La question est plutôt surprenante à première vue. Comme si le pouvoir, le gouvernements et ses représentants, ne pouvaient se passer des croyances du peuple pour rester en exercice. Comme si le peuple faisait preuve d'une attitude crédule ; comme s'il était trompé, dupé, au profits des dirigeants politiques. Cette perspective, malgré les nombreuses affaires de corruption dans nos démocraties modernes, nous semble peu envisageable ; nous ne nous considérons pas comme un simple troupeau suivant son berger aveuglément, puisque le principe même de la démocratie est celui d'un peuple souverain.
Le sujet implique, dès lors, une réflexion profonde. Si le pouvoir se définit généralement comme la facilité d'exercer sur un homme une domination telle qu'on obtienne de lui des actes ou un comportement qu'il n'aurait pas adoptés spontanément, la définition mérite d'être affinée, de même que le mérite celle de croyance, qui peut être considérée comme le fait de donner son assentiment à un énoncé, sans preuve. « Donner son assentiment » : voilà une expression qui prend tout son sens lorsqu'elle est mise côte à côte avec le terme « pouvoir », et qui plus est le pouvoir politique, qui peut être l'art de gouverner de manière à ce que la vie collective soit orientée dans le sens de l'intérêt général, mais qui peut aussi être, d'un point de vue plus péjoratif, l'action dont la fin est la conquête et la domination.
Dès lors, le pouvoir, entendu ici comme régime politique, serait-il amené à faire croire des choses au peuple afin que celui-ci lui donne son assentiment et reconnaisse son autorité ? L'autorité est également un terme qu'il conviendra de distinguer de celui de pouvoir. Peut-on dire de toutes les formes de pouvoir qu'elles s'appuient sur des croyances et sont fondées par elles ? Mais s'agit-il uniquement des croyances des dirigés ? Et de quel type de croyances ? Quelles fonctions ces croyances exercent-elles sur la forme de pouvoir envisagée ? L'intitulé du sujet semble suggérer, à travers le « peut-il », que tout pouvoir, de fait, s'appuie sur des croyances, et ouvre la réflexion sur la nécessité des croyances comme fondement et auxiliaire du pouvoir. Un pouvoir politique est-il dans la capacité de se passer de croyances, et doit-il même le faire ?
[...] Or c'est bel et bien de cela qu'il s'agit, de la recherche de la justice et de la vérité, cette tâche dont le pouvoir démocratique moderne, puisqu'il accorde une large place aux différentes opinions, semble le plus à même de remplir. Cette chance ne doit pas nous échapper. [...]
[...] Aujourd'hui encore, on parle de démocratie chrétienne libérale pour désigner la doctrine politique, économique et sociale qui s'inspire à la fois des principes du christianisme et de ceux de la démocratie libérale. Ainsi donc, le pouvoir démocratique ne se caractérise plus, certes, par des croyances aveugles et la croyance en la divinité du souverain. Mais cela ne signifie pas que, indirectement, les convictions religieuses et surtout morales ne l'influencent pas, voire ne sont plus à la source de son apparition. Eloignons-nous quelque peu de la croyance morale comme fondement de la démocratie, et concentrons-nous maintenant, plus précisément, sur les opinions. [...]
[...] Le tyran, dès lors qu'il nuit à tous, est obligé de craindre tout le monde. Il ne peut jamais croire sa puissance assurée, et utilise des ruses. Il offre des jeux, des spectacles, des médailles qui constituent des récompenses et des instruments faisant croire qu'il est bon et qu'il satisfait ses sujets en leur procurant des plaisirs. Et par conséquent, le peuple continue d'acclamer le tyran, même après sa mort (il en est ainsi de Néron dans l'empire romain par exemple). [...]
[...] La troisième légitimation de Max Weber, la légitimation légale, se passe-t-elle de croyances ? PARTIE 2 : Qu'en est-il dans nos démocraties modernes, au sein desquelles crédulité et croyances religieuses ne fondent plus le pouvoir ? Qu'en est-il dans un Etat de droit désacralisé et institué par la volonté des hommes ? D'autres croyances ne sont-elles pas nécessaires ? Remarquons dans un premier temps à quel point les croyances religieuses, superstitieuses, et le caractère crédule ne sont plus nécessaires. Il faut partir de la définition même du terme démocratie. [...]
[...] Ce sont ces opinions qui, également, à travers le vote, vont désigner les dirigeants, qui sont appelés dirigeants non pas parce qu'ils dominent des dirigés, mais parce qu'ils les représentent. En ce sens, le pouvoir démocratique ne peut se passer des opinions ; il repose directement sur elles, puisque c'est le peuple qui détient le pouvoir. Que serait une démocratie sans opinion de la part de ses citoyens ? Enfin, il faut souligner un dernier aspect indispensable au sein d'une démocratie, c'est la confiance. [...]
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