Quels sont les effets de l'exercice du pouvoir étatique sur la liberté du corps social ?
A priori, la réponse est une alternative. Soit il garantit notre liberté, c'est-à-dire protège de façon durable la liberté des citoyens, de tous et de chacun (« notre », pluriel, suggère une dimension collective). Soit il nous aliène, et, au contraire, nous rend étrangers à nous-mêmes par les finalités ou moyens de réalisation de celles-ci qu'il impose à la communauté. L'alternative semble même radicale (« ou ») : si on garantit quelque chose, on ne peut l'aliéner : je ne peux préserver en rendant quelque chose étranger à soi-même. L'Etat est donc à première vue soit le garant de notre liberté soit l'instrument de nos aliénations.
Alors, le pouvoir de l'Etat est-il compatible avec la liberté des citoyens ?
La première réponse est de dire que l'Etat est une structure qui nous fait sortir grâce à un contrat de l'état de nature ; sans lui, pas de paix ou de sécurité et donc de liberté. Par le contrat, l'Etat mettrait fin à l'aliénation des hommes à l'état de nature (choc des libertés naturelles) et leur offrirait un cadre de vie social et politique pacifique, garant de la liberté sociale. On passe grâce à l'Etat d'une liberté naturelle qui n'en est pas vraiment une à la liberté sociale.
Mais cette première thèse suscite des interrogations. Pour imposer la paix et créer la liberté sociale, l'Etat a besoin de pouvoir. Or la mise en place de ce pouvoir, créé par le contrat, implique pour les contractants d'abdiquer une part de leur liberté. Et s'il vise à créer un espace de liberté, ce pouvoir peut aussi, et justement parce qu'il est suffisamment fort pour assurer la paix, se faire oppresseur et menacer notre indépendance.
Il faut donc se demander à quelle condition le pouvoir de l'Etat peut s'exercer sur les citoyens sans attenter à leur liberté, sans les aliéner. Autrement dit : à quelles conditions l'Etat, aliénateur de notre liberté naturelle, peut-il instaurer et garantir la liberté civile sans faire un exercice liberticide de son pouvoir?
[...] Enfin, Rousseau fait remarquer que renoncer à sa liberté, c'est renoncer à sa qualité d'homme Abdiquer sa liberté sous réserve que l'Etat la protège est une illusion : on ne peut échanger sa liberté contre sa sécurité, car renoncer à son autonomie c'est renoncer à tout. Une fois ma liberté cédée, je ne puis réclamer la protection contre la liberté d'autrui : en effet rien ne compense la perte de la liberté, surtout lorsqu'elle arme un souverain tout-puissant. (Le contrat de Hobbes, en plus d'être illégitime, est donc impraticable. [...]
[...] A première vue, l'Etat est garant de notre liberté parce qu'il met fin à l'aliénation par l'excès de liberté naturelle qui caractérise l'état de nature et garantit une forme supérieure, sociale, de liberté Pour montrer dans un premier temps que l'Etat garantit une certaine forme de liberté, il suffit de se représenter l'état de la société sans Etat, et de la rapporter à celle de la société dans laquelle l'Etat est instauré La fiction de l'état de nature montre que sans Etat, l'excès de liberté aliène les Hommes L'état de nature est cette fiction qui raconte la vie de l'homme et les relations de pouvoir existant avant l'Etat. Dans cet état des choses, la guerre de tous contre tous est inévitable. Cette guerre s'instaure en 3 étapes. Son postulat est que les hommes sont tous fondamentalement égaux. [...]
[...] L'aliénation, en effet, ne s'oppose à la liberté que si on assimile cette dernière à l'indépendance. Or, la liberté n'est pas assurée en l'absence de pouvoir (indépendance), mais en la présence d'un pouvoir librement consenti auquel je m'engage à me soumettre (autonomie). L'Etat peut donc garantir ma liberté en me faisant passer un contrat fondant le pouvoir, mais à condition qu'il respecte la souveraineté populaire (soumission de tous au contrat) et les droits fondamentaux : il faut donc qu'il prenne la forme de l'Etat de droit. [...]
[...] En premier lieu, dit Tocqueville, la justice forme la borne du droit de chaque peuple Il est donc permis aux citoyens de désobéir à la loi, à la condition qu'elle soit injuste. Je crois donc qu'il faut toujours placer quelque part un pouvoir social supérieur à tous les autres (Etat) mais je crois la liberté en péril lorsque ce pouvoir ne trouve devant lui aucun obstacle qui puisse retenir sa marche et lui donner le temps de se modérer lui-même Il ne s'agit pas de contester le contrat social mais de mettre en place des conditions de modération du pouvoir instauré. [...]
[...] Par là, l'homme décide de limiter sa liberté à condition que les autres fassent de même. Ce contrat consiste pour chacun à se délivrer de son droit naturel illimité et à le confier au Léviathan, le souverain, la multitude assemblée en une personne, afin qu'il décide de la loi et fixe ainsi une ligne de partage entre ce qui est permis et ce qui est défendu. On limite la liberté naturelle (celle de faire tout ce qui nous plaît), et partant on instaure la sécurité par la loi ; la liberté sociale succède à celle naturelle. [...]
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