Qu'est ce qu'être un écrivain marocain engagé ? comment l'écriture de Serhane s'engage-elle dans la voie du militantisme politique et social ?
[...] L'écriture arrache des témoignages au silence, en une parole qui libère l'imaginaire et exorcise les tabous. Porte-parole des intérêts du peuple marocain, dénonciateur des torts de la société et du dysfonctionnement du système, Serhane a habilement tissé une mosaïque bouleversante de récits, remplis de scènes sombres, de portraits acerbes ou douloureux, d'images puissamment évocatrices, chaque pièce de cette mosaïque constituant un cri d'engagement pour un renouveau et un lendemain meilleur pour la société marocaine. Soulignons que l'engagement de Serhane n'est pas un prétexte littéraire de circonstance, mais reflète la conviction profonde de l'auteur et sa volonté de dénoncer les abus et dégradations de la société. [...]
[...] En s'adressant directement à l'opinion publique. En septembre 1957, co-écrit avec l'écrivain Georges Arnaud, Vergès publie « Pour Djamila Bouhired » aux éditions de minuit. Il ne s'agit pas là des velléités d'un avocat déçu de ne pas être devenu écrivain, mais bien là d'un professionnel aguerri qui, tel un forcené, jette toutes ses forces dans un combat pour obtenir l'acquittement ou la grâce. Rappelons les termes de Me Paul Lombard, avocat de Christian Ranucci, exécuté en 1976 : « Je me souviens des bruits horribles qui brusquement viennent saigner le silence. [...]
[...] De surcroît, le roman autobiographique englobe aussi de nombreuses fictions dictées par les scènes de la vie quotidienne des années soixante. Cette dimension personnelle issue de la relation de l'auteur au monde illustre le fait que les thèmes évoqués sont à la fois un discours engagé et (si ce n'est plus) des composants structurels de son imaginaire. Dans l'œuvre narrative, il ne s'agit pas seulement d'évoquer une image repoussante du Maroc à des fins cathartiques, mais également l'illustration du prisme d'analyse de l'auteur marqué par son propre vécu. [...]
[...] D'autres libres esprits ont payé des prix plus lourds et ont vu la nuit carcérale murer leur velléité d'expression. L'on pense ici au reporter érythréen Dawit Isaak, détenu au secret derrière les barreaux d'Asmara, à Naguib Mahfouz, prix Nobel de littérature ans, poignardé à la gorge en juin 1992, l'écrivain Farag Foda, tué parce qu'il préconisait la séparation de la religion et de l'Etat, Sodiq Melallah, poète décapité au sabre par les autorités d'Arabie Saoudite pour crime de blasphème, ou encore à l'écrivain chinois Liu Xiaobo, condamné à 11 ans de prison pour « subversion au pouvoir de l'Etat » auquel il a été attribué le prix Nobel de la Paix en 2010, symboliquement déposé sur une chaise vide en 2010 pour rappeler au monde son existence. [...]
[...] En 1993, il reçoit le prix français du monde arabe puis, en 1999, le prix Francophonie, Afrique méditerranéenne. Au printemps 2000, ce contestataire a dû s'exiler définitivement au Canada avec sa famille. Faisant suite à ce préambule, il convient de rappeler à titre liminaire le courant littéraire dans lequel s'inscrit l'écriture engagée d'Abdelhak Serhane. Avec d'autres nouveaux auteurs, il incarne dans les années 1980 et suivantes le nouvel élan donné à la littérature marocaine d'expression française, s'inscrivant dans la lignée des grands auteurs des années 1960 et 1970 tels que Driss Chraïbi et Tahar Ben Jelloun, et donne un souffle inédit dans la mesure où ils se servent de leur plume comme arme au service de leur cause. [...]
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