L'association des hommes dans une communauté politique, est-elle quelque chose qui relève de l'animalité, c'est à dire de l'instinct, de la nature ? Ne peut-on pas tenter de montrer qu'elle relève plutôt de l'utilisation de la raison par les hommes ? Parler d'animalité politique de l'homme suppose une sorte de déterminisme naturel qui le dirigerait inexorablement vers la communauté politique. On pourrait penser, au contraire, que l'institution d'une société est le produit de la raison de l'homme. Elle est la marque d'un passage de l'état de nature à un état de culture, d'une rupture avec des déterminismes naturels. Ainsi, ce ne serait pas l'animalité politique de l'homme qui le conduirait à raisonner mais plutôt la raison de l'homme qui le conduirait à l'animalité politique. Partant, si l'animalité politique de l'homme est entendue au sens de bestialité, on peut se demander quelle est son influence sur l'usage de la raison. L'animalité politique de l'homme, au sens d'une vie en Cité indépassable, est-elle cependant le seul moyen de la réalisation de la nature humaine, donc de l'utilisation de sa raison ? On peut se demander si ce ne serait pas plutôt la raison qui conduirait l'homme vers 'l'animalité politique'
[...] L'animalité ne se traduit pas seulement par l'exercice du pouvoir, puisque, nous l'avons vu, ce pouvoir est nécessaire à la société, mais par son abus. La phrase de Montesquieu dans l'Esprit des lois " tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser " illustre tout à fait cette idée. L'animalité politique en tant que passion de la domination serait donc le moyen de réintroduire la bête dans la société. L'animalité politique se confond alors avec la passion de l'exercice du pouvoir politique. Cette passion est une réaction aux contraintes posées par la vie en société. [...]
[...] Ainsi, les lois qui s'appliquent dans une société doivent être dictées par la raison ; elles permettent alors de discerner juste de l'injuste. Si cette condition n'est pas remplie, la vie en société ne peut conduire à la réalisation de l'homme. Animal de raison, l'homme doit l'utiliser pour réaliser sa nature dans la Cité. Pour Aristote, la fin de l'homme réside dans le bonheur individuel impossible sans le bonheur collectif. Ce bonheur collectif réside dans la contemplation du Bien qui n'est possible que si l'homme raisonne et n'est pas conduit par ses passions. [...]
[...] L'animalité politique, c'est à dire la vie en société conduit l'homme à raisonner. Mais, alors se pose la question de savoir quels sont les hommes capables de raisonner. Cette capacité à raisonner est- elle seulement réservée à quelques uns ou est-elle à la portée de tous ? Pour Aristote, l'animalité politique ne conduit pas tous les hommes à raisonner. En effet, la capacité à raisonner c'est à dire à discerner le Juste de l'Injuste n'est pas donnée à tous par la nature. [...]
[...] Alors, le passage à la vie en société n'est pas naturel mais une nécessité imposée par la raison. L'institution d'une société a pour objectif d'instaurer la paix grâce à la raison dans les relations entre les hommes. Ainsi, l'animalité politique de l'homme n'est pas naturelle ; mais elle est une construction artificielle de la raison. Cette nécessité de vivre en société pour l'homme est le fait de la raison qui le conduit à instituer un contrat pour fonder un Etat. [...]
[...] L'animalité politique de l'homme ne le conduit donc pas à raisonner. Il lui faut donc un maître mais encore faut-il que ce maître ne soit pas aussi un animal politique avide de pouvoir car il se laissera inéluctablement conduire par ses passions. On retrouve l'idée que l'animalité politique de l'homme, en tant que passion de l'exercice du pouvoir, pousse l'homme à abuser de son pouvoir, à ne pas utiliser sa raison mais au contraire à agir en fonction de ses passions. [...]
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