L'institution judiciaire a fréquemment à traiter d'affaires relevant du non-respect de la propriété privée: elle sanctionne le vol, ou la dégradation du bien d'autrui. L'atteinte à la propriété privée suscite un besoin de réparation. Hume considère ici que l'injustice et la justice n'existent et ne sont ressenties comme telles qu'en raison de l'existence de cette propriété.
Pour démontrer cette proposition et la rendre « certaine », il procède a contrario, en envisageant des situations dans lesquelles la propriété n'a pas lieu d'être établie: de telles situations ne peuvent faire naître la justice ou l'injustice. On peut toutefois remarquer qu'il n'évoque, en fait de "parcimonie", que celle de la nature, faisant abstraction de tous les biens « non naturels» produits par l'activité même de l'homme.
[...] Voici une proposition qui, je pense, peut être considérée comme certaine: c'est uniquement de l'égoïsme de l'homme et de sa générosité limitée, ajoutés à la parcimonie de la nature quand elle a pourvu à ses besoins, que la justice tire son origine. HUME, Traité de la nature humaine [Introduction] L'institution judiciaire a fréquemment à traiter d'affaires relevant du non- respect de la propriété privée: elle sanctionne le vol, ou la dégradation du bien d'autrui. L'atteinte à la propriété privée suscite un besoin de réparation. Hume considère ici que l'injustice et la justice n'existent et ne sont ressenties comme telles qu'en raison de l'existence de cette propriété. [...]
[...] La propriété conjugale est ainsi limitée, et le partage entre amis a lui aussi des bornes: il n'est pas certain qu'il suffise à faire disparaître l'égoïsme, qui risque de faire retour pour peu que l'un des amis se trouve brutalement enrichi (ou appauvri). [B. Pourquoi une telle communauté ne peut-elle s'étendre Il est vrai que la communauté familiale des biens est plus ou moins large selon les types de société. Mais elle ne se généralise jamais à l'ensemble du social. La propriété, qu'elle soit mienne» ou nôtre est toujours distincte de celle des autres. [...]
[...] Une surabondance de tous les biens concevables permettrait-elle d'éviter une telle situation ? On peut sans doute en rêver, et quelques exemples y invitent: il est vrai que lorsqu'une municipalité met à la libre disposition de tous une quantité notable de bicyclettes, la possession privée d'une bicyclette perd toute signification, mais la généralisation de ce genre d'offre ne semble guère vraisemblable, du moins dans la société telle que nous la connaissons. Hume en souligne d'ailleurs le caractère très hypothétique: justice et injustice seraient inconnues si les hommes étaient nantis de toutes choses avec abondance [C. [...]
[...] L'organisation de la pénurie] Pour que de tels objets suscitent le désir d'appropriation, il est nécessaire qu'ils demeurent rares. L'économie de marché ne peut donc qu'organiser, artificiellement s'il le faut, leur pénurie: elle œuvre en sens inverse d'une surabondance qui priverait de tels objets de toute valeur (marchande bien sûr, mais aussi ou surtout symbolique). Comme l'avait noté Hegel, le désir se renforce du désir de l'autre: le bien qui devient ma propriété est d'autant plus précieux: qu'un autre l'a voulu, et continue à le vouloir. [...]
[...] [Conclusion] Hume élabore une reconstruction des conditions rendant la justice nécessaire, qui n'est pas très éloignée de l'hypothèse d'un état de nature: les besoins qu'il évoque sont réels ou authentiques, les sentiments d'amitié ou d'affection sont généreux. Bien qu'elle soit peu discutable d'un point de vue logique, sa position trouve vite ses limites dès que l'on examine aussi bien la transformation des besoins que ce que peut être une pénurie organisée économiquement. C'est pourquoi la notion de justice qu'il propose peut sembler incomplète: elle concerne la réalité de la propriété, mais non sa dimension symbolique, qui a historiquement pris de plus en plus d'importance, et se trouve désormais à la source du sentiment d'une injustice sociale que Hume ne pouvait envisager. [...]
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