L'Etat est un concept juridique et politique impliquant la continuité. Mais un Etat implique également une idéologie, par exemple libérale ou marxiste. Or la révolution est l'antithèse de l'Etat car elle suppose une rupture. On peut dire sous forme de synthèse qu'une révolution repose sur une idéologie et qu'elle institue un nouvel Etat lui-même reposant sur cette dernière.
La révolution est un concept marqué par une contradiction entre son étymologie et son usage actuel. Il y a même une ambiguïté fondamentale. Sur le plan sémantique la révolution implique une différence alors qu'étymologiquement, elle serait une réitération de ce qui a été et une prévision de ce qui sera. Elle est la reprise d'un jadis et l'ouverture d'un avenir.
Quand on se situe dans un cadre de progrès général, tout changement prétend être une révolution ; alors, comment distinguer ?
[...] Le contrat social théorise un projet révolutionnaire de manière spéculative. Le sage MABLY insiste sur une longue fermentation d'événements et de passions. Il est possible d'admettre que la révolution est faite dans les esprits longtemps avant les événements. Mais il n'y a pas eu de complot des lumières pour faire sauter l'Ancien Régime car ils se contentent de manier un concept. Ils n'ont ni désiré ni déclenché la Révolution. L'esprit du siècle est un progressisme réformiste qui s'insère dans le cadre de l'absolutisme monarchique. [...]
[...] En effet, ARISTOTE utilise le terme de stasis en s'intéressant à la révolution, car il recherche la cause de disparition des régimes politiques et il y tente de la préserver de l'instabilité avec des remèdes. Il théorise la stasis non plus à partir de la philosophie, mais de l'histoire. Il développe une vision du mouvement constitutionnel non pas comme celle de PLATON (cercle mu par une décadence nécessaire) mais bien comme une évolution en spirale car le point de chute n'est pas constant et le déterminisme n'est pas irréversible. L'antiquité grecque a donc connu le concept avec ces deux majores. La pensée politique romaine est quasi inexistante en matière de révolution. [...]
[...] Apparaît le thème de l'invention d'un ordre nouveau qui se lie au concept d'Etat. Elle est au service de la formation et de la conservation de l'Etat qui ne peut survivre qu'en se transformant. En somme, l'émergence de la Révolution suppose une croyance en la perfectibilité de l'Homme. Le XIXe siècle se fait une spécialisation de l'idée et la pense positivement. On s'attache aux idées de progrès et d'organisation. MARX (1818-1883) dégage le concept du primat de l'économie qui relègue le politique au second rang. [...]
[...] Il en va de même pour la révolution bolchevique. Les grandes révolutions se font au nom d'une idéologie. Aucun des grands philosophes ne programme 1789. Marx l'attendra là où elle n'aura jamais lieu. L'idéologie a préparé des révolutions qui n'ont jamais eu lieu. La grande portée de 1789 est qu'elle va devenir une référence clef, un mythe politique déclenchant une analyse idéologique. En conclusion une révolution est la création d'un ensemble historique. Une rupture totale avec la continuité historique qui implique l'intervention des masses, une lutte entre des groupes sociaux et le pouvoir en place. [...]
[...] La distinction est critiquable car les deux sont le plus souvent liés. La prise en considération de poids de certains hommes sur le contexte (conception idéaliste) permet de contrer cette vision. Les révolutions d'Angleterre modifient la constitution, règlent le problème entre Etat et Eglise et consacrent la prééminence de la bourgeoisie. Cela reflète une révolution politique à soubassement social. La révolution américaine consacre l'édifice social et un système économique préexistant. La Révolution française est politique et elle bouleverse le champ social. [...]
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