Par l'«insociable sociabilité» inhérente à l'essence humaine, le mortel est un «animal politique»: en tant qu'homme altruiste il ne peut vivre et s'épanouir qu'au milieu de ses semblables, mais en tant qu'animal égoïste il ne peut renoncer à la satisfaction de ses propres désirs. Afin que les conflits d'intérêts se règlent autrement que par la violence, nous avons besoin de politique, comme art de vivre ensemble en société dans une même polis avec des gens anonymes que l'on a pas choisi, rivaux plus qu'alliés; afin d'échapper à la peur la barbarie la guerre, nous avons besoin d'un Etat, système d'institutions solidaires (politique, militaire, juridique, économique, administratif) organisant la vie d'une société.
[...] L'«homme artificiel» exerce un pouvoir absolument illimité Léviathan est un monstre biblique invincible-, tient les hommes en respect, et assure par le glaive la sécurité de chaque membre (protection, propriété privée), l'ordre interne (police répressive contre la révolte, justice contre la transgression du droit) et la paix extérieure (force militaire contre les agressions), et le bien-être de la communauté (contentement, possibilité de réalisation des projets sans nuisance d'autrui). Les sujets profitant de la liberté corporelle sont maîtres de leur vie et peuvent faire tout ce qui n'est pas interdit par la loi; mais ils doivent surtout obéir aux commandements du civitas et ce cadre dresse des barrières, des chaînes artificielles à la liberté (jugement moral condamné). [...]
[...] De plus, l'État de droit s'accompagne paradoxalement d'inégalités liées au travail et aux capacités. La confiscation du pouvoir par une minorité de députés élus, représentants prétendus du peuple dessaisi du pouvoir délégué aux parlementaires, et la démagogie sont des risques propres à la démocratie qui ne convient peut-être pas à des hommes car le peuple n'est pas assez vertueux (courage, vigilance, force, constance) ni philosophe. Rigoureusement définie, la force de l'Etat conditionne et garantit la liberté effective de tous les citoyens, la jouissance de droits civils et politiques (égalité devant éducation) et sociaux (sécurité sociale, minimum de ressources). [...]
[...] Dans un Etat libre, le respect des lois mais également la séparation des pouvoirs sont indispensables et indissociables: l'Etat constitutionnel de droit est inclus mais non identifié à l'Etat libre qui s'oppose aux régimes totalitaire, absolutiste, dictatorial, tyrannique, esclavagiste; peut-il se confondre avec la monarchie constitutionnelle, l'aristocratie légitime, la république démocratique? L'Etat légitime a pour finalité son origine: la liberté est sa «raison d'être» et non l'autorité; pourtant la démocratie est un idéal à conquérir sans cesse. À l'état de nature, l'homme est un animal stupide et borné supportant la loi du plus fort, soumis au droit à l'Appétit (impulsion, penchants) et au droit du premier occupant (possession). [...]
[...] L'Etat condition nécessaire de la vie, du respect des personnes, de la liberté, part à la conquête de l'idéal d'un homme- Dieu: la démocratie. L'«homme unique aux multiples pieds» a pour vocation la liberté réelle et non idéelle ou plutôt idéale: la véritable liberté est la participation politique comme acteur (législateur) direct ou indirect (sujet) afin de réaliser la démocratie, meilleur des régimes possibles mais extrêmement vulnérable (technocratie, apolitisme, favoritisme L'Etat s'incarne dans les citoyens et prend vie de leur autonomie, de leur fidélité au texte, de leur capacité à obéir aux lois; d'où l'importance de l'éducation du citoyen, à la fois comme sujet moral et de Droit et être conscient de sa responsabilité et libre de sa pensée, car le meilleur gouvernement est celui de a raison. [...]
[...] La tension entre ces deux notions introduit le paradoxe de l'Etat libre; l'enjeu de notre réflexion est de résoudre ce problème: la force de l'Etat est-elle nécessaire à la liberté des citoyens ou y fait-elle obstacle? En d'autres termes, l'Etat est-il l'ennemi de la liberté? Doit-il s'effacer devant l'initiative individuelle ou doit-il intervenir pour garantir la justice sociale? Comment le «monstre froid» peut-il devenir un «Etat libre»? Comment mettre la force au service du droit de manière à fonder le droit au moyen de la force? [...]
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