Philosophie, politique, mensonge, Jean-Jacques Rousseau, société civile, moralité politique, Hannah Arendt, sophisme, Blaise Pascal, légitimité politique, corruption, normes morales
Dans "De L'Imposture", Jean-Jacques Rousseau écrit : "Le premier qui, ayant enclos un terrain, s'avisa de dire : ceci est à moi […] fut le vrai fondateur de la société civile". Il montre ici que le commencement de toute société est avant tout fondé sur un mensonge, et par la même occasion que mensonge et politique sont liés. Le premier permet l'autre, c'est l'imposteur qui invente la propriété, de même, c'est le mensonge qui permet la politique.
Il semble que la politique requiert fondamentalement le mensonge. De fait, il s'agit de se demander si le mensonge est nécessaire en politique. De prime abord, notre question pourrait sembler polémique. Le mensonge est avant tout une dissimulation de la vérité, l'énonciation d'un fait contraire à la vérité en vue d'un bien généralement personnel.
[...] User du mensonge en politique est nécessairement traiter le peuple comme un moyen et non plus comme une fin. Plus qu'une morale, il est nécessaire que le champ du politique soit parcouru par une éthique. Si le mensonge est nécessaire en politique, il doit être utilisé avec sagesse. Mais les articulations entre mensonge et politique laissent ressortir un problème. Si le politique est nécessairement obligé de mentir, n'est-ce pas parce qu'il entre en contradiction avec la volonté de son peuple ? [...]
[...] Le peuple doit pouvoir identifier les mensonges et les refuser. Même si le pessimisme de Machiavel fait des hommes des êtres essentiellement méchants, inconstants, déraisonnables et incapables de tenir leurs engagements, on peut lui opposer l'optimisme mesuré de Spinoza et sa croyance dans la perfectibilité de l'homme L'homme de raison aurait alors tous les droits à prétendre à une politique de la raison, à la vérité. III. Opposition entre le mensonge et la morale L'axiome selon lequel il est nécessaire de mentir en politique s'accompagne d'un mensonge élevé si ce n'est au rang de qualité mais au rang de vertu. [...]
[...] Le mensonge, une vertu du politique ? Nous l'avons vu, il semble qu'il soit nécessaire en politique de mentir. Le mensonge s'impose par le langage et permet de justifier une prise de pouvoir par la force. Néanmoins, il accomplit aussi des miracles comme dans le cas de la défaite de 1940 que le Général de Gaulle transforme en victoire. D'ailleurs, Michel Rocard disait dans une interview en 2012 que la politique exige beaucoup de mensonges Mais si tel est le cas, et dans la perspective que la politique soit la poursuite d'un bien commun, le mensonge se poserait en vertu puisqu'il irait dans le sens d'un bien commun. [...]
[...] Et Machiavel ne sera pas le seul à considérer le mensonge comme un véritable moyen en politique. Si Machiavel le théorisait comme un outil dont il fallait faire usage avec sagesse et vertu, on peut aussi penser le mensonge comme un art à part entière avec tout ce que cela suppose. L'Art du mensonge politique est un pamphlet rédigé en Angleterre au XVIIIe siècle par John Arbuthnot qui définit le mensonge politique comme l'art de convaincre le peuple et l'art de lui faire croire des faussetés salutaires et cela pour quelque bonne fin L'auteur soutient que le mensonge en politique est permis mais surtout licite. [...]
[...] Lier le mensonge à la politique serait comme pervertir la politique qui est avant tout la quête d'un bien commun dans la cité et la société. Pourtant, nous constatons chaque jour que le mensonge est courant en politique. Les politiques ne tiennent que rarement leurs engagements pris dans le domaine public et n'en sont pas blâmés outre mesure. Si le mensonge est répréhensible dans le domaine privé, il l'est beaucoup moins dans le domaine public de sorte qu'il pose la question d'une double morale. [...]
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