benjamin Constant 1819, Révolution française, Terreur, modernité, Thomas Hobbes, représentation politique, État moderne, liberté politique, liberté civile, Premier Empire, oppression politique, commentaire de texte
Benjamin Constant compte sans doute parmi les meilleurs observateurs de la révolution libérale et de la modernité émergente. Il hérite d'une société bouleversée par la Révolution française dont il méditera longtemps les apports et les conséquences terribles. Très critique de la Terreur qu'il condamnera sans hésitation, il n'en cherche pas moins les causes qu'il identifie en grande partie dans la mécompréhension des spécificités de la modernité. Selon lui, la grande erreur aura été de croire que la liberté des anciens pouvait s'appliquer à la modernité. Cette confusion devient une question fondamentale pour B. Constant à laquelle il consacrera un discours à l'Athénée royal de Paris en 1819 intitulé "De La liberté des Anciens comparée à celle des Modernes".
[...] Aussi, dans une optique réaliste, l'influence individuelle fondue dans la multitude d'influences est certes proche du néant. Néanmoins, en 1819, B. Constant comprend qu'on ne peut tourner le dos aux affaires publiques quand bien même notre influence individuelle serait nulle. L'histoire de France a démontré avec le règne de Napoléon Bonaparte que l'absentéisme, l'enfermement sur sa sphère de liberté individuelle peut servir les intérêts des tyrans et des oppresseurs. En effet, B. Constant a été lui-même contraint à l'exil sous l'Empire, et une grande partie des conclusions de ce discours est imprégnée de son expérience politique. [...]
[...] Pour autant, on ne saurait se passer de l'engagement des citoyens pour assurer à tous la tranquillité d'esprit propice aux entreprises privées et au bonheur. En cela, il semble qu'Isaiah Berlin avait tort de faire de B. Constant un chantre de la liberté négative. On le sait, I. Berlin explique dans le discours Two Concepts of Liberty qu'il existe une liberté négative, la liberté de ne pas être empêché, et la liberté positive, la liberté comme autodétermination. S. Holmes note que, outre le fait que B. [...]
[...] Il y formulait une critique acerbe de la liberté dans les Républiques antiques. Or, le problème que pose notre extrait est différent ici. Si B. Constant s'est appliqué à bien distinguer la liberté des Modernes de la liberté des Anciens en montrant que « nous ne pouvons plus jour de la liberté des Anciens », il conclut pourtant en expliquant qu'il est nécessaire d'apprendre à combiner ces deux espèces de liberté, l'une avec l'autre. Qu'est-ce que B. Constant veut-il dire lorsqu'il prétend que nous devrions combiner la liberté de participer activement et directement au pouvoir et la représentation politique ? [...]
[...] Le rôle de l'État La seconde partie de la conclusion du discours de B. Constant introduit la tension entre la limitation de l'influence de l'Etat dans la vie privée des citoyens que défend le libéralisme et la nécessité pour lui de parachever « l'éducation morale des citoyens. » Les adjectifs « tranquille » et « content » pourraient nous induire en erreur. En effet, le législateur doit rendre le peuple tranquille, mais de quelle tranquillité s'agit-il ? Faut-il que le législateur s'occupe du bonheur de ses citoyens ? [...]
[...] Sans liberté politique, c'est la liberté civile qui demeure menacée. Dans une version antérieure du discours (1798), B. Constant expliquait que « l'exercice perpétuel des droits politiques » et « la discussion journalière des affaires d'État » « n'offraient que trouble et fatigue ». Or note S. Holmes dans Benjamin Constant et la genèse du libéralisme moderne[1], vers 1819, la conclusion qu'offre B. Constant est toute différente. L'expérience napoléonienne et l'oppression politique ont pour conséquence ce changement de cap. Pour B. Constant, le repli sur la sphère privée devient un danger ; les citoyens ne comprennent pas que l'indifférence à l'égard de la chose publique favorise à long terme l'oppression politique. [...]
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