La philosophie politique se doit de préciser ce que peut être le but de l'Etat, ainsi que les relations qu'il peut entretenir avec ses membres. En ses débuts, elle souligne surtout que le pouvoir doit être tout puissant ou absolu, et ne se préoccupe guère de ce que peut être la liberté.
Spinoza, avec son Traité théologico-politique, inaugure une réflexion bien différente: s'il affirme que l'état est bien souverain au sens ou c'est de lui que provient la loi que tous doivent respecter, il conçoit aussi qu'il a pour fin la liberté des « sujets ».
Ces derniers, pour que l'Etat puisse être instauré, ont pourtant renoncé à n'agir qu'en fonction de leur propre désir.
[...] Enfin, son action est inutile et stérile: le contrôle des opinions, orales ou publiées, est possible, mais celui des pensées de chacun ne l'est pas. La liberté d'opinion est aussi religieuse: Si l'on prolonge les considérations de Spinoza, on peut avancer qu'il réclame que soient respectées, non seulement la liberté d'opinion mais aussi celle de religion, ce qui, à son époque, est peut-être plus audacieux encore. L'Etat n'a pas plus à imposer les formes de la croyance ou ses dogmes qu'il ne peut imposer une opinion de manière en quelque sorte totalitaire En d'autres termes, l'Etat tel que le conçoit Spinoza est bien laïc, et il laisse à chacun la liberté d'adhérer à la religion de son choix, pourvu que les différentes pratiques religieuses ne troublent pas la paix publique. [...]
[...] De plus, chacun est intimement persuadé qu'il soit tout, et qu'il a donc forcément raison dans tout ce qu'il affirme. EN conséquence, il est impossible que tous les hommes partagent une même opinion et arrivent à se mettre d'accord sur quoi que ce soit. Même si l'on admet que certains peuvent néanmoins être d'un même avis, on voit qu'on n'aboutit qu'à la constitution de groupes, liés par l'opinion partagée, mais qui ne peuvent s'entendre entre eux. Dans de telles conditions, il est clair que, s'ils continuent à n'agir que selon leurs propres décisions, la paix est inconcevable. [...]
[...] Chaque homme peut y formuler les opinions de son choix et de son goût sans être inquiété, pourvu que ce soit par des voies acceptables et pourvu qu'il obéisse rigoureusement aux décrets du souverain. Ce dernier supporte que l'on discute ouvertement ses décrets, mais il lui serait fatal que l'on puisse agir contre eux. On comprend à quel point la conception ici établie par Spinoza trouve une illustration dans la démocratie contemporaine: s'il n'était pas possible de faire connaître des avis divergents et de formuler des critiques raisonnables des décisions du souverain, comment une minorité pourrait- elle accepter les lois prises par la majorité? [...]
[...] Si l'Etat a ainsi pour fin globale la liberté des hommes, cela signifie qu'il est instauré pour leur être utile, et pour répondre à leur essence ou nature propre (conatus). Il s'agit donc de le comprendre, non comme leur étant imposé par quelque puissance qui leur serait extérieure (ce qui renvoie à une conception théologique du pouvoir) et comme leur imposant en conséquence des contraintes non conformes à ce qu'ils sont, mais au contraire comme une conséquence ou une réalisation de ce qu'ils sont, qui doit leur apporter les satisfactions auxquelles ils ont droit. [...]
[...] Ainsi l'âme et le corps pourront s'acquitter en sûreté de toutes leurs fonctions le développement physique et la faculté de se déplacer ont lieu en sûreté (en sécurité), au même titre que l'usage des facultés de l'esprit. De ces dernières, la raison est la principale: il convient que les hommes en usent librement. Mais l'Etat doit se préoccuper des conditions de la vie collective, en mettant fin aux conflits particuliers (les luttes dues à la haine ou à la colère, ou intervient la ruse) et en établissant une coexistence d'où disparaît toute malveillance terme à prendre au sens fort, comme volonté de faire du mal à autrui. Qu'Est-ce que la liberté comme fin de l'Etat? [...]
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