"L’Etat moderne : genèse", Jean-Philippe Genet - "L’Etat moderne : un modèle opératoire ?"

Résumé du document

Jean-Philippe Genet est un historien français, dont l'œuvre est majoritairement consacré à l'Angleterre du Moyen-Âge. Il a notamment participé aux études du CNRS en 1988 sur la genèse de l'Etat moderne, apportant sa contribution en comparant la France et l'Angleterre. L'ouvrage dont est tiré l'extrait commenté est un rassemblement des réflexions des différents participants à cette étude, avant qu'elle ne devienne un projet européen.

L'extrait étudié est en réalité la conclusion de toute cette étude, résumant le cheminement des systèmes européens vers la genèse de l'Etat moderne. L'auteur s'appuie particulièrement sur l'évolution des guerres en Europe, qui, selon lui, constituent le facteur principal de la transformation des régimes féodaux en États modernes. Ainsi, selon l'auteur, l'Etat moderne n'est absolument pas une construction idéologique ou théorique. Contrairement à la plupart des idées reçues, l'Etat moderne n'est pas né après qu'on en ait décrit tous les traits.

Extraits

[...] Les anciens modes de prélèvements ne suffisent donc plus à alimenter cet effort. En effet, auparavant, lors de conflits, le roi se permettait de prélever exceptionnellement un impôt à ses sujets et aux villes. À la fin du Moyen- Âge, ce caractère exceptionnel est désuet : il faut régulariser les prélèvements, donc les augmenter. Il s'agit donc bien d'un bouleversement structurel, car désormais, le principal prélèvement s'effectue par l'Etat et non plus par le seigneur. Ce qui explique que les premières résistances vinrent non pas des paysans mais bien des grands barons. [...]

[...] Ces compétences sont transmises aux agents de l'Etat, notamment au travers des universités récemment ouvertes. L'Eglise sert aussi à légitimer l'autorité royale auprès du peuple, comme il en a toujours été au travers de tous les rituels du sacre et de l'onction. Mais désormais, le roi n'y est plus soumis. III/ Les changements culturels amenés par la naissance de l'Etat moderne En conséquence de ces deux phénomènes, on s'attend bien évidemment à ce que les pratiques culturelles des sociétés occidentales changent. [...]

[...] L'Etat doit donc acquérir une nouvelle légitimité, ceci en bouleversant les structures sociales du féodalisme en se dégageant de l'autorité spirituelle et temporelle de l'Eglise(II) et en créant un système culturel distinct (III). Faire accepter l'impôt : la recherche de légitimité de l'Etat Pour l'auteur, ce qui a constitué le moteur de la formation de l'Etat moderne, c'est la guerre. Plus particulièrement celles qui opposent les deux grands royaumes du Moyen-Âge en Occident, à savoir l'Angleterre et la France. Pas seulement la guerre de Cent Ans : si l'on s'en réfère à la chronologie de l'auteur, celui-ci date la naissance de l'Etat moderne entre les années 1280 et 1360. [...]

[...] Ce n'est qu'à partir de Clément successeur de Boniface VIII cité plus haut, que le roi de France tient vraiment le pouvoir religieux sous sa volonté. Alors que l'Eglise, au Haut Moyen-Âge, dominait les valeurs et les croyances des hommes, détenait un pouvoir sacré, ceci même sur les plus grands souverains, elle passe progressivement, à partir du XIIIe siècle, sous l'autorité des grands rois d'Europe, qui revendique leur autonomie. Néanmoins, il ne faut pas croire que dès lors, l'Eglise a cessé d'exister pour l'Etat : il y a toujours une étroite collaboration entre les deux institutions, particulièrement dans le domaine du droit et de l'administration. [...]

[...] L'écrit se développe considérablement aux XIIe et XIIIe siècles, permettant une collecte et un traitement plus rapides de l'information. Alors que la théologie était la seule source de production littéraire au début du XIIe siècle, on assiste à un mouvement scientifique et artistique incroyable, dirigé par l'écrit, tout au long du XIIIe siècle. Après le droit, ce sont d'autres disciplines qui se détachent du carcan ecclésiastique : la médecine, la science physique, et enfin la science politique et la redécouverte d'Aristote, avec, cités plus hauts, les ouvrages de Machiavel et de Hobbes qui viennent théoriser l'Etat moderne aux XVIe et XVIIe siècles comme aboutissement de ce mouvement. [...]