« En politique, le rêve des autres n'est que fausse monnaie » Cioran, Ebauche de Vertige. Considérant que c'est le rêve des autres que l'action politique monnaierait, cette affirmation de E. M. Cioran reviendrait à faire de tout homme politique un faussaire potentiel.
Il s'agit donc de ne pas sombrer dans le cynisme proposé dans l'énoncé et analyser plus concrètement les relations qu'entretiennent rêves et pragmatisme au sein de l'action politique, tout en incluant la dimension morale que comprend le fait de négocier, évaluer, dévaluer voire instrumentaliser le rêve des citoyens.
[...] Agir en politique, est-ce aussi monnayer du rêve ? En politique, le rêve des autres n'est que fausse monnaie Cioran, Ebauche de Vertige. Considérant que c'est le rêve des autres que l'action politique monnaierait, cette affirmation de E. M. Cioran reviendrait à faire de tout homme politique un faussaire potentiel. Il s'agit donc de ne pas sombrer dans le cynisme proposé dans l'énoncé et analyser plus concrètement les relations qu'entretiennent rêves et pragmatisme au sein de l'action politique, tout en incluant la dimension morale que comprend le fait de négocier, évaluer, dévaluer voire instrumentaliser le rêve des citoyens. [...]
[...] L'action politique qui ne monnaye que du rêve est donc dépolitisée, car détachée des circonstances. Par ailleurs, l'inflation du rêve en politique dévalue et altère les idéaux : les promesses de justice sociale, d'égalité ou de liberté absolue l'homme nouveau de Mao) conduisent au désintérêt du peuple pour la chose publique. Le danger de rêver la politique est aussi celui du désenchantement, comme celui des citoyens de la RDA dans les années 1980 ou celui des socialistes en France dans les années 1960, vis-à-vis du rêve communiste Les idéaux sont donc un moteur de l'action politique si l'éthique des politiques leur interdit de succomber à la tentation de déconnecter les rêves des circonstances, que ce soit par volonté de séduire ou par soif de pouvoir. [...]
[...] C'est le risque du totalitarisme, qui se présente comme un projet onirique global où l'individu n'est qu'un leurre explique A. Arendt, les promesses n'engagent alors plus que ceux qui y croient et le rêve se monnaye en influence, voire en argent sal. Occulter le peuple derrière le rêve monnayé revient en effet à réduire la fin de l'action politique à l'utopie d'un côté ou au pouvoir totalitaire de l'autre. C'est que la question du monnayage du rêve oppose en effet la dimension circonstancielle de l'action politique comme réponse à la contingence des événements et l'intemporalité des rêves. [...]
[...] A l'inverse, les mécanismes démocratiques garantissent l'arbitrage des intérêts et rêves de chacun : l'action politique représente un principe de réalité, mais la réalité reste perméable aux influences des idéaux de chacun. Il ne s'agit pas de glorifier le système actuel, mais de montrer la nécessité de la responsabilité de chacun quant à l'orientation de l'action politique. Le rêve en politique sert justement à orienter la réalité, il confère à chacun le pouvoir d'affirmer qu'il n'est pas " réaliste " de se soumettre à l'injustice, à la violence, à l'arbitraire. [...]
[...] Agir en politique est donc bien aussi monnayer du rêve, aux conditions que ce monnayage reste un moyen et non une fin, qu'il soit le corollaire d'une politique orientée vers les gouvernés et par les réalités conjoncturelles. En ce sens, le gouvernement ne doit pas avoir comme but de monnayer du rêve, au risque de courir à la démagogie, faire rêver le peuple pour le tromper sur la réalité du pouvoir, et au pire le totalitarisme, quand les rêves d'un seul deviennent monnaie unique. [...]
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