QI Quotient Intellectuel, Christina Dalcher, politique, roman dystopique, société américaine, éducation, enseignement, époque nazie, eugénisme
QI est un roman dystopique écrit par Christina Dalcher et publié en 2022. Il raconte l'histoire d'Elena, une mère de deux enfants, qui évolue dans une société américaine où votre vie est dictée par votre score Q, rappelant inévitablement le fameux quotient intellectuel, évaluant votre intelligence en se basant sur de nombreux critères : votre potentiel, mais aussi votre respect des règles et les scores de vos proches. Ce score va ainsi avoir une influence sur les métiers auxquels vous aurez accès, mais aussi et surtout pour les enfants aux écoles auxquelles vous serez affecté : les écoles argentées pour les scores supérieurs à 9, les écoles vertes pour les scores entre 8 et 9, et les écoles jaunes pour les scores en dessous de 8. Elena, alors enseignante en biologie dans une école argentée, commençait à remettre en cause ce système, quand un évènement va bouleverser son quotidien : sa plus jeune fille, Freddie, alors en école verte, vient de rater son test mensuel et a vu son score passer en dessous de 8. Envoyée dans une école d'État à des centaines de kilomètres de chez elle, sans aucune possibilité d'entrée en contact avec sa famille, son sort inquiète au plus haut point Elena qui va décider d'enfreindre les règles pour sauver sa fille de cette école-prison, au péril de sa propre vie.
Mais en quoi cette dystopie est-elle une critique politique à la fois du passé, du présent et du futur ?
[...] Nous n'apprendrons que plus tard qu'elle affichait une attirance pour les filles, orientation sexuelle qui ne semble par tolérée par le régime. Tout comme les Juifs lors de l'époque nazie, toute personne ayant une sexualité ou une religion différente de celle prônée par le gouvernement se voit donc « mise à l'écart ». Pour finir la comparaison avec le système nazi, toute dictature a besoin d'une figure charismatique à sa tête : dans QI, ce sera la ministre de l'Éducation (en collaboration avec Malcolm, le mari d'Elena) qui mènera ce système de couleur et la propagande qui l'accompagne. [...]
[...] Christina Dalcher utilise deux métaphores dans QI pour décrire cette progressivité et expliquer l'acceptation de diverses situations qui en temps normal ne le seraient pas. L'une est celle de la grenouille, qui, plongée dans de l'eau bouillante, va bondir pour s'en échapper, tandis qu'en la mettant dans une marmite d'eau froide, et en laissant l'eau chauffer petit à petit, elle ne s'en rendra pas compte et sera cuite avant qu'elle n'ait le temps de penser à s'enfuir. La seconde est celle de la bouse de vache, qui, déposée sur notre chaussure, nous ferait l'enlever immédiatement. [...]
[...] Suite à son opération de stérilisation chimique, Elena est renvoyée chez son mari qui l'enfermera dans sa chambre sans lui fournir les médicaments fournis sur ses ordonnances, entrainant une aggravation de la septicémie donc elle s'est mise à souffrir, et entrainant, à la fin du roman, sa mort. Ce n'est qu'après cette chute bouleversante que le lecteur peut enchaîner sur le « mot de l'autrice », expliquant la réalité que fut l'eugénisme, et mettant ainsi en perspective la fiction avec les faits historiques. Christina Dalcher participe ainsi à la vulgarisation de politiques étatiques dont l'horreur tente d'être oubliée : l'eugénisme n'est généralement pas évoqué dans les programmes scolaires d'histoire. Nous avons pu voir que cette dystopie est une critique amère du passé, mais s'arrête-t-elle là ? [...]
[...] Un passé honteux à oublier : l'eugénisme Contrairement au nazisme, Christina Dalcher n'évoque pas tout de suite le thème de l'eugénisme, mais le laisse s'installer au fil du roman, ajoutant à l'horreur de la situation dans laquelle se trouvent les enfants des écoles jaunes. En effet, la seule raison pour envoyer les élèves considérés comme « idiots » est-elle réellement de les sortir des villes pour effectuer des économies budgétaires et donner plus d'opportunités aux élèves à haut potentiel ? [...]
[...] L'éducation se résume-t-elle à l'évaluation chiffrée, basée sur une grille uniforme applicable à tous les élèves ? Quels effets psychologiques peuvent avoir les notes sur les enfants ? Par ailleurs, le parcours d'Elena, qui était passionnée d'art, mais qui s'est rabattue sur la biologie sous les conseils de son mari, en réponse à l'opportunité de rentrer en tant qu'enseignante dans une école argentée et gagner sa vie, amène aussi à se questionner sur l'orientation scolaire des élèves de nos propres sociétés. [...]
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