Pourquoi ne pas choisir par tirage au sort ceux qui nous représentent ?

Résumé du document

Aujourd'hui, on dénombre plusieurs manières de choisir ses gouvernants : l'élection, le tirage au sort, l'hérédité, la désignation, etc. Face aux limites de l'élection, on s'interroge de plus en plus sur la possibilité d'envisager de nouvelles manières de choisir nos représentants. Mais le nombre de procédures différentes n'est pas illimité, et, de plus en plus, le tirage au sort semble réapparaître comme une alternative potentielle à l'élection.

Il s'agirait donc de se demander si l'on peut envisager de mettre en place dans nos démocraties contemporaines les mêmes modes de désignation de nos gouvernants que ceux qui existaient à une époque bien antérieure, et très différente de la nôtre. Car le temps de la démocratie directe en vigueur à Athènes est révolu, et la démocratie, système dans lequel le peuple se dirige par lui-même, ne s'exerce presque plus que par la voix de ses représentants. Par « gouverner », c'est d'ailleurs « représenter» que l'on entend dans nos démocraties modernes.

Or, des représentants peuvent-ils être représentatifs si ce ne sont pas ceux qu'ils sont censés représenter qui les choisissent ?

Extraits

[...] Les deux problèmes qui se posent principalement sont ceux de la compétence et de l'autorité des gouvernants. Tout d'abord, donc, intéressons-nous aux compétences requises pour gouverner un État. Machiavel, dans Le Prince, explique que la politique repose avant tout sur un principe d'efficacité, et non pas de vertu. Or, pour être efficace, ne faut-il pas être compétent ? A-t-on tous les compétences pour diriger un pays ? Même si cette affirmation peut sembler élitiste, on voit mal un ouvrier tiré au sort diriger des négociations lors du G8, par exemple. [...]

[...] Techniquement, donc, le tirage au sort favorise l'égalité entre tous les citoyens. Ainsi, puisqu'il y a une rotation des postes, tout citoyen peut se retrouver impliqué dans la vie politique, et ainsi, prendre des décisions qui le concernent, à tour de rôle. Il n'est alors pas possible que la loi d'airain de l'oligarchie énoncée par Roberto Michels dans son ouvrage Partis politiques, se confirme. Selon cette théorie, les partis politiques secrètent une nouvelle classe dirigeante, une élite, dont le seul but est de rester au pouvoir, ce qui devient contraire au principe d'égalité. [...]

[...] Tout d'abord, le tirage au sort permet l'égalité, qui est l'un des fondements de nos démocraties. En effet, la Révolution française ne s'était- elle pas faite au nom d'un combat pour l'égalité ? Pour le prouver, il suffit de s'en remettre au Premier article de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit Dès lors, comme l'explique Montesquieu dans L'Esprit des lois, le tirage au sort n'afflige personne Dans la mesure où le sort décide -si l'on part du principe que le sort n'est pas truqué personne ne doit éprouver un sentiment d'injustice, une impression d'inégalité : chacun peut être choisi un jour ou l'autre. [...]

[...] Or, tout le monde n'a pas reçu l'enseignement qui lui permet d'être compétent. On pourrait penser à Olivier Besancenot, leader du Nouveau Parti Anticapitaliste. Malgré son charisme certain, il est assez difficile d'imaginer qu'il pourra un jour être élu: dans l'esprit des Français, il manque de compétence du fait de son emploi de postier. Par ailleurs, il apparaît primordial de souligner un point, celui de la différence très poussée qui existe entre nos démocraties modernes et la démocratie athénienne. L'homme n'est plus un animal politique pour reprendre les mots d'Aristote. [...]

[...] Sinon, comment pourrait-on comprendre que l'on tire au sort les membres du jury lors d'un procès, alors même que ceux- ci n'ont souvent aucune compétence juridique ? Par ailleurs, le tirage au sort semble capable d'épurer la politique. En effet, nos démocraties modernes, souffrant de nombreuses failles, le tirage au sort pourrait être une manière d'en combler certaines. Tout d'abord, l'une des vertus du tirage au sort est qu'il permet d'éviter la corruption : techniquement, celle-ci n'est pas possible, dans la mesure où l'on s'en remet au sort. [...]