Le problème du rapport entre langage et pensée est souvent abordé sous un angle chronologique : est-ce la pensée qui détermine le langage ou le contraire? Rousseau admet ici implicitement qu'il existe d'abord des idées à communiquer. Pour ce faire, le langage n'est pas dû à la présence d'organes, mais à celle d'une "faculté propre à l'homme" qui les utilise dans ce but.
L'affirmation est démontrée en deux temps complémentaires: sans les organes, les hommes mettraient au point d'autres moyens de communication, mais les animaux, qui ont les organes, sont incapables d'un tel usage. C'est que leur "langue" est "naturelle", et non pas acquise. D'où leur stagnation, alors que la "langue de convention" permet aux hommes de progresser.
[...] La preuve en est que si les organes font défaut, on peut communiquer quand même. Des moyens de substitution sont concevables En effet, si l'homme disposait d'une organisation (physiologique) plus grossière il aurait sans doute moins d'idées: leur expression serait freinée. Mais pour qu'il y ait communication, il suffit que l'un puisse agir et l'autre sentir l'homme grossier pourrait recourir aux gestes ou aux cris, et les idées seraient, même peu nombreuses, toujours communicables. C'est ce qu'affirmait déjà Descartes en soulignant que les hommes les moins favorisés (les sourds et les muets) ont coutume d'inventer quelques signes (Discours de la méthode) par lesquels ils se font comprendre. [...]
[...] Mais les progrès peuvent avoir lieu (comme toujours chez Rousseau) en bien comme en mal. Car le langage peut dire le vrai comme le faux, le juste comme l'injuste. C'est pourquoi les usages (bons ou mauvais) du langage témoignent de l'orientation de la pensée collective. Rousseau, en soulignant que la langue de convention n'appartient qu'à l'homme et qu'elle va de pair avec les progrès de ce dernier, suggère le caractère institutionnel de la langue, en même temps que son éloignement possible de la vérité. [...]
[...] Son origine naturelle la condamne à la répétition stérile, en marge de l'histoire. Quels sont, à l'opposé, les avantages de la langue de convention Elle est inventée (cf le début du teste), puisqu'elle dépend d'une convention au double sens du terme: réunion ou rassemblement (des hommes), puis décision prise ensemble. Elle est donc modifiable, également par convention le vocabulaire peut s'enrichir, les formes se complexifier. On doit l'apprendre puisqu'elle n'est pas innée. La conséquence est qu'on peut en apprendre plusieurs: donc facilité de la communisation entre espèces d'hommes (ou nations) différentes. [...]
[...] Ils sont capables de hurler, d'aboyer, de miauler, etc. Dans certains cas, ils parviennent à imiter le langage humain (les pies et les perroquets, déjà cités par Descartes, qui souligne aussitôt qu'ils ne peuvent parler ainsi que nous en expriment une pensée). Ce qui leur manque, c'est la présence des idées C'est pourquoi leurs organes, même perfectionnés, ne leur servent pas à parler Ceci est confirmé avec l'exemple des animaux les plus sociables : ils travaillent et vivent en commun. [...]
[...] "Essai sur l'origine des langues", Jean Jacques Rousseau (1781) Le problème du rapport entre langage et pensée est souvent abordé sous un angle chronologique: est-ce la pensée qui détermine le langage ou le contraire? Rousseau admet ici implicitement qu'il existe d'abord des idées à communiquer. Pour ce faire, le langage n'est pas dû à la présence d'organes, mais à celle d'une faculté propre à l'homme qui les utilise dans ce but. L'affirmation est démontrée en deux temps complémentaires: sans les organes, les hommes mettraient au point d'autres moyens de communication, mais les animaux, qui ont les organes, sont incapables d'un tel usage. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture