Dans l'histoire, au fur et à mesure de son cours, depuis l'abolition des privilèges et l'avènement de principes républicains, les régimes ont intégré l'idée d'accepter la contestation de leur autorité, allant même jusqu'à notre époque d'institutionnaliser cette contestation. Néanmoins cette institution s'est concrétisée progressivement.
Après la Révolution, l'État étant dorénavant l'expression du peuple souverain, lui désobéir c'est se rebeller contre celui-ci ; c'est le pendant du crime de lèse-majesté. La réorganisation du pouvoir par Bonaparte consacre la restauration de l'autorité en politique et les régimes qui lui succéderont s'attacheront tous, même sous des inspirations diverses et parfois contraires, à préserver l'autorité. Les différents courants politiques durant le XIXe siècle sont d'accord sur l'essence et la nécessité de l'autorité. Ils sont unanimes sur le fait que l'autorité fait partie des valeurs respectées au même titre que l'ordre ou la hiérarchie ; elle appelle obéissance et discipline. C'est ce qu'on appelle le culte de l'autorité. Ce culte s'étend au domaine des idées et à leur transmission : il s'oppose à l'esprit critique. Un esprit critique et contestataire que va revendiquer la gauche libérale surtout à la suite de l'affaire Dreyfus.
Par la suite surviendra un armistice et s'établira un accord ; avec le temps et la pratique de la démocratie, une manière de compromis s'instaure entre liberté et autorité, sur lequel vivra la IIIe République jusqu'à la Seconde Guerre mondiale.
[...] Le libéralisme, qui reconnaît clairement un droit à contester l'autorité aurait donc une vocation suicidaire comme le souligne Extermann. La seule manière, à partir de cette constatation, de protéger le système, est de poser des limites légales à la contestation de l'autorité. La difficulté tient à la juste mesure de ces moyens de régulation : trop faibles, ils mèneraient à la chute de l'autorité. Trop stricts, ils deviendraient liberticides. Généralement, la contestation de l'autorité est refusée par le régime libéral lorsqu'elle prend une forme qu'il ne peut accepter. Le plus souvent, c'est lorsqu'elle devient violente. [...]
[...] Leur interprétation pousse certains à refuser la participation à la guerre, tandis que d'autres se battent et meurent pour leur foi. B/Accepter la contestation de l'autorité : une vocation suicidaire du régime libéral ? 1/Mettre des limites en droit à la contestation On a donc vu que le régime libéral accepte de légitimer, en son sein, la contestation de sa propre autorité. Mais comment donner le droit aux membres d'une société de contester l'autorité qui permet la cohérence de cette société, tout en garantissant la concorde intérieure ? [...]
[...] L'acceptation sociale, ordinaire de la contestation est différente de l'acceptation purement légale. 2/La crise du politique : un problème dans le rapport autorité/contestation On a donc vu que le régime libéral met des limites en droit à la contestation, afin de se protéger. Mais ceci n'empêche pas une certaine tolérance de la société au sens large, même pour des contestations de forme illégale. Un autre danger pour l'efficacité du régime libéral réside dans la multiplication des contestations. Le problème n'est plus leur forme –légale, illégale, violente –mais leur nombre. [...]
[...] Le maréchal Pétain réaffirme que l'obligation d'obéir à l'autorité doit être sans condition. Je le cite " Désormais, je vous tiens le langage d'un chef ; c'est lui que l'Histoire jugera. " Ce qui implique que les contemporains n'ont pas à se faire juges. Or, l'expérience est un naufrage : à mesure que la guerre se prolonge, que la politique se radicalise, de plus en plus de Français sont conduits à se faire une opinion personnelle, à juger par eux-mêmes, à considérer que toute décision de l'autorité n'est pas ipso facto légitime. [...]
[...] Elle se manifeste par le discrédit des discours doctrinaux, l'invocation perpétuelle de la complexité des enjeux ou des contraintes de la mondialisation, l'appel des politiciens à une vision plus modeste, leur timidité dans toute tentative de réforme, leur recherche de la négociation et du consensus avant toute décision Tous ces symptômes visent, entre autres à mettre l'autorité à l'abri de la contestation. Au lieu d'affronter ses contestations internes, l'autorité se dérobe. S'inscrit dans la même dynamique la tentation de se défausser sur l'expert, de justifier les décisions en se référant à la science voire à la force des choses. [...]
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